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3 mars 2010 3 03 /03 /mars /2010 01:36
C'est un long roman, c'est une belle histoire,
C'est une romance, pas d'aujourd'hui.
Forcément...

Je quitte Queenstown des larmes pleins les yeux. Ce n'est pas tant à cause du fait que la ville va me manquer comme cent grammes de chouquettes pas trop cuites, mais plus à cause des effets secondaires inhérents à la pratique d'activités de haut vol doublées de descentes alcoolisées de bas étages. J'ai besoin de calme et de félicitée, de plus d'authentique que de précédemment cité.
Mon Nutella a besoin d'être apprécié autrement qu'en aller-retour entre mon estomac et un sac en papier laissé à cet effet spécial.

Là où je vais, rare sont ceux qui en sont revenus. Rares aussi sont ceux qui y sont aller, c'est pour ça. Les légendes qu'on narre à propos de cet endroit aux confins du monde sont napées de brumes et de terres inhospitalières. Même les moutons n'osent y mettent pas un sabot, c'est vous dire...

Doubtful Sound, puisque c'est de cela qu'il s'agit, est sans exception, le théâtre le plus dramatique de toute la Nouvelle-Zélande en plus d'être aussi le plus pluvieux. C'est un fjord majestueux dont la découverte se fait exclusivement en bateau, les sentiers locaux étant nettement plus appropriés aux goélands qu'aux mules de toutes sortes, moi compris. Et avant de le rejoindre le bateau, il faut encore prendre un bus (celui duquel j'adorerais te dire que je t'écris mais non, tu l'auras compris je suis vautré dans un coin du Mexique, celui en haut à droite sur la carte), puis un autre, puis un premier bateau pour traverser un lac, puis un nouveau bus qui lui, enfin, te fais voir la mer s'enfermer, se coller le nez contre les montagnes, et te déposer le pied marin sur le pont d'un grand voilier majestueux qui a le bon gout d'avoir, en plus de repas gargantuesques, de quoi t'héberger pour la nuit. Pas évident, donc, de l'approcher le pépère!!
Sachant qu'en plus, il faut que le soleil soit de la partie ce qui serait une gageur pour le lendemain tant le ciel est plombé d'une grisaille déjà plus menaçante puisqu'elle laisse déjà choir ses hallebardes qui rendent l'arrivée à Ti Anau en rien apocalyptique quand je cherche ma GH.

Trempé entre le programme rinçage et essorage, je me répends dans mes propres flaques quand la réception me réceptionne, me glaçant d'effroi quant à l'évocation de la météo dans les jours à venir. J'ai bien fait de prendre la carte fidélité des auberges de jeunesse kiwies, je risque de prendre littéralement racine dans le bled détrempé. Je ne suis pas le seul.
Les derniers à avoir pu se flatter l'oeil d'un rayon de soleil ont déjà mis les bouts depuis plusieurs lunes, ne restent que ceux qui attendent et ceux qui n'en peuvent plus d'attendre et qui affrontent ciel bas, douche écossaise et crépuscule dans des camaïeux de gris coute que coute.
Moi, j'ai le temps enfin j'espère.
Je laisse passer la journée du lendemain.
Que dit la météo? Si elle parle au présent, elle dit : "Aaaaaahhh Aaaahhh!! Je t'ai bien eu!!!!!!! Ce tombeau sera vooootre tombeau!!!!", si elle parle au futur, elle dit plutôt : "Patieeeence étranger, patieeeence!!! Je vois de la lumière au bout de ce tunnel étroit et obscuuur!!!"
 
Une autre journée passe. L'évantail des activités va du visionnage de DVDs, à la rencontre d'autres bloqués du climat, à l'écriture. Aaahhh, l'écriture!!!

Une autre journée passe. J'ai bien sympathisé, jusqu'à partager du vin, du rhum, de la bière et du nutella. J'ai regardé pleins de films. J'ai écrit. Débordé!!

Que dit la météo? "Même joueur, même temps, jouent encore...".

Une autre journée passe, c'est la dernière. Mon tour est maintenant venu d'être chaussé des souliers de celui qui doit s'envelopper dans le doute d'un départ certain le lendemain. Il faut que je réserve ma croisière, c'est ma dernière chance avant d'avoir à voler vers Auckland, avant le survol, plus long, du Pacifique.
Je remonte alors la rue principale de Ti Anau que je connais par coeur et acquiers inquiet le précieux sésame.

Au matin, ma tête reste au sec quand je passe la porte mais mes pieds sont en alerte, méfiants quant aux flaques géantes toutes justes écloses de la nuit dernière.
Le bus arrive. Sa tournée des hotels achevée, il est plein.
En trente minutes, on se retrouve face à un lac dont on pourrait croire que c'est la mer tant ici ils s'entrelacent. La traversée s'effectue à grande vitesse et les cheveux au vent. Il a beau faire froid à faire de mon nez une fontaine de gouttes, le spectacle mérite le nom.
Si tu as bien suivi, il y a maintenant un bus. Un bus qui serpente déjà entre les falaises desquelles s'écoulent des cascades aux débits impressionnants. De notre lac perché jusqu'au niveau de la mer, on prend, la machoire désolidarisée, la mesure des évènements. Passé un semblant de col, on domine le bout du Doubtful Sound. On pourrait croire que c'est un lac, mais non, Des tentacules d'océan s'enfonçant sans remors dans la terre déjà torturée de montagnes. Dantesque d'autant que miraculeusement, le bleu du ciel bataille avec le gris pour se tailler une place au soleil. J'ai tellement le cul bordé de nouilles que ça me permet de réfléchir à cette expression imagée bien particulière au lieu de me soucier de contingences climatiques.
Au moment de monter à bord du Flordland Navigator, les soucis cotoneux ont fini de se croire tout permis et ont pratiquement achevé de déserter la voute azur.

A bord, une fois le discours de bienvenue et de sécurité digéré, il faut encore prendre possession de sa couchette avant de pouvoir s'émerveiller des alentours qui défilent, signe que nous avons levé l'ancre. Les lits s'entassent par paquet de six là où un seul matelas aurait déjà des difficultés à franchir le seuil de la piècette. On sent vraiment qu'on est sur un bateau même si en terme d'inconvénience, c'est d'un tout petit niveau étant donné que le lit n'est véritablement intéressant ici que lorsque le marchand de sable viendra jeter à mes yeux sa poudre somnifère. Pas question d'y squatter pendant quinze jours, le temps est précieux pendant une croisière de vingt-quatre heures!!
D'ailleurs, j'arrête de vous en parler et je monte sur le pont supérieur!! Là, je vois le soleil pour la première fois depuis cinq jours, depuis les acrobaties aérienne de pas triste mémoire! Joli coïncidence... Sauf que tout ici est différent!! Pas besoin de harnais pour s'assoir sur la chaise longue, l'alimentation riche et la consommation d'alcool sont encouragées, le rythme permet de cligner des yeux sans qu'on vienne à rater quoi que ce soit. La seule chose qui soit un tant soit peu similaire, c'est le vent même si j'en étais protégé dans ma bulle de verre à l'heure de faire des tonneaux. Une fois installé sur mon transat un thé chaud à la main, je souffle sur celui-ci pour que la chaleur s'en dissipe au même moment où souffle également une rafale qui envoye mon breuvage à deux mètres à la ronde. C'est festif...

Le bateau rejoint ainsi l'entrée du fjord. La grande bleu s'étalle laissant seules ça et là quelques îles inhospitalières pour qui n'est pas un phoque ou un pingouin.

Vient ensuite, alors que nous replongeons dans le bras cassé de mer, l'heure du quatre heures. Tous les passagers sont réquisitionnés à l'intérieur où le gueuleton servi pourrait nourrir une famille népalaise sur trois générations. Mais qui dit réquisition dit aussi désertion. Coute que coute, je resterais sur ma passerelle! Et puis de toute façon, le dîner est servi dans trois heures! Je peux aussi bien me passer de tarte aux pommes!
La bectance des autres terminée, nouvelle alerte générale!!
Nouveau choix cornélien à l'horizon!!! Damned!!
Cette fois, il faut se prononcer entre la promenade "couler douce" en canot pneumatique et celle "couler dure" en kayak individuel. Pas la peine de miser un cent sur la tondeuse collective, le bookmaker refuse de prendre les paris.
Le gilet de sauvetage sceillant comme un marcel-bouée enfilé, j'ai mon sceptre magique, ma pagaie maintes fois moulinée!
On part alors se promener le long des berges sur lesquelles, si tu es un acrobate, tu peux te promener au bord de deux précipices, chacun de leur versant. Nous, on reste au niveau de l'eau, petits joueurs mais pas aidé non plus dans le principe d'ascension de parois en kayak.
La petite virée nous prend une heure au terme de laquelle j'entends moultes collègues se plaindre de la pénibilité de la rame par temps clair sur une mer plate. Soit. Sauf que moi, j'en sors requinqué. J'ai même tellement la santé que je me lance pour piquer une tête du haut de ma terrasse flottante.

- "Que neni mon bon que neni. Tu sauteras de là où on te diras de sauter"

Un compromis fut vite trouvé.
Sans même me mouiller la nuque (sécurité avant tout), je me jète alors dans l'eau sombre, de celle qui après une fraction de seconde dedans te fais fantasmer la douceur de la Mer du Nord. Avant d'aller voir en bas, je n'avais pas comparé mon épaisseur de graisse avec celle d'un phoque. A moi, on ne m'a jamais : "il faut que tu fasses des provisions pour l'hiver si tu veux vivre". Résultat, sanction, je suis foudroyé. En deux brassées, c'est la sortie de secours. Sauf que sur le pont inférieur, c'est la cohue. Chacun est parti cherché son maillot de bain pour une session improvisée. C'est même la queue sur le plongeoir!! Nourri de cette folie de groupe, j'y retourne alors aussi, paufinant mon saut pèr' arrière, ma signature, remontant au sec chaque fois en noyant femmes et enfants. (NDLR : s'il l'eut fallu)

On rejoint alors notre point d'attache idéal dans le coucher de soleil qui se déploye et dans le lever qui s'annonce grandiose.

Mais avant, il faut passer à table!! C'est incroyable ce que les gens mangent!! Qui plus est, le grand jeu est sorti. Salades, poissons, boeuf, poulet, magrets de canard, tout y passe. Je ne me gène pas. Dans ces moments-là il faut embrasser le mouvement!

Au moment de passer en chambre, j'annonce d'entrée que je me lève juste avant l'aube. En effet, le réveil officiel étant programmé à 7h30, si tu le respectes, c'est comme si tu te tirais une balle dans le pied. Tu n'as pas envie de te tirer une balle dans le pied? Alors tu te réveilles à 5h15 pas plus tard!!! C'est l'élé en Nouvelle-Zélande et le soleil est plus matinal encore qu'un vietnamien moyen.
Sur ce monument de bon conseil, les trois autres présents dans la boite à chaussures géantes m'enjoignent de les tirer du lit aussi. Soit, j'aurais déjà beaucoup à faire avec moi-même pour m'auto-persuader de l'opportunité de ce réveil nocturne mais soit.

A l'heure dite, c'est l'heure des braves. Tous ceux que je réveille se rendorment. Enfin des braves, faut voir... En plus de prendre mon appareil photo, je m'extrais de la chambre, habillé de toutes les couches possibles disponibles, ma couette sous le bras. Et pourquoi pas?
Comme j'ai bien fait, dehors ça souffle comme aux plus belles heures et je tremble à l'idée de tomber à l'eau. Ma couverture, c'est mon parachute chauffant, ma récompense!! Ma pré-récompense. Car ce qui compte tout de même, c'est que ça n'ai pas été en vain. Le spectacle est magnifique. Je suis rejoints au compte-gouttes par les premiers d'attaque. On est au complet pour le petit déjeuner! Encore une fois, ce serait dommage de se tirer une balle dans le pied en ratant le spectacle.
Finis le poisson, le boeuf et le canard, place aux croissants, oeufs, pancakes, salades de fruits, tous au pluriel!
Si tu es soumis à de fréquentes mais controlables prises de poids, attention, la croisière au Doubtful Sound, c'est danger! Danger d'en prendre deux sur la balance en vingt quatre heures de gueletons incessants!!

Le programme reprend ses droits. Le temps passe plus vite que notre rythme vogant sur l'eau.
En s'enfonçant plus profondément dans les entrailles de la créature, on finit par en voir le bout, le bout d'un de ses bras. Là, le moteur se coupe. C'est la minute de silence. En vrai. Réquisitionnée.
L'eau est un miroir dans lequel se reflètent les montagnes. Le silence est d'une profondeur infinie... Jusqu'à l'accident.
Au beau milieu de notre minute méditative, le moteur d'une autre croisière se rapproche. Une seule compagnie affrète des bateaux sur Doubtful Sound mais ils en affrètent deux! Résultat, on avait beau ne pas l'avoir vu de la journée, c'est sur la toile cirée de notre émerveillement légitime que l'autre bateau vient renversé les sauces du dîner qu'on s'active déjà à préparer en cuisine. Et les gens font semblant de ne pas l'entendre!! Quand l'aiguille des secondes finit de faire la ronde de notre minute de silence, c'est un tonnerre d'applaudissements qui vient rompre le ronronnement lointain. Ouf, on l'a échappé belle!!! On a failli pendre le capitaine haut et court!!!

 Au lieu de cela, on va juste lui dire au revoir cordialement. La boucle est finalement bouclée. Que ce soit pour le Sound ou même pour la Nouvelle-Zélande.

Le lendemain, j'ai un billet d'avion dont je sais qu'il décolle l'après-midi pour Auckland. Le temps de revenir à Queenstown, d'y dormir et en route vers la capitale.

A Te Anau, je suis à 4 heures de route de Queenstown. Je pourrais prendre un bus mais deux de mes rencontres, des américains déchainés, font le même chemin dans la voiture achetée en quinzième main quelques semaines plus tôt en Australie.
De la musique, des rires en perspective, avec eux au moins, c'est garanti, je vais économiser une sieste!  

On est prêt ensemble. Les sacs viennent remplir le coffre.
A 13h, on est parti. Mais une heure plus tard, nous sommes arrêtés dans notre élan. La voiture émet un bruit inhabituel qui nous oblige à nous arrêter faire un constat sur le quoi du comment qui s'avère être une crevaison. Une damnée crevaison à dix bornes du dernier village traversé et à plus de vingt du suivant!! On est contraint à l'arrêt au milieu de rien sur une route qui n'a rien du périphérique au niveau du traffic même à cinq heures du matin. Seulement on doit bien avoir une roue de secours, c'est généralement comme ça que ça se passe...
Dans le bloc moteur rien. Dans le coffre rien. On s'inquiète. L'un des deux américains regarde alors sous la voiture, endroit évident pour cacher une roue, et elle est là. On hisse la voiture et extrait le pneu neuf ou en tout cas intact. Car vous croyez que la roue de secours puisse être neuve???? Même joueur joue encore! Le pneu sensé nous sortir de la mélasse est éventré sur cinq centimètres. Triste constat et pourriture le type qui vend une voiture à deux p'tits jeunes en sachant que la roue de secours est morte et inréanimable quand les quatres autres fers sont lisses comme ma peau de bébé.

On est donc comme des abrutis le long de cette route sans vie. Toutes les cinq minutes, une nouvelle voiture refuse de s'arrêter.
Vient alors notre bol car c'est toujours dans des "happy ends" que ça se passe. Un camion arrive à notre hauteur, nous dépasse et pile quelques longueurs plus loin. Il reprend son chemin jusqu'à entamer un demi-tour et revenir vers nous et notre carcasse sans vie. Le conducteur est garagiste et achève les dernières vérifications d'usage sur ce trente tonnes qu'il finit de réparer. Il accepte de prendre l'un d'entre nous à bord et de le convoyer au bled changer le pneu puis de le ramener vers nous, pauvres malheureux restant qui n'avons qu'un frisbee et une route déserte comme terrain de jeu!!
La blague!! Au milieu de nulle part, on est chez nous!!! La musique donne la cadence de nos échanges jusqu'au retour de l'envoyé spécial.

En deux coups de crique, tout rentre dans l'ordre. On atteint Queenstown pas mécontent en fin d'après-midi. Je me réinstalle, cette fois avec mes potes, dans ma GH calme de bord de lac. Un petit tour au supermarché pour acheter tout et n'importe quoi pour peu qu'on ait pas besoin de le cuisiner et on s'installe dans l'espace commun.
Dans la GH, il y eu un avant et un après.
Avant calme, apaisé. Après, beaucoup moins.
Jusqu'à près de trois heures, ça boit, ça chahute, ça parle fort. On ne fait pas exprès, c'est encore la foule qui nous entraine dans cette étrange farandole...

Quand j'échoue dans mon dortoir, mon sac est prêt, je suis une catapulte chargée.
Au réveil, à 11h, plus grosse performance encore que les 5h15 du lever de soleil, je vérifie consciencieusement mes horaires de vol pour, au final, me prendre une énorme claque. Le vol est bien aujourd'hui mais il est déjà parti!!! A 10h du matin!!!! Réveil Mc Fly!!! Crotte de bique!!
J'allume l'ordinateur et m'acquitte d'un nouveau billet d'avion pour le lendemain. Deuxième tournée de pognon!! Bien géré Braïce!!!

Mes accolytes se réveillent à leur tour eux aussi prêts à partir. Mais pas de soucis horaires pour eux, tant que la voiture veut bien rouler...
Je me retrouve donc à Queenstown pour une ultime journée à ne pas faire grand chose. J'attends avec impatience le vol après lequel j'envisage de me faire tatouer un tournesol sur l'épaule, au point d'avoir fait sur internet le tour des tatoueurs d'Auckland.
   
Et cette fois-ci, je ne le rate pas...
J'arrive à Auckland le samedi après-midi et je ne suis pas en avance, en partance pour les USA des States le mardi suivant.
Sitôt un nouveau dortoir réquisitionné, je marche tellement vite dans la ville qu'on pourrait croire que je courres. Le salon va bientôt fermé pour le weekend, que je saches au moins ce qui est possible pour un rendez-vous ultérieur. J'y arrive à la limite du raisonnable alors que le gars encore présent s'attendait déjà à gouter aux joies des congés hebdomadaires. Je présente mon projet et donne ma plage de temps disponibles. Le couperet tombe. Pas de date disponible pour moi. Caramba! Encore raté!

Ne me reste donc qu'à attendre le mardi.

Ce soir, c'est Christmas in The Park à Auckland. Toujours sponsorisé par le célèbre soda rouge et blanc j'imagine. Cette fois-ci, je passe.


La Nouvelle-Zélande s'achève donc un peu en eau  de feu dans de nouvelles rencontres.
Demain, c'est le Pacifique que je laisse derrière. La liste s'allonge. Demain, on a plus qu'un océan d'écart!!!


  


 
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27 janvier 2010 3 27 /01 /janvier /2010 11:55
Fais pas ci, fais pas ça.
Lève-toi donc de bonne heure, ça te fera pas d'mal.
Mange équilibré et puis brosse toi les dents.
Mets une petite laine, tu vas attraper froid.
Remets-toi à l'écriture, espèce de gros feignant.


Bon, d'accord... Essayons. A reculons mais essayons.

J'arrive à Queenstown. C'est en théorie ma dernière base avancée dans le sud reculé. Sur la carte, au sud de la ville, les autres options tiennent plus de repères à moutons que de lieux d'habitation humaine. Tenons-nous en à ça.

La ville, car c'en est une, est renommée mondialement. Ici, tout est possible ou presque pour peu qu'on veuille s'envoyer en l'air. Le saut à l'élastique autrement que sous la forme d'un rituel papou où on s'accroche une liane aux chevilles a été inventé ici. Ca vous plante le décor. Certains l'appellent un paradis pour touristes, moi j'hésite encore. Chaque enseigne ou presque y est dédiée; on ne compte plus les agences de voyages, les restaurants en passant par les magasins de souvenirs. La ville manque singulièrement d'authenticité malgré le décor dantesque au milieu duquel elle est plantée, en bordure d'un lac magnifiquement ourlé de montagnes dont les sommets sont encore tapissés de blanc neigeux. Le problème aussi, pour peu que c'en soit un, est qu'une échoppe sur deux est un tripot ou une enseigne vendant exclusivement des bouteilles d'alcool, que l'énorme majorité des passants en sac à dos a une vingtaine d'année ou moins, que c'est une beuverie à ciel ouvert où chacun hurle à qui veut l'entendre ses effusions d'adrénaline du jour. En gros, c'est la foire et rare sont les recoins où on peut échapper à la vague de foutre et d'hormones dans laquelle je peux me fondre à l'occasion mais qui ici tient plus du pugilat pour adolescents décérébrés que des après-midi "thé dansant" de Jacques Martin.

Par exemple, le second soir sur place, je me pose tranquillement à une table posée entre la cuisine de la GH et les baies vitrées donnant sur le lac, mon ordinateur devant les yeux prêt à te pondre une symphonie de lettres. Cinq minutes plus tard, un groupe de sept personnes arrive avec des pacs de bières, des bouteilles de vodka et autres, de quoi se substenter si la fin du monde est pour demain, avec encore la possibilité d'inviter toute une caserne tant le stock respire les grands espaces. De mon côté, je me fais tout petit et attends l'apaisement ne pouvant décemment pas être à ce que je fais dans cette ambiance de corrida. Puis, comme l'apaisement n'est d'évidence pas dans le vocabulaire local qui décline le mot "brailler" et l'expression "à tue-tête" à l'infini, je boucle mes petites affaires pour installer mes neurones littéraires ailleurs. Seulement, en tentant de quitter la place, je me fais remarquer des sonneurs qui m'invitent aussi sec à m'imbibiber à leur compte. Comment veux-tu que je me recentre sur mon Ying pendant que mon Yang danse la valska, la valse de la vodka? D'autant que je ne suis pas de là, les verres se déversent comme les seaux dans l'Apprenti Sorcier, l'heure tourne et dès le tout petit, minuscule matin, j'entame ma phase active si tant est que boire des coups à la dure avec des vikings australiens équivaut à se la couler douce.

En effet, au matin de mon troisième jour, je me lance dans une opération "quatre fers en l'air", à la découverte du deltaplane. Le rendez-vous est à 8h, je fais partie et j'en ai fais le choix de la première escadrille. Voilà pourquoi je ne suis pas mécontent quand, alors que je suis encore atablé avec l'équipe des gosiers en chaleur, le veilleur de nuit intervient suite à la plainte de tous ceux qui dorment dans un rayon de 2km. On se fait virer purement et simplement. Plus besoin d'avoir à s'excuser de quitter son verre, le bon sens veut qu'on ne discute pas avec un maori de plus de 100kg. L'écriture est donc passée au second plan, momentanément recalé à l'autel de la soif sans soif.

Durement touché par la bouteille et un coucher qui tangue, je suis le dernier à rejoindre le minivan conduisant les voltigeurs sur les contreforts d'une montagne dominant Queenstown; le deltaplane c'est comme le parapente, si tu décolles du niveau de la mer, tu n'as que peu de chances d'en découdre avec les aigles.
En plus de ma petite personne, une famille de coréens attend d'en découdre avec Eole. Ils sont quatre, les parents plus deux filles d'une quinzaine d'années. Parmi eux, tous trépignent sauf le père qui, sauf retournement de situation, joue le role du photographe sans envol.
Le minibus arrêté, tout le monde descend. Les touristes profitent de la vue, les moniteurs montent les voiles.
Puis, un ordre de passage s'instaure. Les filles décollent en premier. Ce sera ensuite au tour de la mère et moi, sur deux deltaplanes différents, il va sans dire... J'ai donc tout le temps de profiter de l'endroit ainsi que du breefing auquel ont droit les futures hirondelles. Celui-ci fini, elles décollent l'une après l'autre, se lançant gaiement dans une pente dans laquelle il ne ferait pas bon se prendre les pieds dans le tapis à l'heure du grand voyage. D'ailleurs, au moment où c'est à moi qu'on fait le discours introductif, je pose la question :

- Qu'est ce qui se passe si la phase de décollage ne se déroule pas comme il faut et qu'on ait besoin de remonter?

Réponse laconique :

- Il faut qu'on décolle, il n'y a pas de plan B.

Soit.
On m'équipe alors d'une combinaison spatiale ou presque, d'un casque et mon guide m'appelle. C'est l'heure. Lui et moi sommes alors tous deux attachés aux montants portant la voile, le vol est en tandem, sécurité avant tout!!
Portant l'ensemble, on se dirige alors vers la pente. Dernières recommandations d'usage avant l'ultime compte à rebours. 3, 2, 1, chargez!!!!!

En moins de cinq pas, le plancher des moutons n'est plus qu'un lointain souvenir pour la plante des pieds et celui-ci s'éloigne à vitesse grand V à mesure que l'on s'éloigne pour rejoindre la vallée.

Mon premier sentiment, comment peut-il en être autrement, est WHAOUUUUU!!!! Le corps complètement à l'horizontale, je vole!! De temps à autre le pilote effectue quelques virages, l'horizon penche, je gazouille.
Puis, comme si on était à la terrasse d'un café, on entame une conversation où il m'explique les rudiments de son art, la principale différence avec une conversation typique à un comptoir est que je suis tenu de m'accorcher à lui en permanence afin de ne rien faire qui risquerait d'être stupide à cent mètres au dessus du sol comme de laisser tomber mon appareil photo en tournant une vidéo par exemple.
La vallée défile, le terrain d'atterrissage se rapproche. Dix minutes qu'on est parti. Vient alors le contre-coup.
J'ai beau avoir rêvé ce moment depuis de longues années, c'est con à dire et je m'en excuse presque, je m'ennuie. Et oui... C'est que le vol en lui même est plutôt monocorde. La sensation de danger est imperceptible, autant que les sensations. Passé le moment où on s'extirpe de la gravité, c'est le calme plat et rien ne vient le troubler. En comparaison, la montée d'adrénaline est bien plus forte lorsque on se tient debout le long d'une falaise abrupte du haut de laquelle tout coup de vent inopportun équivaudrait à une l'organisation d'une cérémonie où tous les invités seraient vêtus de noir, des chrysantèmes pleins les mains. Or, arnaché sous ma voile, j'en suis presque à compter les moutons, si j'ose dire. Rien ne peut nous arriver. Le pilote n'a aucune volonté de nous faire faire des loopings synonymes à ce point d'en avoir pour son argent. Moi, j'en manque. De loopings of course

Même à l'atterrissage, c'est comme si on se posait sur de la soie. Pas de secousses, pas de "attention!!! Ca va se jouer à un fil!!!". Comme dans un airbus, à l'arrêt complet de l'appareil, vous pouvez détacher votre ceinture et profiter du temps qui vous reste pour aller au boutiques en duty free. Même pas décoiffé, je rejoints alors les petites coréennes qui elles ont l'impression légitime d'avoir vécu une telle aventure qu'elle arrive finalement à convaincre leur père réticent de la vivre aussi.
On passe alors une grosse heure à attendre que ce dernier finisse de mouiller ses sous-vêtements. Quand il en termine, chacun d'entre eux achète le DVD exclusif de son vol. Pour ma part, il en faudrait plus, bien plus, à suivre...


Toujours désireux d'en faire le plus possible, dès le retour en centre-ville, je repasse par le centre d'informations touristiques depuis lequel on peut réserver toute la liste des activités disponibles dans les environs. J'égraine alors tout l'éventail porté par l'envie chronique d'expérimenter l'inconnu.
Mon choix se porte alors sur une fusée aquatique qui porte le doux nom de jetboat. C'est une embarcation dans laquelle on peut entasser jusqu'à une quinzaine de personnes et qui file à des vitesses supersoniques sur une eau qui peut ne pas excéder trois centimètres de profondeur. Mais ce n'est pas tout. Le Jetboat c'est bien, mais si on peut y rajouter un forfait sur une journée complète qui inclut aussi deux à trois heures en kayak gonflable dans un parc national, c'est évidemment mieux. Je réserve.

De retour dans mon dortoir, il n'est encore que 11h30 du matin et mes colocataires dorment encore... Pour un peu, je pourrais dire les veinards mais comme moi, en ce jour de plein soleil, j'ai déjà volé de mes presques propres ailes, je m'en garde bien! C'est qui le veinard ici finalement??
Quand j'ouvre la porte, ça les réveille. Comme j'ai beau avoir volé mais n'ai rien encore avalé, on partage un petit dèj' qui pour ma part faite de feignantise n'est constitué que de tartines au Nutella et c'est déjà bien! Puis, les vitamines se répendant allègrements dans nos physiques de conquistadores, on part se faire une gentille promenade autour du lac. Pas tout le tour puisque ça équivaudrait à plusieurs dizaines de kilomètres mais le coeur y est, c'est déjà ca! A la place, dès qu'on a trouvé un joli carré de gazon fraichement coupé au bord de l'eau, les autres ont voulu s'y arrêter, et comme on était alors toujours qu'en centre-ville, il ne s'est pas passé longtemps avant que l'un d'entre eux se propose de s'occuper du réassort du stock de bière. Allons bon!
C'est comme ça que toute l'après-midi, on a finalement marché environ 500 mètres avant de ne se bouger les fesses que pour passer à l'ombre quand le soleil tapait trop fort, et inversement quand celui-ci venait à nous manquer.
Quand je vous disais que Queenstown était une destination thermale sans eau...

Revenons-en alors à l'essentiel : la découverte d'autre chose que la descente en bouteille autrement qu'en plongée sous marine.
Le calendrier affiche lundi, ou bien jeudi, c'est le jour du jetboat!
Comme d'habitude, c'est en couple avec le soleil que j'émerge. A l'extérieur, les oiseaux chantent, c'est bon signe. Comme la veille, je rejoins un point de rendez-vous au centre-ville avant qu'une navette nous convoit, moi et la vingtaine d'autres aspirants à avoir du vent dans les cheveux à s'en faire s'envoler les permanentes, jusqu'à un petit village d'où le périple commence.
Là encore, on nous affuble de l'équipement règlementaire, à savoir entre autre un gilet de sauvetage et un casque, une première pour une "croisière" en bateau qui va de paire avec la recommandation : ne pas laisser traîner les bras à l'extérieur au risque de le perdre!
Le contact est enclenché. L'impression de puissance est immédiate. On développe autant qu'un moteur ferry monté sur un zodiac! Les fans de tuning (sic) apprécieront. Vient le moment de la première accélération. J'ai le dos littéralement plaqué à mon siège comme au décollage d'un avion. On a beau remonter la rivière, ses rives défilent comme sur une autoroute, à la différence près que nous sommes au milieu de la nature intacte et protégée, sur un cours d'eau dont la pureté est cristaline entouré de montagnes remarcables. A chaque moment, on peut apprécier la profondeur et se rendre compte qu'en de nombreux endroits, on aurait de l'eau pas plus haut qu'aux chevilles. C'est grisant et certainement un brin effrayant d'avoir à anticiper une pierre qui nous enverrait valser dans le décor mais comme elle ne vient pas...
Parfois, on tutoie les rochers sur le bord, mais pas plus, d'où l'importance de garder ses bras entre ses épaules!

Autrement, le grand truc du pilote, c'est de faire des 360° lancé à pleine vitesse. La première fois, ça surprend en plus du fait que ça mouille, puis ça enivre à tel point qu'à chaque fois qu'on repart pour un tour, tous les passagers lèvent les bras et poussent de grands "Ooohhh" comme dans des montagnes russes.

Après une heure de ce manège, je ne suis toutefois pas mécontent quand le moteur s'arrête. Le silence est d'or, le paysage de platine, la banane de moi sachant qu'on ne s'arrête pas en si bon chemin. La Nouvelle-Zélande faisant admirablement bien les choses, des kayaks ont été convoyés jusqu'à l'endroit où la ballade sprintée s'achève. On peut alors troquer nos casques contre des pagaies.
Nos nouvelles embarcations d'un brillant rouge "camouflage" se manoeuvrant par deux, des couples se forment. Etant tout seul, je fais équipe avec une des accompagnatrices : Caroline (prononcez Carola-ï-ne). Elle est la joie de vivre sur pattes et, à nous deux, on forme vite un tandem de première catégorie. Pendant toute la descente (NDLR : T'as quand même pas cru qu'on allait ramer à contre-courant?!?), nos rires couvrent les ralements de toutes les autres embarcations de néophytes, jusqu'au moment où, on l'avait vu venir, un couple de canadiens se retourne et goute aux joies de la baignade dans les eaux glaciales issues de la fonte des glaces quelques kilomètres en amont. Ils se débattent, crient, s'engueulent presque au grand jeu du "à gauche, je t'avais dit de te pencher à gauche" ou encore "même ta mère aurait fait mieux". Délicieux...
En tout cas, une fois les pieds nickelés remontés à bord, c'est de plus belle qu'on repart dans des fous-rires. Merci les baleines d'eau douce!! On rame de plus belle. Et comme ces maigres efforts ont le don de creuser l'appétit, c'est sur une petite crique qu'un déjeuner s'organise dont la liste des mets est richement dotée à tel point qu'un plateau de fromage de chèvre est avancé. J'ai l'impression d'halluciner. A 20.000km de la France, du fromage de chèvre!!! Avec de la baguette!!! Ils sont trop forts ces kiwis!!! C'est donc à une orgie de bouffe à laquelle on a droit avant de boucler la boucle pendant suffisamment longtemps quand même pour que des anglais du groupe aient le temps de choper, et c'est véridique, des coups de soleil à la limite de la friture sur peau.

Au retour au minivan, tout le monde est à juste titre claqué de cette journée comme on devrait tous en avoir de temps en temps. Pas tous les jours quand même, ce serait du vice! C'est qu'en plus d'avoir vécu au moins deux vies de plus en cette seule journée, mon appétit s'est également retrouvé rassasié en apprenant sur le chemin du retour que de nombreuses scènes du Ô combien magique Lord of the Rings furent tournées sur place. Et c'est vrai, en y repensant, Je n'ai pas vu Saroumane même si Isengard, entre autres, était bien là!!!

De retour en ville, comme un miroir de mon retour de la veille, je retourne au centre d'informations. Seulement, cette fois-ci, plus rien d'autre n'a d'importance que de m'en mettre plein la tête au niveau des frissons. Queenstown est la "capitale" des sports extrèmes et pour l'instant, malgré mes tentatives, ça reste encore à prouver. Mais, j'ai encore l'embarras du choix, et peux encore sauver l'honneur.
Je pourrais bien me lancer dans un ou plusieurs sauts à l'élastique, spécialité locale, mais tout porte à croire que rien en sera aussi grand qu'au Népal (Je vous renvoie à l'article sur le Lost Resort).
Je pourrais également me jeter d'un avion avec, en plus d'un moniteur dans le dos, un parachute pour quelques secondes de chute libre. Mais non. Déjà fait et en solo (Je vous renvoie à l'article sur l'an 2000).
Il me faut dénicher quelque chose qui conjugue le spectaculaire et l'inédit, le flamboyant et l'insolite, le mouillage de sous-vêtement et la nausée.
C'est alors qu'au milieu des brochures, j'identifie la perle rare. De la voltige aérienne, ça s'appelle Jag Air et en gros caractères il est écrit "TEST YOURS LIMITS"!!!!
Quelqu'un connait-il un autre endroit dans le monde où il (n')est (pas) donné de grimper à bord d'un biplan dans le simple mais hasardeux but de s'en mettre plein la tête, et je pèse mes mots? Moi, je n'en connais pas, alors je me lance. Plusieurs alternatives s'offrent alors. Pas question de sélectionner le vol en mode pépère, mon option choisie s'appelle "adrenalyne +" qui garantit un vol de 20 minutes à faire la toupie. Plus, ce n'est pas pas possible!!
Le temps de faire chauffer la carte bleue, je rentre à ma GH alors que la nuit est sur le point de griller la priorité au jour, ravi des dernières douzes heures mais également existé comme un diable de Tasmanie dans l'attente du lendemain.

Dans la chambrée, c'est le tripot. Alors qu'on ne dispose que de quatre lits, ils sont huit à l'intérieur à avoir déjà entamé les hostilités nocturnes!! Demain, c'est décidé, je change d'adresse, mais en attendant, je vais moi aussi acheter quelques canettes afin de me mêler aux débauchés dans la joie et dans la bonne humeur et ce, jusqu'à 1h passée quand le cracoucasse-couille personnifié, le veilleur de nuit, vient mettre un terme une bonne fois pour toute à cette folle barbarie communicative.


Quand je ressucite le lendemain matin, c'est comme si l'hymne de la League des champions résonnait sur la planète. Je n'ai pas eu un trac comme ça depuis bien longtemps et il faut que je me force pour avaler mes deux tartines au Nutella quotidienne, histoire d'avoir quelque chose dans le bide. Comme je l'avais prévu la veille, j'ai bien fait de ne pas initier les hostilités au petit matin mais à 11h, ce qui n 'est pas pour me déplaire...
Comme une douce routine, je rallie une nouvelle fois le centre-ville, toujours pas trop vaillant, comme lorsqu'on se présente à un examen, le trac carillonnant de plus belle. Le chauffeur qui se trouve être aussi le pilote m'attend déjà acompagné d'une jeune américaine qui est, elle aussi, candidate au renvoi.
Je suis d'abord surpris par l'age du bonhomme. A première vue, il attend encore que la barbe ne lui pousse, ce qui n'est pas pour me rassurer. Cela dit, quelques minutes plus tard, il finit de nous exposer son parcours d'apprentissage et professionnel qui l'ont conduits à envoyer les gens en l'air depuis plusieurs années déjà et ce, jusqu'à huit fois par jour en haute saison!!! Pour un peu, et pour ceux qui connaissent, ça donne un peu l'impression de se faire opérer du coeur par Docteur Doogie! 

En arrivant à l'aérodrome, on passe illico dans le bureau où on nous demande, à l'américaine et à moi, de signer une décharge. Ambiance...
Puis, un ordre de passage s'établit. La p'tite ricaine ayant opté pour la formule adrénalyne sans le "+" correspondant à un vol de dix minutes se voit assigner la pole position. Qu'elle la prenne!!! Ca me laisse au moins le temps d'enchaîner deux clopes comme deux dernières volontés!!!
Elle part avec le pilote, je les regarde décoller et patiente. En effet, impossible d'en voir plus, le terrain de jeu n'est malheureusement pas au dessus de la piste!
Après un quart d'heure, le fier aéroplane à hélice touche de nouveau terre, on m'enjoins d'aller le regagner. C'est mon heure.
Au moment où je le rejoins, la bulle s'ouvre et le pilote s'extirpe. Il est frais comme un gardon.
L'américaine devrait alors faire de même mais la pauvre est toute palote et ne comprend pas trop ce qui vient de lui tomber dessus. Elle ne sais plus distinguer le nord du sud, le haut du bas, comme si on lui avait mis littéralement la tête dans le derrière! Cinq minutes qu'il lui faut pour enfin pouvoir se lever! Et encore, ses premiers pas tiennent plus des premiers pas de bébé que du gymnaste olympique au sol. La pauvre titube comme un néo-zélandais moyen un samedi soir tard avant de prendre ma place sur la terrasse qui surplombe la piste. Voilà de quoi me mettre dans les meilleures dispositions!

Ca y est! Je suis seul avec Tanguy ou Laverdure. Le briefing est minimaliste. La seule chose dont je doives me souvenir est : comment réagir en vol?
En effet, je suis parti pour 20 minutes de shaker dont on m'annonce d'amblée qu'elles se sont muées en 25 minutes. 5 minutes de rab? Ah bon? Chouette ou bien?
Durant ces maintenant 25 minutes, le pilote (appelons le Paulo) va étaler tout le panel de ce qu'il est physiquement capable de faire subir à l'avion.
Si j'en veux encore et encore, il faut que je montre mes deux pouces levés.
Si ça va bien comme ça et qu'un ralentissement serait le bienvenu, il faut que je mettes mes mains à l'horizontal.
Si là vraiment c'est trop, que rien ne va plus, qu'il faut s'arrêter sur une aire de repos, alors, je lui indique mon éventuelle condition précaire par mes deux pouces baissés comme dans les mises à mort aux jeux du cirque.
Dans chaque cas de figure, Paulo voit ce que je lui signale et adapte la marche à suivre en fonction des circonstances. Car lui est en position de me voir. En effet, l'avion ne possède que deux sièges, l'un derrière l'autre, que je suis en première ligne avec Paulo dans le dos. Rien d'autre dans le champ de vision que le moteur vrombissant, vive la vue de folie sachant qu'en plus, la bulle qui nous entoure est en plexiglass, n'entravant en rien la visibilité. Comme dans la chanson ou presque, il y a le ciel, le soleil et la terre. Et pas de parachute!!!
Ca peut sembler con comme ça mais je passe de longues secondes à le chercher des mains sous mon siège jusqu'à ce que Paulo me fasse assimiler qu'on en est pas pourvu. Tant pis, ça valait le coup de se poser la question. La décharge à signer prend tout son sens...

Ne reste plus qu'à bien m'attacher avec des sangles qui m'enserrent dans tous les sens afin d'éviter que j'embrasse des dents d'une façon ou d'une autre la bulle qui me domine ou les cadrans que j'ai en face de moi. Mon casque pourvu d'un micro avec lequel je peux dialoguer avec Paulo est aussi en place. L'hélice entame son ballet centrifugé, le zinc se met en mouvement. Dans les oreilles, j'entends la tour de contrôle qui nous donne le feu vert. Dans la minute, on ne touche plus terre, dans la famille quintescence, je voudrais...

Le vol débute calmement, tout en contemplation. Durant toute la phase de montée, on longe les Remarcables, la barrière montagneuse qui fait face à Queenstown. Le cap est mis sur le lac Wakatipu, sans doute plus un terrain plus sûr pour les riverains si un problème majeur venait à survenir mais pas plus sûr pour nous sachant qu'on dispose d'autant de parachutes que de gilets de sauvetage!
Une fois au dessus de l'eau, on a pris suffisamment d'altitude pour dominer les montagnes et tout le reste même mon appréhension, la vue est à couper le souffle sauf que de petites trappes de part et d'autre m'apportent des bouffées d'air frais bienvenues, Paulo me demande s'il a le feu vert, je lève les pouces au dessus de ma tête, il me tarde de voir le monde à l'envers, le ballet commence. A 300km/h.

Une vrille puis une autre. Les pouces se dressent. C'est le plus incroyable des grands huits! J'exulte!!!
Vient alors le premier looping, la force centrifuge m'écrase entièrement. Je suis tassé sur mon siège comme si j'avais 100kg sur le dos. Dans mon casque, Paulo m'avise gentiment qu'on est lui et moi en train de prendre en cinq et six G. Si tu n'es pas familié avec le terme, tu seras content d'apprendre que dans la manoeuvre, mon poids mouche passe de 62kg à plus de 300!!!! D'ailleurs, j'essaye de lui montrer mes pouces dressés mais il faut que je me reprennes à deux fois pour réussir à soulever le poids de mes bras fluets. Tout arrive!!!
Dans mon champ de vision, la terre s'efface, je ne fais qu'un avec le ciel azur, jusqu'à ce que la terre refasse son apparition par le haut et qu'on se jète la tête la première dans un piqué diabolique. Puis, on retrouve l'horizontale le temps de brèves secondes, le temps que j'hurle à Paulo qu'il a carte blanche!!!! Encore!! Encore!!!!!! Rhaaa Lovely!!!!!

Les figures s'enchainent. Parfois, ça file tellement vite et tellement n'importe comment que je n'arrive même pas à m'expliquer ce qu'il advient de moi. Ca pivote, ça tourne, ça enchaine avec une fluidité et une précision incroyable.
Je ne m'en lasse pas. J'ai beau sentir que je commence à transpirer comme une vache et à transformer mon T-shirt en éponge, je ne m'en lasse pas. J'ai beau avoir de plus en plus de mal à sentir des jambes et le bout de mes doigts, je ne m'en lasse pas. J'ai beau avoir parfois et durant quelques secondes un vol noir devant les yeux, je ne m'en lasse pas. Après chaque acrobatie, mes pouces s'aligne de chaque côté de ma tête qui est balafrée d'un immense sourire ponctué d'onomatopée à base de voyelles. Toutes y passent, du Aaaaahhhhhh au Ooooohhhhh en passant par le Uuuuhhhhh!!!!

Ce n'est qu'au bout d'une vingtaine de minutes que je commence à avoir le souffle court. L'air frais a beau venir en prise directe depuis les étoiles, je me prends à une reprise de mettre mes mains à l'horizontale, ce qui me permet également d'essuyer mes lunettes de soleil qui se couvrent de buée, signifiant bien que je suis une énorme marmitte bien échaudée!

Puis, quand même, comme le temps presse, Paulo me demande si on est parti pour un nouvel enchainement. Allons bon!!! Lache les chevaux mon Paulo!!!! C'est pas tous les jours que je suis un feu d'artifice à moi tout seul!!!!! Le Pitts Special donne alors tout ce qu'il a dans le ventre, je ne vais pas tarder à l'imiter.

C'est l'heure de rentrer à la base. Les 25 minutes touchent à leur fin. Le vol reprend alors une trajectoire parfaitement rectiligne pas exactement en adéquation avec les trajectoires sinusoïdales auxquelles mes tartines de nutella ont été contraintes. J'en fais part à Paulo qui en rigolant m'indique la présence d'un petit sac prévu à cet effet juste à côté de mes jambes. Dans la seconde, je m'en saisis. Dans la seconde, je le remplis. Complètement à bout de souffle, poussé dans mes derniers retranchements, je m'acquitte de ma petite galette qui, une fois livrée, a au moins le mérite de me faire aller mieux.  

Au moment de retrouver la terre ferme, j'arose les oreilles de Paulo de tous les superlatifs qui me passent par la tête.
Malgré mon état un poil branlant, je tiens une forme de tous les diables. Si c'était à refaire, j'attendrais quelques secondes afin de me remettre, mais les yeux fermées je la signe le décharge, et on repart!!!
A notre emplacement final, j'ai moi aussi besoin de quelques temps avant de pouvoir m'extirper du cockpit. Une fois fait, je saute dans tous les sens en criant ma joie faîte ce beau matin de démesure. WHAOUUUUUUU!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! Puis vient le moment de dire au revoir à la machine encore brulante. Je retrouve l'américaine qui a repris des couleurs dans le bureau du début pour le débriefing. Elle comme moi n'en pouvons plus mais pour d'excellentes raisons. Paulo me félicite d'avoir tenu le rythme tout le long du vol ce qui, à ses dires, n'est pas si  fréquent. Puis il dévoile le pot aux roses (poteau rose??), à savoir qu'il y avait une micro caméra braquée sur nous tout le temps du vol et qu'un DVD est disponible.
J'ai toujours rechigné à me porter acquéreur de ce genre de bonus mais cette fois-ci l'occasion est trop belle. Il ne s'agit pas d'un saut à l'élastique de 5 secondes, d'une chute libre de 30, ou d'un vol monocorde en deltaplane de 10 minutes. Cette fois-ci, c'est du lourd et la bande son a beau être agrémentée d'un morceau de Bon Jovi, c'est même pas grave; c'est dire!!
La ricaine comme moi, on repart avec notre souvenir dans la musette.

Au retour en ville, au moment de saluer Paulo une dernière fois, je m'agenouille platement en déclamant des "on est pas digne, on est pas digne". Le gars est un as et partager sa passion un privilège.

Cette fois-ci, Queenstown a tenu toutes ses promesses. Je ne repasse pas par le centre d'informations. De toutes façons, je suis rincé au point de ne même plus vouloir changer d'hotel. Les retrouvailles avec mon lit se font durables et se scèlent dans une sieste qui durera toute la journée, toute la soirée à l'exception d'un dîner sur le pouce, toute la nuit.
24 heures pour m'en remettre, quand je pense que Paulo peut faire ça jusqu'à huit fois par jour!!


Mon temps en Nouvelle-Zélande touche presque à sa fin.
Au matin du jour nouveau, mauvaise nouvelle, les nuages ont de nouveau remplacé l'azur. Pour bien faire les choses, il faut encore que j'aille me faire une petite excursion dans les Sounds qui ne sont rien de moins que des fjords du sud-ouest du pays. Cela dit, avec le temps qui me reste, tant que je ne verrais pas une étoile, je resterais à Queenstown en attente.
D'abord, changer d'hotel et le reste suivra.
Carpe Diem.


PS : Il s'en est fallu du temps, de la sueur et des larmes de mon côté et de la patience du tien avant que je viennes à bout de ce bref (?!?) article. Mais ta patience n'est pas vaine, tu trouveras en bonus toutes les photos de cette épisode de légende ainsi que toutes celles que je n'avais pas pû mettre en ligne jusque là, ce qui comprend notamment Franz Joseph Glacier dont tu me dira des nouvelles quand tu l'auras vu!!
(Pour bien faire, je peux même te dire que les nouvelles photos sont visibles à partir de la page 10 de l'album Nouvelle-Zélande)
Elle est pas belle la vie?
Si, en tout cas une fois la rédaction terminée (surtout à 4h52 du matin), elle l'est!!!

Enormes bises
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18 janvier 2010 1 18 /01 /janvier /2010 03:32
Je bouge, au r'voir,
J'oublierais ma peur,
J'irais plus haut que ces montagnes de couleurs,
Je bouge, au r'voir!!!!


Le conducteur du train fait retentir un sifflet strident résonnant à des kilomètres à la ronde.
Les pistons entament leur manège.
Les roues tournoyent jusqu'à ce qu'on ne parviennent plus à les distinguer.
Le vent cogne contre les fenêtres.
Nous fuyons l'océan pacifique, bientôt plus qu'on point à l'horizon, à une vitesse approchant les cinquantes millions de millimètres à l'heure!!!

Si tu n'es pas trop désorienté par ces chiffres hallllllllucinants, tu te rendras vite compte qu'on est pas à Mach 5, que le TGV n'a pas de soucis à se faire question concurrence, qu'on roule gentiment à 50km/h à travers la plaine. La tortillard qui me transporte n'a aucune véléité quant à battre des records si ce n'est en terme de paysages. C'est qu'en quelques heures de rails, le Tranz Alpine Crossing passe de l'Océan à la mer, de la côte est à son pendant à l'ouest, en traversant entre temps la barrière que constitue les Alpes néo-zélandaises culminant à trois mille mètres d'altitude. Sacrée odyssée et sacré tour de force pour ce train à la vocation avant tout touristique à tel point que de nombreux locaux en font l'aller et le retour en famille dans la même journée simplement pour s'aérer et profiter d'un peu de ciel bleu. C'est d'ailleurs aujourd'hui le cas. Le soleil brille de mille feu et c'est pas dommage. J'avais rencontré un peu plus tôt d'autres voyageurs qui avaient tentés l'expérience un jour de grisaille, et bien sur leurs maigres photos, on ne peut même pas voir l'avant du train quand celles-ci sont prises du premier wagon!!

Le départ du train a beau avoir lieu autour de 7h, rien n'invite au snooze time.
Tous les quarts d'heure, une nouvelle carte postale vient s'ajouter à la précédente. Qui plus est, aucune habitation de vient entraver la vue, tout est vierge d'influence humaine, tout fleure bon la nature brute de pomme sans les pommes. Seules trois pauvres gares viennent rompre la symphonie ferrovière sans que personne ne monte ou ne descende. Les arrêts sont donc plus symboliques qu'autre chose.
Je passe la première heure bien sagement assis à la place qui m'a été attribué puis les fourmis s'en mèlent. C'est une métaphore, on est pas au bled ou dans la forêt. Ne tenant plus en place sur mon siège, j'investis alors le bout de mon wagon qui a l'excellente idée d'être à ciel ouvert permettant de s'administrer une dose de vent dans les cheveux ou ce qu'il en reste, ne quittant mon belvédère roulant que pour enfiler les couches supplémentaires, le froid gagnant avec l'altitude. On est pas sous les tropiques et les montagnes saupoudrées de neige sont là pour nous le rappeler. Plus on monte et plus j'ai une goutte permanente au bout du nez qui, inversement, achève de s'estomper à mesure que l'on redescent de l'autre côté des cîmes. Là, le temps a beau ne pas revenir en arrière, tout s'inverse. La grenouille baromètre dégèle dans son bocal, les couches s'enlèvent successivement, le vent se réchauffe, le mercure repasse les 15°. Et puis c'est la mer.

La gare d'arrivée est encore une erzatz de terminal. Le village dans lequel on échoue, et dont je ne me souviens déjà plus du nom eu égard à son importance toute relative sur l'échéquier diplomatique mondial, n'est également qu'un point noir sur le visage de la planète. Seul signe d'activité notoire : un supermarché ce qui indique que la vie doit avoir pris quelque part même si c'est loin d'être évident au premier abord.

Ne comptant pas rester dans cette impasse à elle toute seule, j'achète un billet de bus pour changer d'air. Et aujourd'hui on fait les choses en grand. Quelle tronche croyez-vous que j'arbore quand je vais vers le chauffeur en lui posant cette question : "Bonjour monsieur, est-ce que je pourrais avoir un aller simple pour le glacier Franz Joseph, s'il vous plait?"
Dans la même journée, je passe d'un océan à une mer, de la plaine à la montagne, de l'eau à la glace. Quel autre pays dans le monde peut se targuer d'un tel cocktail? L'Islande peut-être... Ah oui l'Islande. Pour une autre fois sans doute, c'est pas la porte à côté!

Dans mon bus, on suit d'abord la mer, plaisant. Puis, au terme de deux heures de parallélisme marin, on biffurque droit dans les terres, empruntant celle qu'on appèlera pour l'occasion la perpandiculaire du bonheur, the perpandicular of the bonheur en kiwinglish. Puis, à peine quelques dizaines de minutes plus tard, alors qu'on approche uniquement les 400 mètres d'altitude avec un mercure toujours autour de 20° au soleil, on l'aperçoit dans un coin de paysage fendant la montagne en deux : une langue de glace à faire frémir un french-kisseur longue de plusieurs kilomètres, le voile se lève sur le glacier. Inutile de préciser que, comme ce type de phénomène ne courre pas les rues du côté de Fait-d-herbe-Chaligny, d'Epone, de Chauvigny ou d'ailleurs qui soit familier, j'ai les poils qui se dressent à la vue du monstre érosif. Quelques heures tout au plus, voilà ce qu'il faudra attendre pour s'y frotter parce que, si ,si, c'est au programme!!!

En attendant, de se mesurer au Franz Joseph, le bus arrête sa course dans le village éponyme largement garni comparativement à sa taille réduite en hotels en tous genres. Je m'installe. Dans mon dortoir de quatre lits, seul un est occupé, c'est plus de choix qu'il n'en faut pour que je trouve mon bonheur matelassé. Sitôt mon sac posé, je me rend aux toilettes les plus proches. D'habitude, je ne prends pas la peine de vous y décrire chacun de mes voyages mais celui-ci est d'importance. La porte est fermée, quelqu'un occupe déjà les lieux. Une minute, deux minutes, trois minutes, je sers les dents autant que je suis sur le point d'accoucher d'un service d'au moins trois pièces, j'ai la belette à l'aurée du bois. A l'intérieur, ça tire la chasse, ça ouvre la porte, et là, surprise. Je tombe nez-à-nez avec Ram, un brésilien que j'avais croisé véritablement en coup de vent à Taupo et avec qui, même si ce n'était que le temps de quelques phrases, le courant était passé aussi bien que mon corps réagit à l'appel de la samba.
Tout d'un coup, le porte-avions oublie qu'il a des bombardiers à catapulter, la guerre menant à l'accession au trône prend du retard, la discussion et la réjouissance découlant de ces retrouvailles s'amorcent dès le couloir dans lequel je trépignais encore quelques secondes auparavant. Qui plus est, devine qui partage mon dortoir? Ram, of course!
Le sort étant scellé quant au fait que nous allons découvrir les alentours ensemble, il est alors grand temps de les faire sauter, les scellés. Fin de cet aparté post-digestif.

De retour à la chambre, le paulista est là. Comme l'après-midi touche à sa fin, une bière sera du meilleur effet, la trinque se célébrant dans l'allégresse à l'heure des retrouvailles, notamment.

Une terrasse ensoleillée puis dans la pénombre plus tard, un rapide passage au bureau des guides pour s'encquérir de la faisabilité de notre entreprise plus tard, il est temps de savoir où on mange. Pour ma part et j'en fait part à Ram, je n'ai encore jamais ô grand jamais cuisiné lors de mon périple et il fairait bien beau que ça se produise ce soir. De son côté, le brésilien est plus entreprenant et plus pragmatique. Dans notre GH comme dans toutes celles dans lesquelles j'ai séjourné en Nouvelle-Zélande, il y a au rez-de-chaussée une cuisine flambant neuve qui n'attend de nous qu'une chose : qu'on lui mette les poêles sur les "i". De plus, comme nous sommes plus ou moins au milieu de nulle part, le prix des restaurants devrait être au moins inversement proportionnel à la facilité qu'ont les établissements à se fournir en tout. Qui plus est enfin, et là est l'essentiel, mon baroudeur de collocataire a des fourmis dans les manches de casseroles, et des envies de cuisiner à la mode sud-américaine.
Qu'il en soit donc ainsi. Pour sauver les apparences, je propose comme c'est mon habitude de faire la vaisselle plutôt que de mettre les mains dans le camboui.
Lui à la cuisine, moi à l'éponge, une bien belle équipe où les automatismes ne vont pas être trop durs à retrouver. La vaisselle, c'est comme le vélo, ça ne s'oublie pas...

Sur ce, on file alors vite fait bien fait à la seule superette de Franz Joseph Village. Les produits y sont peu diversifiés si l'on fait exception des rayons bières et pinards comme partout à Kiwiland. Seulement, le chef du soir trouve quand même nourriture à son panier pour mener à bien ses envies : un boeuf strogonoff à la sauce samba, un boeuf strogoninho. Au retour à la cuisine, on fait alors crisser les pneus, chauffer la gomme. Le feu s'allume, les dés de boeuf, d'ail et j'en passe se débitent, ça crépite, ça embaume... Pendant une heure!
J'ai l'impression d'être dans la telenovela "Les Rousseau" dans laquelle les protagonistes, s'ils ont le choix entre passer 90 secondes ou 90 minutes derrière les fourneaux, choisissent invariablement la deuxième solution, comme si la vie était un repas de Noël. Certes, au moment de l'entrée en bouche, c'est croustifique mais en attendant, avec qui je trinque mon rhum à la main?
Finalement, après une éternité à humer le fumet se dégager leeeeentement de la mixture en préparation, c'est la ruée qui elle aussi dure grace à des quantités qui n'ont d'égal que la qualité grace au cuisto qui maintenant mérite tous les égards.

A l'issue de cette ventrée, je m'acquitte de bon coeur de ma maigre corvée. En cinq minutes, tout est propre, ça brille, même si peut-être, dès le lendemain, devront nous tout re-salir.

On fait alors une brève escale par le coin canapé. Là, on discute avec un groupe qui s'est déjà mis de la glace sous les crampons toute la journée. Ils n'en reviennent toujours pas! Les superlatifs s'égrainent et notre appétit n'en est que décuplé! Dès 8h, c'est notre tour, tachons d'être en forme. Au retour à la chambre à 23h, cinq minutes suffisent à Ram pour s'endormir. N'ayant plus personne avec qui broyer des couleurs, je me tache de le rejoindre au pays des rêves aussi vite que possible.


Au matin, Ram est aussi rapide pour se lever. Il va prendre sa douche, je me rendors. Il reviens, viens mon tour dont je ne m'acquitte de si bonne heure que parce que le futur proche de la veille frappe au portillon. Le glacier s'est mis sur son 31 aujourd'hui pour nous, tachons de ne pas le faire attendre... En une telle occasion, il ne manquerait plus que ça. Et ce n'est pas parce qu'en mettant le nez à la fenêtre, les nuages s'amoncellent qu'on va changer notre fusil d'épaule. Aujourd'hui, nuages ou pas nuages, c'est de jour de la claque permafrostée!!

Après un petit déjeuner rapidement ingéré, on se dirige vers la maison des guides. En effet, sur pareil terrain de jeu, il est inconcevable même pour mes habitudes débrouillardes qu'on puisse ne serait-ce qu'envisager risquer une chute mortelle dans une crevasse qui n'aurait rien fait pour mériter ça.
A l'intérieur, on pourrait arriver en short et en tongs, comme de gros touristes qui n'auraient rien compris, que ça ne changerait rien, ils s'occupent de tout. Crampons, chaussures, chaussettes, pantalons, gants, blousons, tout est disponible. Le glacier est un jeu où le premier qui a froid a perdu. On s'équipe donc comme si on partait au pôle, chaque partie majeure du corps se doit d'être étanchéifiée contre le froid et l'humidité.
Une fois arnachée comme des mules, la vingtaine de touristes qui patiente avec nous se met en branle, un bus montre son nez, c'est le grand départ.

Une fois stoppé sur le parking, une file indienne s'organise. Il faut encore rejoindre le monstre. Pour ce faire, on traverse une forêt de belle facture qui, plus on avance, plus elle se retrouve cernée de falaises desquelles coulent quelques gentilles cascades. Puis, après 30 minutes, la vue s'éclaircit enfin, au bout d'une large plaine au milieu de laquelle coule une rivière charriant les milliers de litres d'eau qui fondent du glacier ainsi que du champ de glace qui le surplombe encore, hors de notre portée, elle est là, menaçante, la coulée blanche, le magnifique glacier Franz Joseph.
Pour l'instant, on en est encore qu'à un kilomètre mais, à mesure qu'on s'en rapproche, le mur synonyme de point de non retour pour le glacier révèle ses dimensions colossales. Une barrière infranchissable, voilà ce qu'il semble. Torturé, anguleux, plongeant sur plus de trente mètres de haut, la rencontre tant attendue est à la hauteur de nos pronostics. Quand on est à ses pieds, on réalise, on est pas plus grand qu'une miette sur une toile cirée, une cuillère à soupe dans l'océan.

Ne nous manque plus que de s'y baigner, on y vient.

Tout d'abord, il faut apprivoiser nos fers. Marcher est une chose à laquelle on ne réfléchit plus quand on passe la barre des trois ans, mais dès qu'on y ajoute l'usage de crampons se fixant sous les semelles, c'en est une toute autre. Pour se déplacer avec grâce, il faut en plus de bien lever les pieds, bien écarter les jambes afin que les becs métaliques à l'intérieur ne viennent pas à rouler des pelles aux plis du pantalon de l'autre côté, auquel cas, c'est une chute quasi-assurée comme avec les lacets de la chaussure gauche attachés avec leurs voisins de droite.
Une fois cette subtilité intégrée, comme Franz Joseph n'est surtout pas lisse et plane comme une patinoire, il faut se faire à monter et à descendre des escaliers improvisés. Dans des marches creusées à notre niveau pour l'instant au raz des paquerettes, les uns derrières les autres, chacun s'essaye avec plus ou moins d'aisance mais comme personne n'improvise des roulades, on dira que ça roule.

Puis vient l'ascension. Comme ni Ram ni moi ni personne d'autre sommes des professonnels de la varape, tout se déroule pour l'instant sur un sentier pré-tracé que notre guide s'efforce de maintenir en l'état avec la pioche qu'il se trimballe. C'est que le glacier n'est pas une masse figée, et encore moins Franz Joseph qui est un sprinter dans sa catégorie. Chaque jour, c'est de plus d'un mètre que celui-ci dévale en aval. La surface se contracte, s'étire, c'est un bordel, y'en a partout.
De nouvelles crevasses se dévoilent chaque jour, d'autres se comblent, comme moi. Comblé!!
Malgré la grisaille, en terme de couleurs, la matière est loin d'être uniforme. Certes, le blanc est omniprésent mais ce qui flatte encore plus le regard, ce sont toutes les teintes de bleus qui s'extraient des profondeurs. Quand une flaque est là, en l'aggrandissant mentalement, on jurerait presque être face à un lagon. Presque.
Quand de l'eau ruissèle, et c'est le cas partout du fait que le mercure flirte avec les 10°, elle disparait soudainement dans des puits sans fond, crevasses qui égrainent elles aussi toute la gamme des bleus. Pour un peu, ça ferait frémir, mais non, ou alors de plaisir.

Car, en effet, il m'arrive parfois, si les paysages, bien que spectaculaires, se ressemblent sur une période de disons quinze jours, d'être blasé. C'est la même chose si je doit entamer la visite d'un dixième temple en cinq jours. La redondance tue l'abondance. Or, ici, c'est tellement éloigné de mon quotidien, tellement vaste, tellement inaccessible en apparence, tellement aux frontières du réel, que Whaouuuu, même si quelques gouttes de pluie commence à tomber, j'ai une banane de la taille du Nébraska dont je n'ai aucune idée de combien il pèse en kilomètres carrés, mais ça veux bien dire ce que ça veut dire!

Et puis de toutes façons, la météo fait des siennes alors qu'on apprivoise une partie bien spécifique et complètement inatendue : un tunnel de glace haut de quelques dizaines de centimètres dans lequel on rampe sur le dos jusqu'à atteindre l'autre côté. C'est fun, ça réchauffe, ça nous met à l'abri quelques minutes le temps que le robinet cumulus ne s'arrête puisque, ô miracle, c'est le cas.
Cinq minutes de pluie, vous parlez d'une rigolade quand on est équipé pour traverser l'océan à la nage sans que l'eau ne vienne à nous mouiller.

L'ascension se poursuit encore. A mesure que l'on s'enfonce dans les entrailles de la bête, les failles semblables à des vagues géantes se creuses, s'élargissent à tel point que maintenant, c'est de tsunami en tsunami que l'on progresse en marchant ou en descendant des pentes abruptes à la limite de la verticalité que des semelles crêpes transformeraient en tremplin de haut vol. A l'intérieur, il n'y a pas grand place, parfois il faut même se mettre de profil pour pouvoir s'aventurer plus loin tant mes épaules de déménageurs n'auraient pas la place de passer de front dans ces passages où les murs qui nous entourent sont hauts de près de dix mètres. Pour un peu, la claustrophobie n'est pas loin même si on a le ciel pour plafond comme nous le certifie les kias qui volent ci et là et se posent sans crainte autour de nous dès qu'on fait cinq minutes de pause.
Les regarder procurent un nouveau sentiment melant extase, respect et étonnement. C'est que les kias ressemblent plus à des perroquets qu'à des pingouins, recouverts qu'ils sont de plumes vertes et oranges chaussées d'un bec court et courbe comme leurs cousins des forêts équatoriales.

Après trois heures quand même, à l'issue d'une pause déjeuner assis les fesses dans la glace, sans même une table, une chaise ou un valet (remboursé!!!), il faut déjà faire demi-tour étant donné que le même lapse de temps est nécessaire pour boucler la descente. On est plus sur le Queen Charlotte Track, ne comptez ni sur moi, ni sur notre guide, pour entamer un footing! On a beau s'habituer physiquement à l'environnement, ça ne nous change pas pour autant en esquimaux! Sécurité avant tout comme ils disent!! Mentalement, d'un autre côté, impossible que ce soit une heure ou quatre heures après le départ de se départir de l'émerveillement d'évoluer maintenant sans craintes dans le plus improbable des terrains de jeu.

C'est ainsi plein de regrets que ça ne se fasse pas sur une semaine durant qu'on retourne enfin à notre point de départ.
Pour Ram, les sentiments sont un peu plus mitigés du fait que dans les dernières centaines de mètres, sur du plat heureusement, comme il fallait bien que ça arrive à quelqu'un, ses crampons se sont emmèlés inextricablement si bien qu'il s'est rétamé la tête la première dans la banquise avant d'entamer une session de luge humaine sur quelques mètres. Mais plus de peur que de mal, il s'en tire à moindre compte.

De retour sur la roche, on se décrampone, c'est le retour à la normale pour la marche du retour qui, maintenant qu'on connait déjà les lieux et qu'on vient d'expérimenter quelque chose d'autrement plus spectaculaire que cette forêt qui nous parait en comparaison au rabais, semble bien plus longue qu'à l'aller.

A la GH, une fois dans notre chambrée toujours uniquement occupée par Ram et moi, on s'offre une petite scéance diaporama pendant laquelle on s'émerveille encore des quelques heures qui viennent de s'écouler.

A l'heure du dîner, les véléités quant à se remettre du côté du manche ont fondu. La faute à ma persistance à rappeler qu'hier j'ai rompu mon voeu de feignantise peut-être, la faute à une marche longue de six heures plus surement. On s'accorde sur un steack bien juteux pour se remettre.
Puis c'est l'heure d'investir à nouveau, comme le veulent les Droits de l'Homme, le coin canapés. Il y a là un petit français qui vient d'arriver dans le bled et il est toute ouïe quand je lui décris notre aventure à rendre Hagen Dazs jaloux. Puis, excité par le récit, il prend la balle au bond pour se délier la langue dans la langue de Molière ce qui n'a pas dû lui arriver depuis bien longtemps. Il entreprend alors de me parler sans discontinuer sur tous les sujuets possibles et immaginables pendant une bonne heure jusqu'à ce que j'ai les oreilles qui commencent à saigner. Car, ce qu'il ignore, c'est que dès demain, nos chemins à Ram et à moi se sépare de nouveau et que j'ai autre chose à faire que de me faire remplir la piscine par le premier venu.
Avec le Paulista, on s'accorde donc pour s'éclipser en douceur.
Une heure de rire plus tard, en se désolant du fait que ça ne puisse pas durer plus longtemps, le rideau se tire sur cette journée fant-ice-tique.

Le lendemain, le bus de Ram qui file au nord est à 8h du matin, juste assez tard pour que je puisses lui dire une dernière fois au revoir.
Pour ma part, mon bus qui trace au sud est à 10h, y'a pas écrit suicidaire sur mon front brulant. Une douche régénératrice plus tard, me voilà parti pour Queenstown, capitale mondiale du saut à l'élastisque, du lever de coude à l'anglaise, et de tout ce qu'on peut imaginer de tarabiscoté en ce qui concerne les activités en extérieur. Il me tarde d'en mettre un coup, c'est que je ne suis pas de là!



PS : les photos non plus. Dans l'hiver mexicain au milieu de pas grand chose, elles n'ont pas grand chose dans les bras. A revoir.
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15 janvier 2010 5 15 /01 /janvier /2010 04:50
Je marche seul, Dans les rues qui se donnent, Et la nuit me pardonne, Je marche seul, En oubliant les heures. Ca c'est la moitié du temps. L'autre moitié, Je marche avec quelqu'un, Dans les rues qui se donnent, Et la nuit nous pardonnent, Je marche avec quelqu'un, En oubliant les heures. Dans cette autre moitié, moi comme ce quelqu'un suis un déraciné et enraciné là à la vas-vite, le temps de faire le tour des lieux avant de repartir. Seulement, dans ce camembert de partage du temps, il est temps d'ajouter une nouvelle case : Je marche avec quelqu'un qui est chez lui, Dans les rues qui se donnent, Et la nuit nous pardonne, Je marche avec quelqu'un qui est chez lui, En oubliant les heures. En effet, en exceptant Pékin dont je ne t'ai pas encore conté les délices (Salut Mr Dara), c'est la première fois que pendant le voyage, je suis accueilli par des locaux. Les locaux en question ce sont Anna et Tyler, deux kiwis pure souche avec qui nous avions partagés quelques éclats de rire et quelques temps au Ladakh dans le nord de l'Inde. Eux sachant que je venait en Nouvelle Zélande m'avaient très gentiment proposé de passer les voir à Christchuch, leur ville, la plus grande de l'île du sud. C'est sur le point d'être chose faite. J'avais été invité par l'intermédiaire de Facebook à venir une semaine plus tôt pour célébrer avec leurs amis les trente ans d'Anna au cours d'une fête ayant pour thème la France mais j'avais dû y renoncer, mon rythme n'étant pas assez rapide, d'autant que j'avais été reffroidi par l'horaire inhabituel d'une telle célébration entre amis. La fête avait lieu entre 14h et 17h et pas une minute de plus. Il faut que qu'Anna et Tyler sont de fervents catholiques et, à ce titre, ont souvent école le lendemain... Cela dit, et c'est le principal, ça ne les empêche pas d'être de très bons bougres avec lesquels on passe de charmants moments comme en témoigne cette histoire racontée en Inde par Tyler. "Quand tu es en Nouvelle Zélande, que c'est l'hiver et que tu es pris dans une tempête de neige avec rien sur le dos, pour t'en sortir vivant, il n'y a pas mille solutions, il faut partir à la chasse. En l'occurence, un petit lapin fait très bien l'affaire. D'abord, tu attrappes le lapin que tu estourbis d'un coup derrière la tête. Une fois l'animal trépassé, tu lui coupes la tête. Si, si, c'est permis! Si tu n'as pas déjà dégobillé sur ton produit, tu poursuis. Il faut attraper le lapin par derrière en restant chaste. Tu mets ton pied préféré au niveau du fessard de la pauvre bête ainsi que tes mains saississant les bords sanguinolants du cou nouvellement guillotiné, dégagé de la tête qui encombrait pour mener à bien l'étape suivante. Il convient alors de procéder à un pousser-tirer. Avec le pied, tu pousses. Avec les mains tu tires. La manoeuvre consiste à retourner le lapineau. Si tu y es parvenu, tu n'as plus qu'à te débarrasser des organes qui pendent maintenant à l'extérieur et tu obtiens quoi? Un très joli et très salvateur chauffe-mains en fourrure!!! Elle est pas belle la vie? Ca peut également fonctionner pour confectionner un sac de couchage mais il te faudra alors trouver pleins de lapin dont tu coudras les peaux ou t'attaquer directement à plus volumineux comme une biche ou un ours si tu es toi aussi plus volumineux. De re-chef, elle est pas belle la vie?" Voilà comment on rigole (survit) en Nouvelle-Zélande, même quand ta sagesse n'a d'égale que ta sobriété, comme Tyler. Et j'ai beau avoir manqué l'anniversaire d'Anna, tout n'est pas perdu du côté des réjouissances. Ce soir, même si nous ne sommes qu'un samedi de fin novembre, toute la ville a rendez-vous dans le plus grand parc de la ville pour un concert gratuit à ciel ouvert placé sous le signe de Noël. Je vous l'avais dit juste avant, fêter Noël en novembre, par toutatis, ils sont fous ces kiwis!! Mon train au départ de Kaikoura sonne l'arrivée à Christchurch en fin d'après-midi. La météo est clémente, c'est tant mieux pour ce soir. A la sortie du quai, la synchronisation avec Tyler ne pourrait être meilleure. A peine ai-je mis le nez dehors qu'il tire le frein à main et ça a beau faire déjà plus d'un mois que nous nous sommes vus la dernière fois, c'est comme si c'était hier. Accolades et embrassades, tout le panaché des gestes de retrouvailles s'enchaine devant le regard ahuri des passants. Puis, mon sac installé dans le coffre, ne nous reste plus qu'à rejoindre Anna qui est restée posée dans un bar à discuter avec un couple de leurs amis qui ne sont eux aussi en ville que pour quelques heures seulement. En débarquant dans le dit-bar, les embrassades avec Anna n'ont d'égales que celles que je donne aussi à leurs amis que je ne connais pourtant pas. J'apprends, qui plus est, qu'en ce soir enfiévré, ces derniers viennent d'annoncer à mes hôtes, la livraison toute fraiche d'un polichinel dans son tiroir à elle. Mazeltof!!! Ca bon sang pour une surprise!!! Félicitations!!! Champagne? Ah non c'est vrai... Jus d'orange? Mieux. Une heure passe au terme de laquelle l'autre couple nous quitte. N'étant plus que trois avec Anna et Tyler, nous reprenons la discussion là où nous l'avions laissée en Inde quand on est pas la bouche pleine de pizzas qui se suivent les unes les autres sur notre table. Nous quittons le bar vers 21h. Le concert doit avoir déjà commencé mais qu'importe, on s'évertue d'abord à faire un petit tour à pieds du centre-ville à la lumière du jour qui ne s'estompe en ces terres australes que bien plus plus tard à la faveur de l'été qui arrive. La ballade est plaisante. De nombreux immeubles vieux de plus d'une centaine d'années, c'est à dire un sacré bail pour cette terre occupée tardivement par les anglais qui dans leur entreprise ont eu le mauvais gout de renvoyer les français et leurs navires coloniaux soit par le fond soit chez eux, se découvrent. Tout est mignon, tout est calme, c'est la ville en Nouvelle-Zélande par excellence. Puis, la nuit approchant, on se dépèche de rejoindre le "Christmas in the Park". Pour se faire, impossible de se perdre, il suffit de suivre les hordes du buveur. Comme il ne pleut pas, c'est encore une chance, toute la ville est sur place. Sur la scène, cinq ou six chanteurs se succèdent. Partout, ça se dandine, ça danse, ça dîne. A chaque fin de chanson, les personnes aux micros n'oublient jamais de citer le sponsor liquide aux couleurs rouges et blanches. C.ca c.la par si, coc. col. par là, c'est un festival qui après un temps donne la nausée. Je suis dans un publicité géante terminée en beauté par un feu d'artifice lancé depuis une bouteille géante. Même le Père Noël, ce vendu qui n'oublie pas ses créateurs, est de la partie. A ce compte là, c'est une véritable association de malfaiteurs doublée d'une véritable escroquerie puisque, je le rappèle, on est en novembre!!!! Alors d'accord, le monsieur barbu est soit disant quelque peu occupé le soir du 25 décembre mais quand même!!! Malgré tout ce cirque, la soirée pour nous se passe bien. L'ambiance est bon enfant ce qui suffit mille fois au bonheur d'Anna et Tyler, et si c'est bon pour eux, c'est bon pour moi même si je ne suis pas mécontent d'entendre l'hymne de l'été du généreux soda qui marque la fin de l'évènement. Au retour à la voiture, mon sac est encore dans le coffre dans lequel Tyler farfouille maintenant pour dégotter son arme secrète, un thermos dans lequel il avait pris soin de mettre du chocolat chaud. Alors d'accord, on est loin du champagne, mais c'est de bon coeur que j'accepte une tasse de ce doux breuvage, symbole temporaire d'hospitalité autant que d'arme anti-froid, la température étant redescendue autour des 10°. Une fois le thermos à sec, il est temps de se mettre en mouvement jusqu'à la casa de mes hôtes qui se trouve en fait être la casa des parents d'Anna qui m'acceptent sous leur toit. A notre arrivée, ceux-ci dorment déjà. Je demande alors à mes p'tits kiwis ce qu'ils ont prévu pour le dimanche qui va éclore, et, lorsqu'ils m'annoncent tous sourires qu'ils doivent faire le tour des chapelles des environs pour assister à pas moins de trois messes différentes avant, dans l'après-midi, de se rendre à un groupe de discussion sur la Bible, je vois tout de suite que je ne suis pas dans la Scène. Jésus est bien là entouré de Judas et des autres. Tyler, Anna et leurs amis sont là aussi. Quant à moi, même en regardant avec attention l'arrière plan, je ne suis nulle part sinon dans un autre train qui traverse de part en part l'île du Sud : le Tranz Alpine Crossing. C'est que je n'ai déjà plus qu'une quinzaine de jours à dérouler de belle manière dans ce pays qui n'a eu de cesse de me taquiner l'intéret depuis de longues années déjà, autant ne pas les passer à rebrousse poil, sachant que comme les montagnes locales ne sont pas directes depuis la Porte d'Orléans, j'ai tout intérêt à en profiter maintenant plutôt que dans un futur hypothétique et lointain. Je fais donc part de mes envies au retourneur de lapins ainsi qu'à sa compagne. Déjà ravis que je sois en leur compagnie en ce soir où l'esprit de Noël nous habite, ils acquiescent et me souhaitent déjà bien du plaisir. Il est alors autour de 23H30, l'heure d'aller se coucher. Qu'à cela ne tienne, comme le train part le lendemain avant que ne sonnent 7h du matin, c'est un mal pour un bien. Après avoir souhaité une bonne nuit en leur répétant la dette que j'ai maintenant envers eux, je m'allonge dans la chambre de la grande soeur d'Anna qui vit en Australie. Le lit est recouvert de peluches m'autorisant à penser que je vais faire de beaux rêves. Au matin, le réveil sonne à 6h. Comme d'habitude, dès le saut du lit, je file à la salle de bain. Pour l'occasion, j'ai seulement une serviette autour de la taille ne m'attendant pas, comme c'est le cas, à tomber dès l'ouverture de ma porte, nez à nez avec la mère d'Anna que je rencontre pour la première fois. Faisant fis des circonstances, je la remercie de son hospitalité sans prendre de pincettes étant même à deux doigts de m'agenouiller. Elle s'étonne mais sourit de cette rencontre du troisième type. A la sortie de la salle de bain, Tyler est maintenant également levé, prêt à me conduire à la gare, grâce lui en soit rendu! Ainsi, moins de 24 heures après l'avoir laissée, je suis, agard, de retour à la gare. Je salue une dernière fois Tyler, les commissures des yeux toujours bien encombrées, signe qu'à la fois le réveil et le retour au lit ne sont pas biens loins. Vivement qu'ils viennent à Paris que je les fasses se coucher à pas d'heure. En attendant, le chef de gare siffle nos aux-revoirs. Je laisse la côte est derrière moi et brule d'impatience d'en découdre avec l'autre côté, au terme de quelques heures ferrovières passées la tête dans les montagnes aux sommets enneigés. Nouvelle-Zélande quand tu nous tiens!
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6 janvier 2010 3 06 /01 /janvier /2010 08:11
Salut à tous mes petits candides!

Suite à l'afflut massif de courriers limites révolutionnaires me demandant de me remettre le la tête dans le guidon rédactionnel au risque de me retrouver la tête au bout d'une pique si je ne m'éxècutais pas, je fais mon retour en cette nouvelle année et ce n'est pas chose facile quand je contemple la pile de travail en retard qui encombre mon bureau virtuel. C'est que le récit qui devait s'inscrire au présent à pris un coup dans l'aile et dresse maintenant une table qui se conjugue au passé ce qui, il faut en convenir est loin d'être plus que parfait.


Le Queen Charlotte Track a laissé quelques traces. Pas d'ecchymoses, pas de sang, pas de cicatrices, peu importe, je n'ai pas besoin de ça pour marcher comme un revenant du front russe. Les membres sont lourds et l'utilisation de la petite piscine chauffée de la GH me ferait le plus grand bien. Ce n'est pas parce qu'on est pas à Vittel ou à La Baule qu'on ne peut pas apprécier les biens faits d'une thalasso sur le pas de sa chambre. Cependant, depuis ma dernière plongée en ces eaux sympathiques, j'ai l'impression que la haute saison vient de poser ses valises à Picton.
En l'espace de trois jours de randonnée, l'hotel s'est rempli au même rythme que le bassin qui débordent de jeunes buveurs de bière. Dans ces conditions, comment voulez-vous que je trouve le calme et la sérénité? Je tire une croix sur les soins et me retire comme un prince déchu. Qu'il en soit ainsi, je lègue Picton à mes héritiers festoyant et met le cap au sud. La cible : Kaikoura.

Kaikoura est une destination balnéaire de premier ordre si on excepte sa taille restreinte à l'image, à quelques exceptions près, de toutes les localités de l'île du sud. Et qui dit balnéaire, dit front de mer. Et ce qui fait la réputation de l'endroit, ce n'est pas ses eaux tropicales et son sable blanc sur lequel on se dore au soleil, c'est tout l'inverse. A Kaikoura et sa péninsule, la configuration côtière fait que c'est un lieu de rassemblement majeur pour tout ce qui nage avec des poumons à l'exception de Pamela Anderson. Phoques, dauphins, baleines, cormorans, jeunesse buveuse de bières, tout y est!

D'ailleurs, sur la route qui m'y mène, le chauffeur arrète le bus le long de la route qui longe le littoral de très près. Là, dans des conditions odorantes à vous faire retourner votre petit déjeuner plus rapidement que sous 48 heures, une colonie de phoque s'ébat. Tous les passagers descendent et mitraillent pour leur tirer le portrait par pour faire sortir Brigitte Bardot du bois. Moi, j'en fais de même et m'extasie. C'est la toute première fois que je vois ces adorables saucisses rampantes dans leur habitat, l'émotion n'est pas feinte.
Ca compense en plus largement autre chose. J'ai le souvenir qu'en quittant le Rajastan en Inde, je me souviens avoir marquer ma mémoire d'une pierre blanche à la vue de mon dernier chameau. Comme les destinations restantes n'en sont pas porteuses, ça m'avait fait un petit pincement au coeur que de me rendre compte que c'était déjà la dernière fois avant le retour à Paris pourtant encore lointain que j'en voyais gambader un. C'est pourquoi en ce jour de bibis phoques, ça permet de relativiser en m'exposant de nouvelles merveilles.

A leur vue, je dégaine. La lumière a beau ne pas être idéale, la faute à des nuages qui semblent avoir établi leur capitale en Nouvelle-Zélande, j'en oublie le bus pendant quelques instants. Quelques instants seulement car après deux minutes montre en main, le chauffeur fait résonner le klaxon à dix bornes à la ronde, signe que sa patience a un appétit d'oiseau. La frustration est de mise mais qu'importe, Kaikoura n'est plus qu'à quelques minutes et d'autres colonies de phocidés sauront bien s'y sentir. Le bled atteint, l'après-midi est encore reine en son jardin. Un nouvel hébergement déniché, je pars alors en ballade sur la péninsule que longe un chemin de randonnée. La mer rejointe, je suis saisi par le paysage. La plage tapissée de sable noir est battue par les vagues tandis qu'à l'autre côté des montagnes couvertes de neige nous dominent. Dans ce même plan, la juxtaposition de l'Océan Pacifique et des arrêtes blanchies est renversante. Si je me concentre sur les sommets, impossible, si on fait fi du ressac, de se douter que la grande bleue est juste derrière et inversement. Je poursuis.

Après deux kilomètres, un panneau m'indique que je tiens ma revanche sur le chauffeur du bus : Seal colony, je ne traduis pas. Suivant l'indication, je coupe vers une large étendue de rochers. Les touristes ne se pressent pas au portillon, les k-way se comptent sur les doigts d'une main. Les phoques sont un poil plus nombreux mais à peine. Peut être est-ce l'heure du repas servi en mer ou que sais-je, mais les centaines promis ont mis les bouts. Mais peu m'importe, j'ai déjà de quoi m'extasier avec les rares qui fréquentent encore les lieux, sans doute trop feignants pour aller prendre un bain si j'en juge à leur inactivité. Ils dorment tous. Sur le dos, sur le ventre, sur le côté. Parfois, il y en a un qui se gratte mais pas plus. Ce n'est que lorsque je m'approche un peu trop près à leur gout qu'ils daignent lever la tête mais pas plus. Cela suffit en tout cas à ma joie d'être au milieu de ces géants rampants.

Je poursuis la promenade qui grimpe maintenant le long d'un escarpement, la plage ayant la bonne idée de se muer en falaises plongeantes en haut desquels les vues panoramiques se succèdent que ce soit côté littoral où la dentelle rocheuse donnent des impressions justifiées de bout du monde, ou côté montagne maintenant aggrémenté de vaches qui paissent donnant à l'ensemble un gout étrange de Suisse sur Mer.
Et, pour ne rien gacher, il n'y a plus personne à l'horizon. Rien que moi au milieu de cette démesure sans doute aidé par une journée qui finit déjà, transformant sur la fin ma trotte en cavalcade, parfait décrassage de guiboles.

De retour à mon dortoir avec la nuit, il n'y a pas grand chose à faire mis à part grignoter et se remettre. Les seules fois où je quitte temporairement la GH, je m'allume une cigarette jusqu'à la dernière autour de 22h30 quand je suis pris à parti ma bouteille de Sprite sous le bras. C'est qu'on est samedi soir et encore plus que d'habitude, les néo-zélandais profitent de leur héritage anglais pour boire jusqu'à plus soif et se mettre dans des états que la morale réprouve. D'ailleurs, à gauche de mon hotel, il y a un bar. A droite de mon hotel, il y a un bar.
A la terrasse de ce dernier, une jeunette imbibée à la limite de ses 18 printemps me salue, sympa. Je m'approche et échange les cordialités d'usage.
(je traduis)

- Salut!!
- Salut!!
- Comment tu t'appelles?
- Brice et toi?
- Brice? Mais ça vient d'où ça encore et qu'est ce que tu fous avec ta bouteille de Sprite? Fuck Sprite!!!!
- Attends, y'a un problème?
- Pourquoi tu ne bois pas de la bièèèèèèèère comme tout le monde?
- Et bien figure toi...
- Parce que le Sprite, bonjour tristeeeeesse!!!!
- Désolé que tu le prennes sur ce ton... C'est que la bière, c'est pas vraiment ma came, je suis plus un buveur de rhum.
- Fuck le rhum!!!!!!
(mon sang ne fait qu'un tour)
- Avant, c'était limite, là ça va trop loin, je n'ai pas de leçon à recevoir d'une pisseuse qui ne sais pas se tenir et qui mouillait encore son lit quand je prenais mes premières cuites. Retourne donc à l'intérieur voir si t'y fuis!

Là dessus, la demoiselle se transforme en harpie et se jète sur moi la tête la première toutes griffes dehors. Dans une maestria d'esquive rotative, j'évite la donzelle qui manque de s'écraser à terre. Elle crie. Ses potes rappliquent. Ils sont trois et ont conscience que la gamine est au delà du réel et sans même me demander de quoi il retourne, ils se saisissent de cette petite conne et la ramène à l'intérieur. Je finis ma clope et vais me coucher comme un prince.
Il faut quand même pas déconner...
A 23h, c'est l'extinction des feux. Le réveil est branché à 6h00, signe que je m'active.

Le temps presse à Kaikoura. Vingt-quatre heures sur place, c'est tout ce dont je dispose. J'ai rendez-vous l'après-midi suivante avec Anna et Tyler, que j'avais rencontrés dans le nord de l'Inde, dans leur ville de Christchurch où il est déjà prévu qu'ils m'hébergent au moins une nuit.  
 
Quand le réveil sonne, je suis très vite sur pieds. J'ai à peine le temps pour une dernière activité qui vaut la chandelle : aller nager avec les dauphins. Comme à mon habitude, je n'ai rien réservé. Sitôt debout, je traverse le village jusqu'au bureau de la compagnie qui s'occupe de la rencontre mémorable. A l'extérieur, un crachin dégouline. Arrivé sur place dès l'ouverture à 6h30, je fais part de mon excitation. Pendant deux minutres, ne laissant pas mon interlocutrice placer un mot, je me répends sur mon impatience d'en découdre avec Oum de Galak. Puis, alors que je suis à bout de souffle, c'est son tour de prendre la parole.

- Ah non monsieur, je suis désolé mais le bateau de 7h est déjà plein, le bateau de 10h aussi, quant à celui de 13h, je ne vous en parle même pas.
- Quoi? Je me suis levé pour rien.
- Pour le reste, je ne sais pas, mais en ce qui concerne les dauphins, oui.

Bordel de bordel!! Je me suis levé pour rien!! Mon bus est à midi et d'ici là, je n'ai qu'à rentrer sous la bruine comme le héros maudit d'un film en noir et blanc des années 50.

A 8h, mon sac est déjà bouclé, je suis déjà prêt à partir. Quatre heures de patience à gromeler plus tard, je décolle enfin, énervé de la situation mais certain que les occasions se représenteront et ce, pas dans des mers à 10°!!
Attention dauphins du futur, j'arrive!!!!   




PS : Commençons par souhaiter à tous une merveilleuse année, que vos souhaits soient exaucés pourvu qu'ils n'incluent pas ma tête et une pique.

PPS : Bienvenue aux derniers inscrits à la newsletter, en particulier à Bilbo joyeusement pêché sur voyage forum que le texte sur le Mont Doom devrait réjouir. Merci à tous.

PPPS : Pour les anciens inscrits que je salue aussi gaiement, merci d'être toujours là.

PPPPS : La paroisse est insatiable, mes biens chers frères, mes biens chères soeurs, continuez à convertir les infidèles de la lettre.

PPPPPS : En guise de cadeau bonus, en plus des photos de Kaikoura, vous avez le droit à 17 nouvelles vidéos sur "le Tour du Brice". En espérant que ça serve aussi à calmer les plus impatients.

PPPPPPS : Pour le reste, c'est comme d'hab, je me dépèche de rentrer des textes et de rentrer à la maison, j'arrive!!!!

 
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14 décembre 2009 1 14 /12 /décembre /2009 15:10
Quand on arrive en ville, on fait l'tour puis on r'part.
Jamais on s'fait de bile, même quand il fait un froid d'canard.


Après deux jours à Wellington, j'ai l'impression d'avoir déjà arpenté toutes les rues de la ville. A l'image de tous les grands centres urbains néo-zélandais, on se croirait dans un village gersois en comparaison avec les métropoles asiatiques tentaculaires. En marchant tout droit d'est en ouest ou du nord au sud, il suffit d'une trentaine de minutes pour boucler le centre-ville.

Ce matin donc, je prends la tangeante. J'ai un billet pour le premier ferry faisant la navette de l'île du nord à celle du sud. A 8h, j'embarque. A 8h30, on lève l'ancre.
Au départ, je m'installe sur le pont supérieur profitant d'un temps à peu près clément malgré la nécessité de porter mes vêtements les plus chauds en couches superposées à, si l'on en croit le calendrier, moins d'un mois de la venue de l'été. Seulement, pour l'instant, l'été est encore loin de me dorer l'épiderme. Sur ma tête, s'empilent casquette et capuche. Ce n'est pas encore assez... Le Détroit de Cook est réputé houleux ce qu'aujourd'hui ne vient pas démentir.
Transi de froid, je suis contraint de déménager à l'intérieur. Là, des centaines de personnes dorment à même le sol quand elles ne trouvent pas de sièges libres. Le ferry est un immense dortoir ronflant improvisé. Pour une fois en Nouvelle-Zélande où tout est d'habitude règlé à la mode bavaroise, c'est un joyeux bordel qui rappelle les trajets marins qu'on peut effectuer plus au nord, là où le bordel fait partie intégrante de l'Art de Vivre.

En apparté, juste pour que vous puissiez vous rendre compte à quel point les gens d'ici sont civilisés, il faut que je vous parle des passages cloutés. Au feu vert, lorsque le petit bonhomme rouge à les mains sur les hanches indiquant qu'il ne faut pas traverser; sans exception, tous les kiwis se font forts de ne pas le décevoir. Qu'il y ait une voiture toute proche ou rien qui vienne à des kilomètres, chacun se garde même de poser un orteil sur la chaussée. Le trottoir est une salle d'attente à ciel ouvert dans laquelle toute incartade n'est même pas du domaine de l'imaginable. Quand je vous dis que par moment on se croirait en Bavière...

Mais revenons à nos moutons.
Entourés de loques affalées comme elles peuvent, j'ai autant de modèles à suivre qu'il y a de dormeurs. La traversée durant trois heures, il faut bien s'occuper comme on peut. Apparemment, le petit bonhomme est en position couchée, tachons d'en faire autant. Autant à l'écart du passage que possible, je m'installe moi aussi ma couchette improvisée, mon gros sac me servant autant de dossier que d'oreiller et mon petit sac noué autour d'une de mes jambes pour ne pas lui donner l'occasion de faire le mur.
Bercé par le rouli du navire chahuté par les vagues, je sombre corps et âme en quelques tours d'hélice. Un délice, ce n'est pas la croisière s'amuse mais la croisière s'allonge et ce n'est qu'une fois Picton atteint de l'autre côté, que j'ouvre mes écoutilles comme le reste des somnoleurs.

Picton a beau être un point incontournable dans tout périple néo-zélandais eu égard à sa position stratégique, tout le monde devant à un moment ou à un autre prendre le ferry, le bled est liliputien. Une rue principale dans laquelle se concentre deux supérettes, trois restaurants et trois bars et puis c'est tout. J'ai plus vite fait d'en faire le tour qu'en faisant la même démarche autour d'un paté d'immeubles parisiens.
En quittant le port mes 25kg sur le dos, je pars de ce constat pour rejoindre la GH que j'ai choisis dans le LP à pieds. Celle-ci à beau être de l'autre côté du village, la belle affaire. Pourtant, en bon escargot aguerri, j'aurais dû savoir qu'épaules nues et épaules pleines ne jouent pas dans la même catégorie. Entre les poids mouches et les poids mi-lourds, il y a un monde. C'est pourquoi je suis bien soulagé quand j'aperçois enfin l'enseigne me prévenant de la fin imminente de mon cross country chargé comme une mule tout juste sorti d'un sommeil tellement profond qu'il est difficile de s'extraire de son emprise.
A l'intérieur, je pose mon paquetage en attendant que quelqu'un veuille bien me dire ce qu'il en est des lits libres. Une dame arrive, me demande si j'ai une réservation, et quand je lui répond par la négative, elle conclut en me remerciant d'être passé mais que pour ce soir, ça ne va pas être possible. (sic)
Le couperet tombe, il faut que je tourne les talons s'enfonçant dans la terre sous le poids de mon chargement remis à dos. Je retraverse Picton en sens inverse, las. Mais c'est pour le meilleur. En fin de compte, je me base dans une autre GH, véritable sanctuaire.
Des dortoirs répartis autour d'un patio au milieu duquel trone un poele qui réchauffe les corps, une grasse pelouse richement dotée en chaises longues, un jacuzzi, une boulangerie la porte à côté, rien ne manque. L'un dans l'autre, je ne regrette pas mon coup dans l'eau de la matinée. Tout tourne à mon avantage dans un environnement propice aux rencontres amicales sous un soleil qui daigne enfin faire grace d'une apparition prolongée. J'y passe toute l'après-midi et toute la soirée, ne sortant que pour manger un fish and chips, ne daignant toujours pas passer du côté manche de la casserole. Quatorze mois sans faire la cuisine, ça forge certaines habitudes...

J'organise également ce qui sera mon programme des prochains jours.
Mis en bouche par le Tongariro Alpine Crossing, il faut que j'étrenne mes nouvelles chaussures sur un nouveau parcours. Ca tombe bien, Picton est la base idéale pour se frotter au Queen Charlotte Track. Soixante et onze kilomètres à travers collines et forets, voilà qui devrait caresser ma motivation dans le sens du poil!!! Le tout à boucler idéalement en trois jours!!
Pour se faire, il faut réserver un bateau qui convoit les marcheurs jusqu'au point de départ avant de déposer également tout leur équipement superflu pendant la randonnée dans les logements qui ont aussi été reservés en amont. Merci l'organisation!!! Jamais vu un truc pareil!!!! Pas besoin de se coltiner sac de couchage et Cie, le bateau s'en occupe et une fois la journée de marche finie, mon gros sac devrait chaque fois être là à m'attendre sagement!!
J'ai donc mon transport et mon couchage organisés, ne reste plus qu'à prendre des forces, faire le plein d'abricots secs et être sur le qui-vive le lendemain à 8h pour le grand départ. Je suis d'autant plus impatient que la météo promet juré-craché un grand beau temps pour toute la durée de la transumance.


Elle n'a pas menti. Le ciel est d'un bleu azur quand je me meus en direction du port pictonien. Le capitaine attend sourire aux lèvres rendant grâce à cette journée qui s'annonce parfaite. Le contact enclenché, le cap est mis sur Ship Cove, départ à la résonnance historique certaine puisque cette baie tranquille a accueuilli le Capitaine Cook à chacun de ces voyages en terres australes.
Là, la mer est d'un bleu profond développant des teintes plus claires à mesure que l'on se rapproche de la côte. Ca donne envie de piquer une tête mais comme la température de l'eau est plus proche des 10 degrés que des 25, je me garde bien d'attraper une pneumonie.
Environ dix personnes débarquent ici en même temps que moi. Ne recherchant pas à tailler une bavette pendant la marche, je pars d'un pas décidé, d'emblée en pole position. Il est 9h15. Quelques minutes, plus tard je suis rejoint par deux VTTistes que je m'efforce de suivre aussi longtemps que possible. Mon train s'accélère notoirement.

Si on en croit les panneaux explicatifs, en ce premier jour, il faut que j'abattes 27km ce qui devrait me prendre entre six heures trente et neuf heures selon que je me déplace au pas ou au trot. Vue comme c'est parti, il faudra plutôt compter avec la deuxième option.

Les deux premières heures sont essentiellements faites de montées et de descentes. C'est parfait, ça me permet de prendre mes marques. Mon souffle est bon même quand je prends le temps de me goudronner les voies intérieures. Une gorgée, un cliché, un abricot sec (NDLR : dédicace au Roberto).
95% du temps, je suis entouré de toutes parts par la forêt ce qui ne me distrait pas avec des vues surnaturelles sur les fjords, j'accélère.

Le calme règne sauf quand j'avance auquel cas c'est moi qui règne. Je réduis les pauses à la portion congrue. Si je n'ai pas l'impression profonde d'en chier, je continue tête baissée. Une difficulté rencontrée et achevée, je me félicite d'un abricot sec plutôt que de repos. J'avance comme si j'étais en retard.
Les rares personnes que je croises ne sont vites que de vagues souvenirs et me poussent à continuer de plus belle. En effet, si je m'arrête dans les minutes suivant notre rencontre, ils vont me rattraper et je vais encore une fois être obligé de courir pour les re-doubler encore plus rapidement.
Même quand l'horizon se dégage, je m'arrête de courtes secondes pour immortaliser la scène avant de reprendre ma fuite en avant.

Toute la journée, le physique tient bon la barre, tient bon le vent. Hissez haut!! Retailleau!!

Mon seul problème, stupide s'il en est, vient de mes chaussures neuves qui à force de me voir vous en parler pourrait attraper la grosse tête ce qui, en ces termes, serait salvateur. C'est que, quand je m'en suis porté acquéreur, j'étais tellement content et tout s'est passé si vite, que malheureusement, je ne me suis pas rendu compte... qu'elles sont trop petites. Et de beaucoup!!! A l'intérieur, j'ai les orteils tous ratatinés les uns contre les autres. A chaque pas, ceux-ci rentrent un peu plus dans une phase de décroissance comme si ils rentraient dans mon pied à la manière d'une tête de tortue qui se réfugie dans sa carapace au premier danger. Je suis une petite chinoise du XIXème siècle dont les parents seront ravis quand je chausserais du 12 à l'age adulte!!
Plus les kilomètres défilent et plus le repos s'impose, et pas pour épargner mes cuisses mais pour éventer mes doigts de pieds. Un comble!!
Cela dit, le reste du temps, je sers les dents autant que possible pour maintenir mon rythme à 3-4 pas par seconde. Je vole et prends les signes d'encouragement où qu'ils se présentent.
 
Vers 14h, alors que le sol est maintenant plat, je croise tout un groupe qui est parti du même endroit que moi... Mais la veille!!! Alors certes, ils prennent leur temps. Mais moi, ça me donne des ailes. Appelez le Guiness Book, il y a un malade sur la Queen Charlotte!!!!

Physiquement, ça a beau commencer à tirer un peu, à coups d'abricots secs, je garde le pied sur l'accélérateur jusqu'à Punga Cove, mon étape pour la nuit que j'atteints à 15h.
Il y a là une jetée les pieds dans l'eau où, merveille des merveilles, m'attend le gros de mes affaires. Dans un dernier effort, je mets le tout sur mes épaules et grimpe les derniers mètres qui eux, font office de juge de paix. Passer de 3kg sur le dos à 20kg, ça vous achève un Troupe de Marine, même un tenace. Surtout que pour enfin s'alanguir à la Noeline Homestay, il faut encore franchir une batterie de marches inégales propres à réduire à néant tout ce qu'il me reste d'énergie.

En franchissant le portail, je suis accueuilli par le yorkshire de Noeline qui est tout excité de n'avoir pas marcher 27km. Je lui botterais bien le derrière mais Noeline est aussi là à me scruter depuis son balcon/terrasse avec vue sur la mer.
Noeline a 78 ans et tient toute seule cette maison d'hotes. Ca l'occupe six mois par an, synonymes de haute saison. Le reste de l'année, elle la passe à voyager par ces propres moyens à travers le monde. Chapeau bas!!!

La première remarque qu'elle me fait tient du bonheur quand elle apprend que j'ai mis six heures pour rejoindre sa maison et qu'elle m'en félicite. Des randonneurs, elle en voit tous les jours, mais d'après ses dires, ce n'est pas banal quand ils débarquent à pieds en milieu d'après-midi. Ensuite, elle m'invite à m'installer aussi sur son balcon pendant qu'elle va chercher des petits pains briochés maisons ainsi qu'une tasse de thé chaud. Noeline, c'est ma grand-mère par procuration!
Je me délecte du tout en sa compagnie avant qu'elle ne me laisse à mes songes non sans un dernier conseil : "relax". Tu m'étonnes!!!
 
En retournant dans la maison, mamie s'est allongée sur son canapé et a entamé sa sieste.
Moi, je commence par prendre une douche dans sa salle de bain avant de moi aussi m'allonger sur mon lit profitant du fait que pour la première fois depuis que je suis en Nouvelle-Zélande et surement la dernière, j'ai une chambre à moi que je ne suis pas tenu de partager avec des allemands, des canadiens, des suédois, etc.
Un couple devrait arriver plus tard. Bien plus tard. Tellement tard que je ne vois rien venir. Il est 19h quand Noeline frappe à ma porte pour s'enquérir de mon état. Je suis tellement bien comme ça que je la rassure brièvement avant de replonger dans le sommeil. Pour le dîner, on verra plus tard. Demain en l'occurence.


Il est 9h quand j'émerge enfin de ma léthargie, dix-sept heures après son avènement!!! Tu parles d'une nuit de sommeil!!!!
Le couple, lui, est déjà reparti. Je tiens ma carotte qui pourrait aussi être un lapin mécanique juché sur un rail si j'étais un lévrier dans un cinodrome. Peu importe l'heure à laquelle je décolle, il faut que je me les fasses!!

Mais pour l'instant, je prends le temps d'une autre douche et de profiter des viennoiseries locales. Ce n'est qu'à 10h, alerté par Noeline qui m'annonce que le bateau qui acheminera mon sac jusqu'à la prochaine étape ne va plus tarder, que je m'active. Pas question même d'entrevoir, ne serait-ce qu'une fraction de seconde, l'idée d'avoir à porter ma maison sur les 24km de cette nouvelle étape pédestre qui promet d'être plus riche que la précédente en terme de dénivelé positif et négatif.

D'un pas lourd d'avoir à remettre la machine en marche, je salue mon hotesse. A la jeté, je décharge la mule. Au loin, le bateau arrive.
A mon commandement, en avant, marche!!!

Les premières minutes sont une lente remise à niveau. Qui plus est, les difficultés majeures à franchir durant ces trois jours interviennent maintenant. Ca consiste en une ascension d'une quarantaine de minutes suivie d'une deuxième un tantinet plus longue. Pas de quoi affoler les compteur cependant, je suis rodé à l'art de la grimpette. Comme c'est écrit en tête de gondole du blog depuis avant le départ : "pas sportif mais capable de gravir une montagne", même deux fois la même montagne dans la même journée!!
Ces deux mises en bouche ont en fait le mérite de me remettre le pied à l'étrier. Arrivé au dernier sommet, c'est comme si je venais de commencer. Seule la faim me taraude quelque peu mais comme il me reste encore près d'un kilo d'abricots, je ne vais pas me plaindre... C'est un peu redondant comme menu mais c'est bon et ça donne une patate à rendre la dite pomme de terre jalouse.

Au fur et à mesure de ma progression, je recroise les autres marcheurs avec qui je partageais le bateau la veille au matin. Certains sont arrêtés, d'autres avancent mais à un train de sénateur comparé au dragster made in Paname. A chaque fois que j'en double, j'ai envie d'en doubler davantage. Je force l'allure. Rien d'autre ne compte que ma cadence. J'en laisse même le calme environnant de côté en m'équipant de mon Ipod chargé de rythme la marche triomphante.

Au détour d'un virage, un couple. Le couple. Parti avec 90 minutes d'avance, les voilà maintenant avec un passif grandissant à chaque seconde.
En haut de la colline, au niveau de la mer, en haut de la colline, au niveau de la mer. j'enchaîne.

A 13h quand même, je me fends d'une courte halte histoire d'aérer mes orteils contusés. Mais dès que j'entends quelque signe d'activité humaine, je reprends la croisade. Il ne faudrait pas que la tortue se fasse des idées sur le lièvre. Il est gentil La Fontaine mais quand même...

C'est à 15h45 que je quitte le sentier. Portage, ma ville étape, mérite presque cette dénomination. C'est un petit bourg en contrebas du Queen Charlotte Track, les pieds dans l'eau, que l'on rejoint après un dernier kilomètre le long du route goudronnée. A ce stade, j'en ai enfin plein les baskets, pour un peu, je ferais une pause. Mais non.  

Ma GH n'est plus une maison d'hôte. A 16h, je valide mon arrivée et on m'indique mon lit.
Apprenant des mes erreurs passées, je défie la gravité et reste debout pour aller le plus vite possible dégoter un restaurant bon marché. Mais à Portage, il n'y a pas grand choix. Une micro-supérette qui n'a rien de super et un bar-restaurant, voilà tout. A l'épicerie plus que fine, j'achète deux litres de jus de fruits. Au restaurant, je demande le menu. Abassourdi par les prix, je fais le choix d'une raisonnable pizza au saumon, ceux-ci étant parait-il fameux. Mais par un concours de circonstance, j'arrive à arracher à la bouche du serveur que la pizza est surgelée. Non merci. Quoi d'autre? N'ayant pas manger de repas chaud depuis 48h, j'en viens alors à craquer.

- "Apportez moi donc un T-bone steak saignant, sa purée et ses légumes, s'il vous plait. Je pense que ça fera l'affaire!!"

Cinq minutes chronos plus tard, l'assiette arrive. La barbaque, je la dévore, d'où qu'elle vienne. Seulement, la purée n'est pas une purée mais une salade de pomme de terre froide et les légumes sont tellement gelés qu'ils sont presques encore tous durs d'avoir tout juste été sortis du congélateur qui apparemment tourne à plein régime. C'est sans doute le repas le plus onéreux que je m'offre depuis que j'ai quitté la gastronomique terre gauloise et j'ai autant de talent de cuisinier que celui qui à préparer cette insulte. La prochaine fois, je m'en tiendrais à mes fidèles abricots secs!!!!

Sitôt l'addition payé, je retourne à la GH. Mes muscles bien reffroidis ne me portent plus qu'à peine. Chaque mètre est une gageure, chaque pas douleur. Le couple qui doit une nouvelle fois dormir sous le même toit n'a toujours pas pointé. Je sens qu'ils ne vont encore pas voir ma trombine ce soir.

A 18h, je ferme les mirettes. A 18h02, il n'y a plus personne. Extinction des feux, dépressurisation de la cabine.


Debout à 9h30, je m'étonne encore de ma capacité à faire le tour du cadran après une nouvelle nuit longue de plus de quinze heures!!
En quittant le dortoir que j'ai partagé avec un attardé pas entendu lors de son installation, je tombe sur LE couple qui prend le petit déjeuner. Ils sont assis là tranquilles, apparemment pas presser d'en découdre avec les 21 derniers kilomètres, une broutille. En discutant, ils m'apprennent en fait qu'aujourd'hui, ils font l'impasse du moindre effort. Ils se sont votés une journée de repos. Tant pis pour la carotte... Il y en aura surement d'autres.

La mise en action est encore un peu plus laborieuse que la précédente. Après cinq kilomètres, je suis aussi souvent la tête en l'air que le pied au plancher. C'est que mes Adidas n'ont pas eu une poussée de croissance dans la nuit et que la foudre petit à petit s'effrite. Et puis vingt-et-un kilomètres quand cinquante ont déjà été parcourus en deux jours, comme la cerise sur le gateau, c'est un détail de l'histoire.

A mi-parcours, profitant d'un point de vue splendide depuis un promontoire rocheux auquel on a généreusement ajouté une table et deux bancs, je lambine. Deux gars arrivent en sens inverse, on discute. Dans le même temps, un autre couple qui ne répond même pas à un bonjour poli passe sans se retourner dans ma direction. La voilà ma carotte géante!!! Deux malotrus!!!!
Je finis quand même ma cigarette pour leur laisser une chance, salue mes potes épisodiques et remonte sur mes grands chevaux. Ce sont les derniers dix bornes. Même si je me crame, ce n'est pas un souci. Ensuite, ce n'est plus que bateau et GH avec chaises longues et jacuzzi.
J'accélère. Je double mais jamais les rustrots. Il semblerait que eux aussi soient déterminés. J'accélère. A chaque petite descente, je cours. Quand c'est sur du plat que je vole, j'alterne trotinette et pas cadensés. Un panneau indique cinq kilomètres, toujours rien. Si j'accélère encore, c'est pour courir franco de porc, mais non, je m'en préserve si on peut dire qu'il y a encore quelque chose à préserver.

A trois kilomètres environs du drapeau à damier, au détour d'une ligne droite, je les aperçois à une centaines de mètres devant. Arghhhh!! Par le pouvoir du crane ancestral, je détiens la force toute puissaaaante!! Ils sont à ma merci ce que je me garderais bien de leur dire quand enfin, ça y est, les allemands, car c'en sont, m'ont sur les talons. Effectivement, eux aussi ils cavalent. Pas assez, mais ils cavalent.

A deux kilomètres enfin, je prends l'aspiration et déboite. La foule agite les fanions aux couleurs de mon écurie. Une clameur emplit les tribunes bondées. Je double sans une invitation au sourire.

Jusqu'au bout, je n'ai de cesse que de penser à les distancer. Ils sont ma nouvelle Mme Lomière de triste mémoire!!!

Je passe sous la flamme indiquant le dernier kilomètre. La cloche retentit.

A 15h, j'en termine victorieux. D'autres randonneurs sont déjà là quand même mais ça n'a pas grande importance. Les tireurs de tronche ont perdu. Ca m'a tellement requinqué que je pourrais repartir pour vingt bornes supplémentaires!!

Je passe la demie-heure qui suit allongé sur une pelouse devant la mer à attendre le taxi flottant. A son bord, je regarde défiler les montagnes sur lesquels, tel le dahut, je construis la légende. Une légende qui se démystifie vite.

Dès le retour à la GH, le marcheur a fait son temps. Je suis en mode maison de retraite. Une fois retrouvé un transat orienté fasse au soleil, je n'en bouge plus que pour accepter une bière qu'un joyeux groupe m'offre de bon coeur avant de reprendre la position semi-couchée.

Queen Charlotte a laissé quelques traces. De bonheur. Je souris.
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13 décembre 2009 7 13 /12 /décembre /2009 18:35
Je n'peux presque pas marcher.
La s'melle presque pas décoller.
Hier j'ai trop gambader,
Alors je boite.

Pas grand chose à faire en cette journée clopin-clopante où malgré mes sensations victorieuses de la veille quand je toisais le Mont Doom, je suis encore à sa merci aujourd'hui. Frodon avait raison, peut-être aurais-je dû rester dans la Comté.

Attendez. Qu'est ce qui m'arrive? On reprend.

J'ai beau avoir les cuisses qui tirent la tronche, mentalement, je suis sur mon 31. Le Mont Doom a vu à qui il avait à faire, à deux reprises qu'il s'est couché devant son maître. Pas fiérot le Mont Doom d'avoir été dressé comme un tigre de piste aux étoiles, montrant les dents pour épater le public avide de sensations fortes mais docile comme un caniche une fois les cartes "famille nombreuse" rentrées chez elles.
Il en a pris tellement plein la pente le Mont Doom que s'il me prenait d'y retourner ce jour, je l'imagine bien s'aplatir pour me voir repartir plus vite. En fait, c'est le soulagement qui doit prévaloir dans sa tête rocailleuse de me voir prendre le bus pour Wellington à six heures de route.

C'est mieux...

Arrivé à Wellington, en comparaison avec les tailles modestes de Roturua et de Taupo, c'est le retour à la civilisation. Enfin une ville où toutes les enseignes ne sont pas que Mc Do' et Pizza Hut. Enfin une ville où on compte plus de deux piétons par rue.
Ma première sensation en laissant le bus derrière moi n'est qu'une confirmation du surnom de Wellington, "Windy Welli'", qu'on pourrait traduire par Welli' la venteuse. De derrière les vitres, impossible d'en prendre la pleine mesure mais dès qu'on se retrouve de l'autre côté en proie aux rafales, je suis un cerf-volant luttant comme un fou lorsque, mon barda sur mes épaules, celles-ci arrivent en sens contraire. A Wellington, tout le monde est un M. Jackson en puissance,  il suffit de se tenir droit face au vent et de se pencher en avant. Pour un peu, la gravité n'a tellement plus d'importance que je pourrais toucher le bitume du bout du nez pour remonter en laissant le vent s'engouffrer sous mon corps en suspension. Mais n'essayons pas, j'ai promis à ma grand-mère d'en finir avec les chutes qui mettent en danger un physique héritier d'une longue lignée de poitevins charpentés.
A la place, je me contente de me rendre à ma nouvelle maison éphémère, une GH située non loin de la mer, non loin des collines, non loin du centre, emplacement parfait.

Il est 20h et le soleil est encore assez haut dans le ciel austral. Personnellement, je laisse les autres en profiter. Après une nouvelle mission de type supermarché, je m'équipe de l'équipement complet du dévoreur de sandwishes trop feignant pour faire cuire des pates.
Ne laissant aucune chance aux ingrédients d'entrevoir la date de péremption, je me remplis la panse avant de laisser le lendemain surgir au matin d'une nuit au sommeil lourd comme ma démarche encore marquée des stigmates de la veille.


J'ouvre les yeux, c'est l'évidence, je n'ai pas besoin de regarder la montre que je n'ai pas pour me rendre compte que marler de matinée est à la limite du galvaudage voire du foutage de gueule. A l'extérieur, le temps est idéal quand on est un escargot pas une marmotte. Il pleut et j'ai la motivation qui bat de l'aile.
Ma seule préoccupation en terme d'activité : le remplacement de ce que je ne peux déjà plus appeler mes chaussures tant elles font de la peine et tant j'ai presque honte de sortir avec.
Ne m'équipant que de courage plutôt que de dignité, je quitte alors mon refuge pour me tremper les chaussettes une dernière fois. Quelle veine que tout soit trempé!! A la limite, j'aurais eu plus vite fait de sortir pieds nus, c'eut été aussi efficace en terme d'étanchéité.
J'entre dans une première boutique. En bon client exigeant, rien ne me correspond. Il faut comprendre quand même que ne faisant des achats qu'à l'extrème limite du nécessaire, mon choix a tout intéret à être le bon au risque de devoir user jusqu'à la corde pendant de longues années un vêtement que je porte mais pas dans mon coeur, ou au contraire au risque que ce, par exemple, pantalon en velour côtelé ne voit jamais la couleur du jour au contact de mon fessier soyeux.
Ces derniers temps, en guise de botillots, rien ne me va plus que des adodos. Ce sera ça ou rien, sachant que rien, ça veut bien dire ce que ça veut dire quand je regarde les loques dans lesquelles je me déplace.
Une deuxième boutique. Toujours pas.
Une troisième boutique. Banco!!

A ce stade, mes chaussettes, même si elles sont propres du jour ou de la veille, ont de chatoyants reflets de serpillères. Leur couleur blanche à l'état sec a viré au gris trottoir, j'ai de la peine pour la jeune femme qui se propose de m'aider.
En cinq minutes, pas une de plus, l'affaire est dans le sac, plus une expression tout court qu'une expression de la réalité, mes anciennes souillures étant restées au magasin qui n'a pas fait une affaire et mes nouvelles chaussures rutilantes rendant grace à mon pas délié trop heureux de rester au sec!

De retour de croisade dépensière, alors que je m'efforce de faire rétrécir mon stock de pain en tranches à défaut de baguette pas trop cuite, je rencontre Ram, un brésilien au sourire tellement facile que j'accélèrerais bien le cours du temps pour rentrer au pays du carnaval un peu plus vite. On s'entend tout de suite. Les vannes fusent. On croirait qu'on se connait depuis dix ans.
La fin d'après-midi détale à toute vitesse. La soirée idem. Le fait d'être à Wellington étant dand le cas présent un facteur "aggravant" en ce sens que, comme dans toutes les villes néo-zélandaises, la proportion de bar par habitants laisserait même la Belgique loin derrière. On a beau les enchaîner, il y en a toujours un autre quelques mètres plus loin pour nous interdire de faire demi-tour. C'est qu'il faut profiter de chaque instant d'autant plus que Ram a 24h d'avance sur moi et quitte la capitale dès le matin suivant, le bateau pour rejoindre l'île du sud n'attendant pas.
Sa réservation a beau être à 8h30 du matin, ça ne nous empêche pas de rentrer tanguant à 3h. Insouciance, insouciance... Provisoire pour lui, plus durable pour bibi.

Nos aux-revoir sont aussi chaleureux que nos bonjours. Il y a de grandes chances que nos chemins se recroisent dans les semaines qui viennent donc les adieux restent dans les cartons. Je ne peux juste pas m'empêcher de lui souhaiter bonne chance pour le réveil tant celui-ci promet de ne pas valoir son déplacement. Il devrait proroger, voilà ce que j'en pense.


Mais, le lendemain, quand j'émerge et décolle ma tête marquée au fer blanc par l'oreiller, renseignement pris à la réception, Ram a levé le camp, chapeau bas!!
En ce qui me concerne, cette journée de dimanche, car c'est dimanche, a pour vocation d'être ma seule journée de découverte intensive d'autre chose que des bars qui jonchent les rues.
Je me convaincs qu'il serait souhaitable pour ne pas dire nécessaire que je me bouge la couenne. Pour commencer, depuis ma fenêtre de dortoir perchée au deuxième étage, j'aperçois une église juchée sur une colline dont la vue devrait valoir son pesant de crapahute. Je suis parti.
Je me rend alors vite compte qu'aujourd'hui, comme quasiment partout en terre kiwi, j'ai bien fait de ne pas louer de vélo. Tout n'est que montées et descentes qui feraient passer la Butte Montmartre pour la dernière des bosses. Comme je traîne avec moi les valises que j'ai bues la veille, le simple fait de prendre le bus n°11, mes deux jambes, est assez hardu comme ça pour ne pas en rajouter.
Arrivé sur le perron de l'église, j'ai chaud, je transpire, je me callerais bien quelques tartines.
Seulement, en faisant le tour de la sainte batisse, un panneau indiquant "Mount Victoria" s'interpose. De mémoire, je me souviens avoir lu dans le LP que le Mount Victoria offrait les meilleures vues possibles sur la région toute entière. N'écoutant que mon courage et négligeant la faim, je ne peux me contraindre à oublier l'information. Les nuages ont beau recouvrir têtes et couvre-chefs quand ceux-ci ne prennent pas vie emportés par les embruns, il en faudrait plus pour me décourager. En trente minutes de grimpette exclusive, je peux enfin profiter de la carotte qui m'a tiré jusque là, la vue est effectivement un balcon ouvert suffisamment largement sur les environs pour que je n'ai pas à regretter mon choix. Pendant cinq minutes. La pluie remet le couvert. Même pas le temps d'en griller une...

Comme je suis parti pas autrement qu'en T-shirt, c'est quatre à quatre que je fais défiler les mètres qui me séparent d'un toit et d'un imperméable prenant garde au passage à ne pas me retrouver les quatre fers en l'air, le chemin se transformant en une joviale patinoire à mesure que l'humidité épouse les graviers et autres étendues terreuses.

De retour précoce à la GH, je coule. Si je me croisais, je me donnerais une pièce pour avoir bonne conscience.
En attendant que déluge se fasse, je m'active à me sécher avant de poursuivre mon travail d'éradication du pain en tranches. Une heure plus tard, rien y a fait, c'est toujours la fête à la grenouille qui n'étant pas mes muses, me poussent au musée. J'y reste une heure de plus, dehors rien à changé.

Slalomant entre les flaques, j'échoue pour de bon dans la GH en me jurant que la prochaine fois que je mets le nez dehors, c'est pour quitter cette terre faîte d'intempéries. A la réception, je réserve, comme Ram la veille, un billet de bateau de bon heure et de bonne humeur pour Picton, débarcadère en chef de l'île du sud.

D'ici là, je m'installe sur mon clavier, comme une évidence...



PS : Les photos sont en pause depuis que le temps qui passe a enfin eu raison du cable reliant mon Archos à l'ordinateur. Jusqu'à l'arrivée imminente aux USA et les retrouvailles avec Madro, le MP3 est donc inutilisable. Sans rancune...
Sans rancune d'autant que j'ai oublié de te dire dans l'article sur le Tongariro Alpine Crossing que à force de me fendre le crane à dévaler les montagnes autant sur les pieds que sur les fesses, l'écran jusque là tactile du dit Archos est fendu en de nombreux endroits sur toute la longueur rendant caduque cette fonction pourtant hautement appréciable.
Comme un ouragan, qu'est passé sur moi, les pierres ont tout emporté.

PPS : Si Adidas, Archos ou Panasonic sont branchés sur A Fleur De Terre, les dons en nature sont toujours les bienvenus.
 
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7 décembre 2009 1 07 /12 /décembre /2009 13:21
On va voler, sous une voile et sous un bombardier.
On va voler et puis sauter d'très haut.
En s'assurant qu'c'est pas un sac à dos,
Que j'ai dans le dos!!

Revigoré par une nuit de plume, je salue Roturua.
Mes jambes sont encore sous le coup des franchissements de cols de la veille mais ça pourrait être pire. Aujourd'hui, l'étape n'a pas lieu sur la selle mais au sein de la caravane. En bus, je ne crains rien. En trois heures de trajet, les moutons ne se comptent plus. Entre les collines, derrière les fils barbelés servant à canaliser cette vermine à poils laineux, ils paissent tranquillement, tous fraichements tondus, signe que l'été approche.
Seulement pour l'instant l'été n'est qu'une notion fantasmagorique. Sûr que les méchouis sur pattes auraient bien besoin de leur manteau d'hiver pour se protéger du vent qui souffle en provenance directe des quarantièmes rugissants et de la pluie glaciale qui noie les collines derrière un rideau flouté signe que ça barde à l'extérieur.
Moi qui me trouve à l'abri, je ne m'en porte pas plus mal, mais pour ce qui est du saut en parachute, ça sent la déconvenue.

Débarqué à Taupo, rien a changé. Une pauvre centaine de mètres me sépare de ma nouvelle pension et c'est déjà assez pour que j'ai besoin de courir derrière ma casquette qui refuse de rester en position géostationnaire sur ma tête préférant s'envoler au gré des bourrasques.
La GH est très accueuillante. Tout s'y passe au premier étage à l'exception de l'espèce de petite piscine chauffée qui n'a pas grand intéret quand il suffit de mettre le nez à la fenêtre pour être mouillé. Il y a un grand salon à côté d'une cuisine, les deux donnant sur une terrasse panoramique avec une vue imprenable sur le lac. Avec un minimum d'imagination, je suppose qu'il doit y faire bon vivre quand le soleil est de la partie.
En attendant, le plus grand lac de Nouvelle-Zélande me nargue. Je ne trouve rien de mieux à faire que de ne rien faire, dans ces conditions, la contre-attaque est vaine.

Le lendemain, comme le chante l'Antéchrist, c'est la même chanson. Il pleut, il mouille, c'est la fête à la grenouille. Pour la deuxième fois de suite, je suis bloqué dans ma retraite dorée sans possibilité de déployer mes ailes comme il conviendrait de le faire si la météo était plus favorable aux cigales.
Seulement, en allant faire un tour non pas dehors mais sur internet, tous les sîtes météorologiques sont unanimes : entre aujourd'hui et demain, le baromètre va faire le grand écart au risque de se craquer les adducteurs, le soleil arrive, pour 24 heures... C'est déjà ça...

Il convient alors de s'interroger sur la marche à suivre. S'il ne devait y avoir qu'une décision à prendre, quelle serait-elle?
La chute libre, certes c'est tentant. Mais on est en Nouvelle-Zélande et le moins que l'on puisse en dire, c'est que le pays n'est pas radin en opportunité de s'envoyer en l'air. Si ce n'est pas demain, La Palice ne me contredira pas lorsque je dis que c'est pour un autre jour.
Que nous reste-t-il donc d'unique en ces lieux immédiats?
Une visite à la réception prodigue en renseignements aura vite fait de m'ouvrir les yeux.

A quelques kilomètres de l'autre côté du lac de Taupo s'effectue un des treks les plus fameux de Nouvelle-Zélande : le Rongariro Alpine Crossing. Celui-ci s'effectuant en plus en une journée, c'est comme si la providence s'invitait à table. Je fais alors le tour de tous les touristes que la pluie a rendus sédentaires et leur demande s'ils ont déjà foulé le trek du pied. Les réponses positives ne se font pas attendre, c'est un plébiscite en faveur du "oui".
Aussi sec, inversement au temps qui ne s'est guère arrangé, je retourne assiéger la réception ayant remplacé les questions par des certitudes. Demain, quoi qu'il arrive, je rechausse mes bottes de sept lieues et m'attaque à la terre kiwi en version pentue.

A priori, la marche ne représente pas de difficultés particulières. Il suffit de s'acquitter de 18km, facile pour un jeudi.
Seule épine dans le pied de ce programme finement huilé, une navette passera m'intercepter à la GH à 5h40 du matin, véritable crime de guerre en temps de paix. Mais qu'importe, Tongariro, prépare tes obstacles, je radine!!

Sûr de mes capacités, je me couche vers 1h du matin après avoir partager quelques rasades avec d'autres locataires. Avant de poser la tête sur l'oreiller, je fais un rapide détour par la terrasse qui m'assure enfin que le ciel est partiellement dégagé, des centaines d'étoiles m'en étant témoins.


A 5h15, le réveil sonne. Dans ces cas-là, comme je dors en dortoir, la meilleure des choses à faire est encore de se lever le plus vite possible et de quitter la chambre pour n'y revenir que bien plus tard afin de ne pas faire profiter outre-mesure à mes colocataires du non-sens que de se lever avec le soleil.
La douche saura donc attendre mon retour. A la place, je m'active à préparer quelques sandwishes qui devront me tenir d'attaque tout au long du parcours. Ceux-ci s'accompagnent intelligemment d'abricots secs, parfait remède contre les coups de mou et d'une bouteille d'eau.

A 5h40 sonnantes et trébuchantes, le minibus est là, je suis loin d'être seul. A l'intérieur, toutes les places sont occupés sauf une, la mienne. Je m'installe et maintiens la pression en écoutant de la musique plutôt que de retomber dans des abysses somnolentes qui ne feraient pas bon effet à l'heure de se dégourdir les jambes. En arrivant, le chauffeur prend la parole pour prévenir la foule des marcheurs que le dernier transport retournant à Taupo partira de la fin du parcours à 16h30 que tout le monde soit là ou pas. Personnellement, n'ayant pas particulièrement envie de me lancer dans ces 60km là en usant mes semelles, j'en prends bonne note.

A 7h, en ce qui concerne le bus, le frein à main est bloqué; en ce qui me concerne, les vitesses de la première à la cinquième sont enclenchés. C'est qu'il n'y a pas qu'un minibus pour déverser son flot de marcheurs patentés. Au moment de poser le pied au sol, une file indienne de centaines de personnes est déjà formée, serpentant lentement jusque dans les hauteurs.
Je tombe des nues. Certes c'est la première fois qu'il ne pleut pas depuis des jours, certes le sentier est particulièrement réputé jusqu'à être qualifié "d'une des meilleures marches d'une journée au monde" par le LP et toutes les brochures détaillant l'itinéraire, mais bon, ce n'est pas une raison... Pourquoi faut-il que tous les Kway de la terre se soient donnés rendez-vous aujourd'hui me remplissant les oreilles de couinements résultant des frottements entre les bras et le corps de ceux qui les portent???
Quand je marche autrement que pour aller faire les courses, j'ai envie de communion avec la nature, envie d'entendre le chant des oiseaux, pas l'accent allemand.
Schnell!! Schnell!!
Ne reste plus qu'à doubler un à un tous ces pique-assiettes de l'effort. Même si je dois me bruler les ailes dans les premiers kilomètres en marchant plus vite que la raison ne voudrait l'indiquer, je me dois de les laisser derrière moi coute que coute!! Que l'esprit de Békélé m'emplisse, en avant!!!

Les premiers bornes sont plats et sans difficultés majeures. Si je dois laisser derrière moi les promeneurs du jeudi, il faut que j'en mette un coup d'entrée. Au lieu de faire des petits pas, j'avance à grandes enjambées; au lieu de marcher, je trotine ne perdant que de rares secondes à faire quelques clichés quand même car j'ai oublié de vous dire que partout autour c'est volcagnifique!

Au terme de cette première presque ligne droite et plate, l'objectif est partiellement atteint. J'ai beau avoir doublé des compagnies entières, il y en a toujours plus devant! Les flaneurs se sont donnés le mot pour coloniser la montagne!!! Heureusement quand même qu'il reste les marches optionnelles dont ceux-ci ne daignent pas se surcharger.
La première prend une petite demie-heure aller-retour vers une cascade de taille correcte. Le sol pour l'atteindre est gonflé d'une eau qui coule sans lit propre. Ca patauge, ça boit par en dessous dans mes Adodos achetées 5$ à Pékin et dont j'espère qu'elles dureront au moins jusqu'aux Etats-Unis même si elles sont déjà dans un état encore plus lamentable que mes originales laissées précédemment en Chine.

De retour sur le chemin principal, en plus de faire des bruits d'éponge qu'on essore à chaque pas, je retrouve les visages de ceux que j'avais laissés sur le carreau voilà trente minutes. Donc, deuxième manche. On prend les mêmes et on recommence, je me remets la tête dans le guidon (au figuré, merci bien Ronan).
Là, je profite de la première difficulté de la journée pour remonter au classement. Ce sont les "devils staircase" que l'on pourrait traduire par escalier du diable, rien que ça!! Et sur cet escalier, quand on porte des adodos de 300g et qu'on a l'oeil du tigre, ceux qui portent de vrais chaussures de marches de plusieurs kilos ne voient que vos fesses pendant quelques secondes avant que vous ne soyez plus pour eux qu'un vague souvenir. Dans la montée, je détale tel Bip-Bip fuyant les coyotes.
J'ai beau être le nez dans les nuages et, par endroits, ne pas voir ou presque où je mets les pieds, je cavale tant et plus.

Une fois les escaliers derrière moi, il est temps que vous sachiez.
Depuis le début du trek, sur la droite se dresse le Mont Ngauruhoe, un volcan splendide parfaitement symétrique que les fans de septième art sauront reconnaître puisqu'il a servi la trilogie du Seigneur des Anneaux comme décor pour représenter le Mont Doom.
C'est l'itinéraire bis par excellence! Impossible de ne pas s'y frotter, si Frodon doit y jeter l'Anneau, je dois m'y jeter aussi!!!!!!!!
Cependant ce n'est pas chose aisée, du moins si on en croit la brochure qu'on nous a donnée dans le bus :

"Il n'y a pas de sentier délimité pour gravir la montagne, donc l'ascension ne doit être tentée que si le temps est totalement clair et si le vent n'est pas trop fort. Cette marche optionnelle est extrèmement difficile et ne doit être hasardée que par ceux qui ont trouvé le "devils staircase" facile et qui, en plus, ne souffrent pas de vertige. La montée devrait vous prendre deux heures alors que la descente s'effectue en 30 minutes.
Si au milieu de votre effort, vous sentez que c'est trop difficile ou trop long, faîtes demi-tour et redescendez, vous ne devez pas rater le bus de 16h30. Vous aurez aussi besoin de chaussures montantes qui vous tiennent la cheville afin de vous protéger contre les roches aiguisées. Si vous ne suivez pas ce conseil, vous pourriez vous retrouver en sérieux danger.
Les chutes de roches conjuguées à une mal chausse sont un risque sérieux. La prudence est recommendée."

Voilà pour la mise en bouche couchée sur papier.
Inutile de vous dire qu'avec le vent qu'il fait et mes ersatzs de chaussures de salle ne caressant mes chevilles que du regard, c'est du tout cuit!! Et puis, dans le livre comme dans le film, Frodon il fait ça pieds nus, alors!!!

J'abandonne le sentier principal. Au dessus de moi sur la pente abrupte du volcan, deux autres varappeurs, pas plus grands que des têtes d'épingles, me servent de points de repères.

Par terre, la surface est sablonneuse. Dès que la grimpette commence, comme aux plus grandes heures des dunes égyptiennes, chaque fois que je fais un pas, celui-ci rétrécit charriant le sable qui me supporte. Le millier de mètres de dénivelé qui me sépare du cratère n'est plus qu'une notion abstraite. Afin de me faciliter un tant soit peu la tache, la meilleure méthode consiste à trouver des rochers à escalader, un sol acéré mais solide valant mieux qu'un sol mou et fuyant.
Cette phase dure une heure pendant laquelle je m'astreins à quelques pauses. Comme tout se fait en montée, il n'y a pas de plat ou de descente pour se reposer les cuisses. De plus, l'inclinaison changeant sans cesse, il est la plupart du temps impossible de voir le sommet ce qui permettrait au moins de se faire une idée de la distance restant à parcourir.

A mi-hauteur, le sable n'est plus, dommage...
Pour le remplacer, ce sont des cailloux de tailles variables qui se mettent en travers de la bonne marche des évènements. Ce pourrait être une bonne nouvelle mais non. Ce sont des roches volcaniques presque aussi légères que de la pierre ponce. Elles ne sont en aucun cas soudées à la paroi entrainant glissades et pertes d'équilibre à tire larigot.
Quand je glisse ici, la déclivité est telle que je pourrais aussi bien dévaler jusqu'en bas sans autre forme de procès. Qui plus est, avec mes chaussons de danse, les pierres que j'emporte avec moi me massent les chevilles comme le ferait un marteau piqueur. Tout est affaire de contrepoids et de stabilité ce qui ne suffit, malgré tout jamais, me forçant aussi à m'égratigner la paume des mains quand je dois me raccrocher comme je peux à un bout de montagne qui traine plutot qu'à un bout de caillou qui détale.
Logiquement, les pauses se multiplient encore quand c'est encore possible.
Heureusement quand même que plus je progresse et plus je me rapproche de mes compères partis plus tôt qui ont déjà atteint le sommet. Car, il est là, droit devant à m'aimanter.

L'ultime effort arrive.
A mesure que la crête se rapproche, comme si cela ne suffisait pas, la glace fait son apparition!!! Pauvre de moi!!!
Cela dit aussi plus les distances se resserrent et plus lorsque la roche affleure sur quelques centimètres carrés, je peux m'y appuyer sans craintes, encore que. La pente est plus vertigineuse que jamais, le vent l'épouse dans des noces extravagantes.
A un moment, je suis coincé à quatre pattes sur mes appuis. Dès que je bouge le moindre muscle, la terre se dérobe caillou par caillou sachant que lorsque tous auront foutu le camp, la gravité fera son travail et m'envoyera valser des dizaines de mètres plus bas dans le meilleur des cas, dans des conditions que je ne préfère même pas imaginer. La trouille gagne du terrain. Quelques contorsions plus tard, je m'en sors quasi miraculeusement.

Ne reste que quelques mètres. Je touche la cime du doigt. C'est une image, tant pis. Encore un petit effort.
Je n'ai plus d'autre alternative que celle de visiter le pan glacé. Ce n'est pas que ça me fait plaisir mais tout le pourtour du cratère en est recouvert. La glace est dure et, pour bien faire, glissante comme une patinoire. Ca tombe d'autant mieux qu'à cause du vent polaire je ne sens déjà plus mes doigts.
Intégralement en rampant, je parachève le tour de force.
Derrière moi, la pente menace de m'avaler à chaque seconde.
Devant moi, le cratère est encore pire. Ca tombe à pic sur des dizaines de mètres sans qu'au fond il n'y ait la moindre possibilité d'en sortir. C'est stagne ou crève, le tout dans des rafales qui doivent dépasser les 100km/h, sachant que c'est difficile à dire dans ces conditions, sachant en plus que je n'ai pas un anémomètre caché dans le derrière!!!

Pour bien faire, il faut que je me décale d'une dizaine de mètres à droite vers la seule zone solide du périmètre qui ne doit pas faire plus de 2m².
Complètement à plat ventre, je me contortionne, tenant dans mes mains le pourtour de la couronne glacée, voisine directe de la chute potentiellement dantesque décrite plus haut. Si je fais une traction, c'est le grand saut. Si je lache, le vent me ramène dans la vallée. Je ne suis alors concentré que sur mes prises quand je ne "pleure" pas la sensibilité de mes mains désormais disparue. Puis, c'est la libération momentanée. Je suis assis à mi-chemin des deux précipices, les fesses, les pieds et les mains ancrés comme ils peuvent. La vue est à couper le souffle, le sifflet et le reste aussi. Je domine une mer de nuage à tel point que j'ai l'impression d'être en avion avec la climatisation boostée au nucléaire. Par endroit, des trouées permettent de distinguer lacs et vallées. A 150km à l'ouest, la canopée enneigée du Mont Taranaki me fait de l'oeil. Seulement, le temps d'en profiter est réduit au minimum.
La première des priorités est alors de me réchauffer les mains.
Les poches? Non, trop fines.
La seule solution est d'enfiler mes mains dans mon caleçon, dernier endroit gardant ma chaleur corporelle. Les orphelines peuvent bien partager leur pré carré, ce n'est pas un exercice, c'est une procédure d'urgence!!!
Ensuite, il faut encore faire un film. Cependant, impossible de tourner sur moi-même, c'est un coup à tourner un snuff movie!! Peinant ne serait-ce que pour trouver les boutons au toucher, je m'acquitte de ma tache tant bien que mal.

Je suis alors rejoint par deux israëliens. Les gars sont équipés comme au pole, la preuve, ils ont des gants les salauds!! A leur arrivée, tout le monde se congratule, se les gèle, redescend quelques mètres plus bas, le cul dans la glace à la merci des bourrasques, se mettre à l'abri autant que possible derrière un rocher paravent.
Là, on continue les réjouissances par une cigarette que je ne peux même pas allumer moi-même, les doigts trop engourdis avant de prendre les dernières photos avant la descente qui s'annonce au moins aussi rock n'roll que la montée.
Avant de repartir, je me souviens encore du Mont Merapi dont la retour m'avait bien rapé de partout.
Ici, compte tenu de l'aller, j'ai mal d'avance...

Mes mains ne sont plus au sein des saintes. Si je marche les mains coincées dans le futal, ça équivaudrait à marcher sur un fil les yeux bandés. Non merci, peut-être une autre fois. Sécurité avant tout.
Mes paluches servent autrement mieux en étant rivées au sol à s'accrocher à tout ce qui passe. Car un exercice de voltige se joue. Que je le veuille ou non, plutôt non, je ne peux éviter d'être entraîné en aval plus vite que la musique que j'aimerais être une musique de chambre. Mes pieds glissent à tout va. Sous mes semelles, j'entraine avec moi des bouts de montagne. C'est d'autant plus emmerdant que dans l'autre sens, des dizaines de grimpeurs prennent part à l'ascension et que si l'un d'entre eux vient à embrasser un caillou dont j'aurais provoqué la chute, je ne vous raconte pas la tuile, la tache d'huile sur la toile!!
Dans le même temps, ce sont mes chevilles qui entament des ébats passionnés avec les Rolling Stone. Ca fait un mal de chien mais l'important est que je me rapproche du bout du toboggan incontrolable puisque le sable me tend les bras.

En l'atteignant, je dévalle, c'est comme descendre une dune.
Fatigué quand même par l'exercice et me rendant compte que j'ai fait le plein d'avance par rapport à tous ceux qui grimpent dans la direction opposée, je me vote une première pause sur le chemin du retour. Un gros rocher bien confortable par rapport à ma situation quelques trentes minutes plus tôt me sert de banc. Comme un bonheur ne vient jamais seul, la chape de nuage laisse maintenant filtrer les rayons solaires. Le thermomètre s'excite, j'enlève des couches.
C'est également le moment idéal pour immortaliser sur carte mémoire le paysage d'en face que je domine toujours malgré mes dégringolades. L'appareil photo. Il est où? Dans les poches de mon jean? Rien. De mon blouson? Rien. Dans mon sac? Bordel, c'est pas possible!!!!!!!!!!!!!
Je vide le satané sac de tout son contenu. Que dalle, zénèb, prout... Rien de rien...
J'enlève tout et me retrouve torse nu, l'ensemble de mon équipement répandu à terre.
L'appareil photo toujours invisible. La dépression me guette, la malédiction a encore frappé, encore plus précoce que d'habitude puisque ce dernier Lumix n'a qu'un peu plus d'une semaine!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! Un flot d'insanités roule alors sur la montagne, sur la Nouvelle-Zélande toute entière!!!!!! Tout le vocabulaire injurieux y passe, l'auto-flagellation est à son paroxisme, la crise de nerfs est proche.

Alors, comme on se relève après avoir été mis KO par Mike Tyson, on remarque deux catégories de personnes : celles qui raccrochent les gants aussi sec et celles qui n'ont qu'une envie, remettre ça.
Cet enfoiré d'appareil, et je pèse mes mots, doit être quelque part entre le sommet et ici. Avec un peu de chance (beaucoup de chance?), soit je parviens à remettre la main dessus en chemin vers le cratère, soit quelqu'un d'autre finira bien par le retrouver. La seule solution qui s'offre à moi si je ne veux pas m'écraser sciemment la tête contre Mount Doom (NDLR : le "Mont Malédiction" en anglais), remettre mon bleu de travail et repartir une deuxième fois à l'assault du volcan, cette saloperie de volcan!!!

Mon blouson de retour sur mon dos, je tourne les talons. Connaissant maintenant la difficulté, je me jète à corps perdu dans cette folie ascensionnelle. Les seules interruptions que je m'accorde ne sont que lorsque je croise à présent les personnes qui avaient du retard sur moi et qui comptent maintenant deux heures d'avance étant donné qu'elles descendent et que j'ai les trois quarts du volcan à gravir!! A chaque fois, je les interpèle sans coup férir.

- "Excusez-moi. Je reviens du sommet sur lequel j'étais il y a plus d'une heure et je me suis rendu compte que depuis, mon appareil photo manque à l'appel. L'auriez-vous aperçu par hasard, ça m'enlèverait du pied une épine aux proportions stratosphériques!!"

Mais à chaque fois, j'ai la même réponse en retour :

- "Votre appareil photo? Ah ben c'est vraiment pas de bol!! Non, je suis désolé mais je n'ai rien vu."

Ouais... Moi aussi j'suis désolé... Alors je repars. A fond les ballons.

- "Excusez-moi... Non?"

Non. Je passe alors mon temps à doubler. Peu importe si je me casse la figure dans tous les sens, j'ai beau tomber, je me relève en serrant les dents et poursuis de plus belle.

- "Non?"

Je suis de retour aux environs glacés. Le soleil brille maintenant fort et le vent est quasiment retombé. Ceux qui parachèvent la montée pour la première fois ne connaissent pas leur plaisir, ni ne le boude.  
Arrivée moi aussi là-haut, je commence par aller faire l'inspection de notre coin fumeur du temps où je prenais ma pause avec les israëliens. Le rocher à la forme caractéristique n'est pas compliqué à retrouver. Seulement, j'ai beau en faire le tour une fois puis deux, l'essentiel manque toujours.
Je complète alors ma deuxième boucle en m'adressant à l'emporte pièce à la vingtaine de personnes qui s'alanguissent, surplombant le cratère, profitant d'un calme météo irréel étant donné ce qu'on a vécu deux heures plus tôt. Dépourvu de toute patience, j'hurle de telle sorte que je n'ai pas à poser la question une vingtaine de fois :

- "ALORS? VOUS L'AVEZ VU OU QUOI????"

- "Non, toujours pas..."

Dégouté, le Braïce. Résigné, le Braïce.
Je suis venu, j'ai vu, j'ai perdu.
Veni, Vidi, Parti.

N'ayant alors plus la moindre soif pour le contentement, je pars de là sans même prendre la peine de profiter de la vue. Le sentiment d'accomplissement est grand d'avoir gravi Mount Doom deux fois mais pour l'instant, c'est bien bien bien à l'intérieur...

Je redescend toujours en travaillant autant mes notes artistiques que techniques à chaque fois que je dégringole à durée indéterminée. Je pourrais sincèrement et légitimement avoir peur de me casser le squelette en mille morceaux mais non, j'ai autre chose à penser qu'à penser à panser mes plaies... D'ailleurs mes chaussettes au niveau des chevilles se parent de quelques gouttes de rouge. Pas grave...

Peu avant le retour au niveau où le sable reprend ses droits, je croise un énième gars, un polonais.
Exactement au moment où mes yeux se posent sur lui, je remarque qu'il est arrêté en train de regarder au sol. La seconde suivante, je le vois se pencher, il ramasse quelque chose au sol dans le foutoir rocheux. Comme un réflexe nouvellement acquis, je commence à l'interrompre pour lui poser la même sempiternelle question.

- "Excusez-moi..."

Mais, qu'est ce donc? Non... C'est pas possible... Je suis au beau milieu de ma phrase quand le type se redresse et exhume du sol un petit boitier noir dont la ressemblance avec vous savez quoi est confondante. Il ne peut en être autrement. Je cours. Je tombe. Je re-cours. Si, c'est bien ça, ce n'est pas un rêve.

ALLELUIA!!!!!!!!!!!!!!!

Aussitôt, je propose au bonhomme de lui baiser les pieds ce qu'il a le bon gout de refuser. Je me saisis de l'engin et l'allume. Ca fonctionne!!!! Incroyable!!!!!!!! L'écran est un peu rayé mais ça fonctionne!!!!!!!!!!!!!!!!! Le couvercle de sombres pensées se lève aussitôt, remplacé qu'il est par une vague gigantesque d'enivrement, de plaisir. A compter d'aujourd'hui c'est clair, la malédiction est levée pour de bon, il ne peut en être autrement. Il s'est passé trop de choses pour que ça se reproduise, le charme maléfique est rompu, ma sérénité seulement troublée par une excitation d'ampleur planétaire!

Je refais un film juste pour le plaisir et reprend cette ultime descente du Mont Ngauruhoe en réfléchissant aux circonstances qui ont entraînées la perte finalement momentanée de l'appareil. Le jury tombe d'accord sur cette version définitive : au cours de mes trop nombreuses roulades au cours de la première descente, le Lumix a glissé de la poche lattérale de mon blouson sans que je ne m'en rendes compte, et là, c'est le drame. Finalement provisoire.

Je salue une dernière fois mon sauveur et achève de parcourir de long en large cette montagne qui aura laissée des traces indélébiles au pas de charge.



Arrivé en bas, je rejoins enfin le parcours principal qu'il faut que j'achève de sillonner. Il me reste une grosse douzaines de bornes avant de pouvoir enfin poser mes gaules. J'en ai plein les jambes ce qui n'a rien à voir avec le fait que j'ai les pompes pleines d'un kilo de sable.
D'ailleurs, en parlant chaussures, la paire que je porte dont j'espérais qu'elle me tienne encore trois semaines est plus sur le point de rendre l'âme plus que jamais. La semelle inférieure est maintenant trouée en de multiples endroits et lorsque que je regarde mes pieds chaussés, je peux sans aucun doute voir mes chaussettes qui dépassent ici et là. Pour mes godillots aussi, le bout de la route sera vraiment le bout de la route. Je repars la démarche mal habile en faisant le constat qu'il n'y a plus personne devant. Sans doute suis-je le dernier, et le bus de 16h30 dans tout ça...

Il est pas loin de midi et si l'on en croit la brochure, la fin du clavaire est à cinq heures de marche sans interruptions. Et m...

Je n'ai donc plus rien dans les chaussettes et ne peux me permettre aucun repos.
Si je dois boire, c'est en marchant. Si je dois manger, pareil. Une gorgée par ci, un abricot sec par là, c'est mon seul luxe dans ce calvaire sur piste qui pour l'instant n'en fini toujours pas de monter.
Quand même, dans ma douleur, Mère Nature ne me laisse pas choir puisque dorénavant le soleil ne me quitte plus, irradiant de lumière les autres sommets que je contourne et magnifiant les couleurs partout présentes des cratères et des lacs. D'ailleurs posés au bord d'un lac couleur émeraude, je retrouve mes deux israëliens qui finissent leur pause déjeuner. Il ne comprennent rien à ce que je fais seulement là et quand je leur raconte mon épopée c'est par des "ohh" et des "ahh" qu'ils ponctuent chaque phrase. Cette rencontre a le mérite de me faire m'arrêter cinq minutes pendant lesquelles je pense surtout à ne plus marcher, pas à manger.
Ces cinq minutes passées, nous repartons groupés au moins pendant cent mètres qui auront servis à me faire me rendre compte que je suis cuit et que je n'arrive pas à suivre leur rythme effreiné. En se séparant, ne souhaitant pas être un boulet, je les charge quand même d'une mission. S'ils voient mon bus, qu'ils leur racontent ce qui m'arrive, ça devrait suffire à les faire patienter jusqu'à mon arrivée au port...

Une gorgée, un cliché, un abricot sec.

J'en chie comme pas possible. Chaque kilomètre s'effectue au mental. A chaque pas, je me persuade que Mme Lomière me poursuit avec des chèques dont il faut que j'additionne les montants. J'accélère. Une dernière montée...

Une gorgée, un cliché, un abricot sec.

Vient la descente. Interminable. Je suis quand même conforté par le fait que je rattrape les retardataires dont certains étaient dans le même bus que moi ce matin.
Si je ne grimaçais pas, on pourrait croire que je souris.
La végétation revient. De la terre nue des volcans enneigés, j'arrive au maquis avant d'entamer la dernière ligne droite forestière. Plus que quelques kilomètres, c'est parfait. C'est parfait sauf que dans l'aridité, on devine la suite donnée à chaque virage, mais dans la forêt, chaque virage peut être le dernier et le dernier, il n'arrive jamais ou presque.

Complètement à bout, je rejoins finalement le parking à 16h25 avec vingt minutes d'avance sur les derniers que le chauffeur attend malgré l'heure couperet. Si j'avais su, j'aurais au moins déjeuné...

Dans le trajet routier du retour, je dors satisfait du travail accompli. Sur la masse des marcheurs aperçu le matin même, pas un n'a crapahuté autant que moi, c'est un fait. Ca m'aura couté des plaies multiples aux chevilles, une paire de chaussures déjà agonisante, une (des) trouille(s) bleue(s).
Mais l'honneur est sauf, même Frodon n'a pas été foutu d'accomplir ce que j'ai accompli!!

A Taupo, je me complais dans la larvitude la plus totale.
Demain c'est sûr qu'avec le retour de la pluie, je vais aller à l'encontre des courbatures.
Quite à passer la journée à récupérer, autant que ça se fasse dans un bus. A la réception, qui n'en croit pas ses oreilles quand je leur décris mon équipée, je réserve un billet simple pour Wellington, convaincu que la journée à rouler ne sera rien de moins qu'une fantastique berceuse.




PS : Je n'étais pas d'humeur particulièrement littéraire à l'heure de me pencher sur le clavier. Tu vois le résultat...

PPS : Les photos et les vidéos sont sur le point ou presque d'être en ligne, un peu de patience (24h tout au plus), ça vaut la peine!! En attendant, il faut que je dormes!!

PPPS : Les résultats de notre grand concours "Le jeu d'Ijen" a rendu son verdict. Merci à tous de votre participation. J'enverrais un message dédié plus tard pour dévoiler le nom du vainqueur ainsi que la photo gagnante. Le suspense court toujours.

PPPPS : J'ai procédé il y a quelques jours à une campagne massive d'auto-inscriptions à la newsletter. Merci à ceux qui y ont répondus favorablement, j'essaierais de ne pas vous décevoir. Bienvenue à vous. Mi casa es su Casa.

PPPPPS : Ne te reste plus qu'à laisser un commentaire, je viens de passer dans les 300 minutes à écrire, il ne t'en coutera que cinq ou plus si le coeur t'en dit.
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3 décembre 2009 4 03 /12 /décembre /2009 09:19
Dans ces terres d'aventures que représente la Nouvelle-Zélande, deux jours passés en ville c'est déjà plus qu'assez. Symbole mondial, ou en tout cas personnel, d'exubérance naturelle et d'activités en plein air, le terrain de jeu est bien trop vaste et mon temps bien trop compté pour que je m'éternise entre des immeubles à peu près similaires à se qu'on peut voir dans n'importe quelle ville moderne.
J'en ai déjà plus qu'assez des burgers, je laisse Auckland derrière moi.


Ma nouvelle étape porte lo nom de Rotorua. Avec des sonorités comme celles-ci, ça fleure bon la culture maori. Si j'ai choisi Rotorua comme première étape dans l'île du nord, c'est que la ville figure tout en haut de la liste des sîtes où l'activité géo-thermale brasse les plaques techtoniques. D'ailleurs, lorsque le bus m'y dépose, l'odeur ambiante ne vient en rien contredire mes attentes. Le vent souffle fort ici et par moments, il véhicule les senteurs printanières issues du souffre comme à Ijen mais heureusement dans une moindre mesure... Ils sont frais mes oeufs, ils sont frais. Beurk!!

La Guest House ici a des accents germaniques. Tous les occupants ou presque, du touriste à l'homme de ménage, prononcent les "r" sous leur forme la plus guttural. Pour un peu on se croirait en Bavière! Heureusement, l'endroit est hospitalier au possible. C'est une grande maison avec tout ce que cela comporte : une salle à manger, un salon et une cuisine équipée, une première dans mon voyage. C'est que la Nouvelle-Zélande, comme son nom l'indique ce n'est pas le Laos ou la Thailande. Ici, le plus économique n'est pas la gargotte ou les brochettes le long de la rue, ça n'existe pas, c'est encore de faire la cuisine soi même, constituant pour ma part un immense décallage avec le passé étant donné que je n'ai pas cuisiné depuis plus de treize mois, situation dont je m'accomode jusque là parfaitement bien.
Et qui dit cuisine, dit supermarché, c'est la mort dans l'âme que j'y vais y faire mes achats.
Des pates par ci, des fruits par là. Il n'est pas encore arriver le moment où je vais passer quatre heures derrière les fourneaux!

Cette heure de fièvre aux accents de caddies plus tard, il faut que je me retrouve. L'après-midi de ce 14 novembre est déjà bien avancée et pour l'instant, tout ce que j'ai à mon actif durant cette journée, c'est quatre heures de position assise dans un bus et une heure à hésiter entre deux marques de salami ou si l'offre de "deux barquettes de fraises pour le prix d'une" est vraiment une affaire.
Ne comptant pas en rester là, et apercevant à chaque coin de rue les fumées qui s'échappent de piscines chauffées naturellement, je décide moi aussi qu'il serait au moins agréable de patauger dans des eaux bouillonnantes ne serait-ce que pour lutter contre le froid qui s'installe dès la lumière du soleil fermée pour cause de nuit. L'été austral n'arrive que dans un mois et manifestement pas une minute plus tôt.
A la réception de l'hotel, je déniche une brochure vantant les mérites du Polynesian Spa. Une dizaine de bassins offrant une vue imprenable sur le grand lac bordant la ville, à la lecture de ces quelques lignes, je suis déjà conquis!! Dans mon sac, une serviette, un maillot de bain. Plaisir du bain, canard en plastique ou pas, me voilà. La marche pour arriver au Spa ne me prend que quelques minutes, seulement c'est déjà suffisant pour aller d'un bout à l'autre de la ville présentée dans le LP comme le principal lieu de tourisme en NZ. Or, j'ai beau traversé la ville et surtout on a beau être samedi après-midi, Roturua ressemble plus à une ville fantome qu'à un pole d'activité. En dix minutes à fréquenter les plus grandes artères de la ville, je croise une dizaine de piétons. Peut-être que le souffre a eu raison des autres...

Arrivé à l'entrée des piscines, je n'ai pas l'intention de monnayer un rein contre un forfait tout compris. Pour moi, ce sera la formule de base merci.
A l'intérieur, je n'ai pas à m'en plaindre. Creusées en escalier, les bassins se s'échelonnent les uns derrières les autres. L'eau arrive des profondeurs dans la piscine du dessus où je regrette de ne pas avoir emporté mes pates tant elle est brulante. Ensuite plus on s'en éloigne, plus la température a le temps de décroitre. Chacun peut donc trouver le bon niveau de mercure pour son thermomètre. De 42° à 36°, faîtes votre choix et dégustez pendant que c'est chaud! Au coeur de cette marinade, je mijote à feu doux pendant deux heures durant lesquelles ma peau se fripe de ravissement. C'est que la "chaleur" tombe rapidement en Nouvelle Zélande. Dès que le soleil se blottit derrière les montagnes, le mercure plonge ailleurs que dans mon bain brulant rendant mes ablutions autrement plus agréables qu'à Coron, où j'avais oublié de préciser qu'il y avait aussi des sources chaudes. Seulement à Coron, de jour comme de nuit la chaleur est étouffante transformant une expérience potentiellement ragaillardissante en un ton sur ton de moiteur.
Mais pas de ça ici... Ici c'est revigorant comme un verre un lendemain de cuite sans passer par la case "mal à la tête".

Au terme de ma mutation en ragout, je quitte l'endroit, m'empressant de rejoindre la GH. La nuit est d'argent, mon sommeil est d'or.


C'est en compagnie nuageuse que je sors de ma chambre autour de 8h du matin. Ce n'est pas de gaité de coeur mais il faut bien que je m'active car Lady Knox n'attend pas. Lady Knox n'est pas une beauté vertueuse tout droit venue d'Outre-Manche mais un phénomène bien local. Peu après l'entrée du parc de Wai-O-Tapu, elle est responsable de l'accueuil, uniquement si on daigne venir la visiter à 10h15, sous la forme d'un geyser pétaradant.

Le parc thermal est à une trentaine de kilomètres de Rotorua. Deux options sont envisageables pour le ralier : la navette à 20$ ou le stop. N'ayant aucune forme de problème pour lever le pouce, je m'efforce de rejoindre la route aussi tôt que possible pour ne pas voir mes chances d'admirer la Lady fondre comme glace dans jacuzzi. Ce sera le stop ou ne sera pas.
Sur le bas côté, je regarde les voitures filer à vive allure. A mon crédit, la route est le chemin direct vers Wai-O-Tapu. Dégainant des sourires à tous les pares-chocs qui me passent, je n'ai pas à poireauter longtemps pour trouver baquet à mon derrière. Une quinquagénaire au volant d'un pick-up rutilant fait chauffer ses freins quelques centimètres après m'avoir dépassé. La portière avant gauche s'ouvre. Elle ne veut pas que je conduise, juste que je m'installe sur le siège passager, les kiwis étant les héritiers routiers des sujets de sa majesté, la reine d'Angleterre. Conduite à gauche pour tout le monde qui ne fait rien comme le reste du monde!!
Déposé à deux kilomètres de l'entrée, je presse le pas pour ne pas manquer une goutte de la fontaine des profondeurs, quoi qu'intrigué par l'horaire à la programmation quotidienne de son éruption.
Je prends alors place dans un amphithéâtre déjà bien garni. Lady Knox affiche presque complet. Devant la foule impatiente et derrière une barrière protectrice, un monticule s'offre au regard. A son sommet un trou.
Vient 10h15.

Là, un membre du staff enjambe la barrière et entame un discours présentoir. On apprend tout de l'histoire des lieux, des raisons de l'activité géo-thermale et tout le tremblement. Puis, le pseudo-scientifique sort de sa poche un simple morceau de savon dont il entreprend d'extraire des morceaux, les jetant ensuite dans l'ouverture. Comme on obtient une canette dans un distributeur, cela accouche du geyser. En quelques secondes, une réaction chimique s'opère, le geyser prospère.
Dans un signe avant coureur, des bulles de mousse affleurent de terre à fleur de terre (oh oh!).
Puis l'eau remplace la mousse. D'abord un maigre jet pour atteindre finalement une colonne haute de plusieurs mètres. C'est que Lady Knox en a dans le ventre. Elle est assise sur un réservoir de millions de litre, la cachotière!!
Ca dure comme ça pendant une heure. Pour ma part, j'aurais bien envie de la nourrir de kilos de savon entier pour décupler le procédé mais non. Je n'avais pas prévu le coup...

Regarder un jet d'eau sortir des profondeurs, c'est un spectacle efficace, du moins pour un temps. C'est que Lady Knox ne possède pas énormément de mots à son dictionnaire et qu'à la longue, on se lasse.
Cela dit, point de misérabilisme, Wai-O-Tapu a bien plus à offrir que la princesse qui se gargarise. En avant.

Wai-O-Tapu, cela signifie "eaux sacrées" en Maori. En Braïce, ça signifie plutôt "belle ballade entre les lacs multicolores et les cratères menaçants où la baignade est interdite même dans le cas où Mitch la surveille".
Le sol est constellé de trous. Dans chacun d'eux, un concert sulfureux se joue. Non, Lady Knox ne s'y baigne pas toute nue, ce n'est pas du language imagé quand je parle de sulfureux. Les flaques boueuses dans lesquelles se succèdent des bulles grisâtres n'ont rien d'une fontaine de Jouvence, c'est même tout le contraire avec des accents cyanurés!
Puis, c'est autour des lacs de sortir du bois dans cet environnement forestier. Et là, malgré la couverture du nuages qui, aujourd'hui, prive les visiteurs des effets trascendant du soleil sur les couleurs comme une bonne lessive, un festival chromatique commence.
Du jaune au rouge en passant par le vert, c'est comme si le peintre fou avait préféré s'attaquer à des étangs plutôt qu'à une toile.
Même quand la pluie laisse filtrer quelques gouttes à travers les nuages, la seule réflexion que cela inspire c'est "qu'importe", le spectacle éclipsant toute forme de mécontentement.
Le seul problème que cela m'inspire, c'est que si je suis trempé d'eau jusqu'aux os, je deviens tout de suite moins aguichant pour qui daignerait réfléchir quant au fait de me prendre en stop. Me mettant à leur place, je comprend bien qu'aider c'est sympa jusqu'à ce qu'on doive charger une éponge dégoulinante. Là, c'est non. Il ne faut pas confondre hospitalité et allité à l'hospice.
Je prends donc mon mal en patience sous un refuge posé le long du sentier exactement à cet effet, la météo néo-zélandaise n'ayant que ceci de prévisible qu'elle est imprévisible. Puis vers 15h, ayant plus que pris mon temps pour m'extasier du moindre centimètre carré, je franchis la sortie en m'amusant de toutes les daubes dont on peut se porter acquéreur à la boutique de souvenirs. Au même moment, un couple coupe la ligne d'arrivée. Hep Taxi!!!

De retour chez les germains, je tente vaguement de me fondre dans le paysage en sympatisant avec quelques "locaux". Mais comme on me pose des questions auxquelles j'ai déjà répondu un bon millier de fois (Tu viens d'où? Depuis combien de temps tu voyages? Mais comment tu fais? Et les cuisses de grenouilles, ça ne te manque pas trop?), je finis par me coller le nez dans l'écran pour n'en sortir que assouvir des besoins vitaux comme le Burger King ou les toilettes jusqu'au moment où je suis déjà le dernier debout. Il est minuit et demi. C'est mon tour de lever le camp.


Le 16 novembre, paradoxalement, le calendrier a beau affiché en gros "lundi", ça coincide avec ma première grasse matinée chez les kiwis. Il y a bien une jeune fille qui vient nettoyer le dortoir dans lequel je dors sans crainte des représailles quand elle passe l'aspirateur, mais il en faudrait plus pour que je me secoue. Il est déjà 11h, le bus vers Taupo, objectif à moyen terme, est déjà parti, nous voilà bien engagé pour une journée active...
Vers midi, de nouveaux locataires arrivent. Ne se doutant de rien de ma présence camoufflée sous une couette avenante, ils papotent en s'installant. C'en est trop, je sors de ma torpeur. Au premier mouvement, une des filles nouvellement débarquée hurle n'ayant rien vu venir.
Si on fait le compte sonore de cette journée à peine entamée, entre l'aspirateur et les hurlements, j'ai comme envie d'aller prendre l'air!!!
Je fais alors le tour des options qui s'offrent à moi.
En engouffrant un mélange de petit et de grand déjeuner, je jète mon dévolu sur l'option cycliste plus à même que son pendant piéton d'aggrandir mon rayon d'action dans la ville que je ne peine déjà pas à connaitre comme mon 80 litres.

Je loue donc pour la demie journée un fier destrier bien décidé à explorer une foret située à quelques tours de roues de là. Si tout fonctionne, c'est à dire si je ne me perds pas en route, je devrais sur place avoir à disposition quantité des chemins spécialement aménagés pour la pratique sportive du deux roues. Me voilà donc à pédaler face au vent, prenant garde à ne pas me tromper de sens en rejoignant la route principale. Puis viennent les premiers arbres. Dans un coin du ciel, le soleil revanchard commence à se tailler la part du lion.
La lisière de forêt atteinte, je commence à entrevoir ce que je pense être la principale difficulté de la randonnée : des montées à n'en plus finir.
Mais bon vaille que vaille, je me lance. Et comme je ne suis pas tout seul, j'essaye au minimum de faire bonne figure c'est à dire que je me garde bien de poser pied à terre tant que quelque autre coureur est dans les parages immédiats. Seulement, le résultat consécutif à toute cette témérité physique, c'est que, vulgairement parlant, j'en chie des ronds de chapeau!!! Car c'est bien beau de gravir des montagnes semelles au sol, mais dès qu'il s'agit de faire la même chose les semelles calées sur des pédales, ces même semelles de vent se muent vite en semelles de plomb.
Déjà à mi-pente, j'ai le souffle qui crie famine, les cuisses qui démissionne, la critique sur le dopage beaucoup moins acerbe. Dès que je suis tout seul, je déchausse et poursuis en poussant/tirant ma charrue de vélo bien décidé tout de même à ne pas en rester là. Pendant ce temps, je suis doublé par quelques kiwis qui ont tout compris puisqu'ils se font déposés en voitures équipés de galeries tout en haut, là où mes muscles me dirigent aveuglément malgré tous les signaux de détresse qui parcellent mes jambes.
Et là haut, au bout de l'effort, le souffle si court que ce n'est plus qu'un fin fil d'Ariane qui me sépare de la suffocation, le chemin marqué de traces de pneus de voitures s'interrompt, je pénètre dans une immense clairière, point de départ des multiples chemins de descente, donc d'amusement, qui s'offrent à mes roues cramponnées.
Mais une chose à la fois. D'abord, il s'agit de profiter de l'instant présent en se laissant lamentablement tomber sur un lit d'épines de pin, doux matelas pour mes membres douloureux.
Une demie heure passe pendant laquelle je ne bouge que pour me nourrir d'abricots secs, pour, pour une fois, boire de l'eau, et fumer une cigarette qui n'est jamais meilleure qu'après l'effort.

Après ce menu de réjouissance, ce que je pense être la récréation commence.
Les tracés de descentes sont classés, en anglais dans le texte, de "grade 1" à "grade 6". Seulement, dans mon esprit déconfit, impossible de dire à quoi de 1 ou de 6 correspond le plus difficile. J'ai beau être habitué à circuler dans Paris à vélo, la conduite au milieu des platanes et de leurs traitresses racines n'a pas grand chose à voir.
Un peu au hasard, je pars sur un itinéraire classé "5".
Après quelques mètres de plat et de pente douce, l'angle vire de bord, la largeur du chemin rétrécit au lavage, je ne suis pas au bout de mes peines. L'évidence me plante comme une lame, mon choix compte tenu de mes capacités ne s'avère pas courageux mais suicidaire. Les ponts de bois larges comme une paire de skis se succèdent loin au dessus du plancher des crashs. Les sauts encouragés par des bosses surdimensionnées et d'autres passerelles qui s'achèvent sur du vide sont autant d'occasions de se fractionner la colonne vertébrale en osselets sur les arbres qui poussent de part et d'autre à la manière d'épés de Damoclès végétales.
Comme une évidence malgré mon assurance rapatriement nouvellement renouvelée, mes pieds sont bien plus souvent ancrés au sol que je ne le voulais. Les kiwis ont beau me montrer la voie quand il me double à cent à l'heure me forçant littéralement à déchausser, je n'en emmène pas large! Ces gars et ces louloutes là ont un nombre de vies supérieur à 1 comme dans un jeu vidéo ou ont-ils tous subi une ablation de la rate, je ne vois pas d'autre explication.

Arrivé en bas, je me laisse encore une chance.
Pour cette deuxième prise, j'ai compris ma douleur la première fois, je remonte tout à pieds. Et une fois de retour au sommet, on ne me la fait plus non plus, je me lance sur un parcours "grade 2", bien plus adapté à ma confiance embryonaire vacillant dans l'oeuf entre la vie et la mort.
Là, tout va mieux. Si la descente en niveau 5 se faisait sur trois ou quatre kilomètres, celle en niveau 2 s'étire longuement en tournoyant autour de la colline adrénaline. Cette fois-ci, le plaisir est là.
Les arbres me vouvoient de loin plutôt que de me donner de grandes tapes dans le dos. Chacun chez soi, et les vaches seront bien gardées!

Une fois en bas, il est déjà 18h, parfait prétexte pour esquiver une troisième ascension.
Je retourne chez le loueur cette fois-ci avec le vent dans le dos. Profitant de l'élan, dès le retour en Germanie, je réserve mon billet pour Taupo pour le matin suivant; en bus, c'est mieux.

Sachant maintenant que mon séjour à Roturua tire à sa fin, je profite de cette fin de journée où le soleil austral ne se couche que tard le soir à l'approche de l'été qui arrive pour déambuler une dernière fois sur les rives du lac du même nom, parfait préambule à un dîner mille fois mérité au regard de mes canes qui sifflent.

Une fois la peau du ventre aussi tirée que mes traits, je retourne dans mon antre.
Quelques dizaines de minutes d'écriture plus tard, je tombe de sommeil. De bonne augure pour monter en pleine forme dans le bus qui m'emportera vers la capitale mondiale du saut en parachute si on en croit les brochures, Taupo.
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18 novembre 2009 3 18 /11 /novembre /2009 02:34
Un soupçon de Moyen-Orient,
Trois pincées d'Asie,
Que pourrais-je bien ajouter maintenant à ma recette?

Bon sang mais c'est bien sur!! La Nouvelle-Zélande, les antipodes!!! En avant, c'est parti!!!


Je quitte l'Indonésie sur un petit gout d'inachevé. Seulement trois semaines sur place n'auront pas été suffisantes pour que je sois rassasié. Ahh, si seulement je n'avais pas perdu trois semaines à Kathmandou en attente d'une nouvelle carte bleue, les choses auraient surement été toutes différentes! Mais il faut faire avec ce que l'on a, ce qui est déjà extraordinaire.

A l'heure de monter dans l'avion, de tirer le rideau sur dix mois à manger du riz, je ne peux nier que j'ai une petite boule au ventre faite de sentiments contradictoires. Quand on s'apprête à atterrir dans le pays de l'autre côté de la terre par rapport à la Douce France, c'est le signe qu'à partir de maintenant, véritablement, inexorablement, je me rapproche. Soit.
Cela dit, l'expérience de onze mois en Asie aura été au delà de tous mes rêves et le plus beau, c'est que ça continue! Malgré les croches-pattes inhérents à la vie nomade, j'avance toujours d'un pas conquérant. Je suis vivant, surfant sur la vague des aléas du quotidien avec brio.


Malgré mes premiers galops en Turquie,
Malgré les dizaines de Dark Vador que l'on croise en Syrie,
Malgré les grimpettes pas toujours assurées en Jordanie,
Malgré les vendeurs égyptiens qui te suivent sur des centaines de mètres, malgré le désert,
Malgré la montagne qui te fais découvrir des sphères de fatigue encore inconnues au Népal,
Malgré les coeurs brisés épongés aux seaux d'alcool grimpant des parois en Thailande,
Malgré la conduite de nuit au Cambodge,
Malgré les chutes à répétition à moto au Laos,
Malgré les lits de rivières que l'on remonte à fond de deuxième avant de tirer à la Kalashnikov au Vietnam,
Malgré les requins ET les requines aux Philippines,
Malgré la mongolphière et les pertes d'orientation pas fier en Chine,
Malgré l'altitude au Tibet,
Malgré les pertes de repères et pas que de retour au Népal,
Malgré les vaches, la chaleur, les odeurs, le froid en Inde,
Malgré le souffre en Indonésie,
Je suis toujours là, le coeur vaillant. Enfin j'essaye...


C'est que ce n'est pas facile à chaque seconde d'être un conquérant en terre inconnue. Imaginez-vous, par exemple. Vous vous apprêtez à découvrir le pays des kiwis mais pour ce faire, il faut passer l'épreuve de dix heures d'attente en escale à Brisbane en Australie. Certes, il y a bien deux ou trois choses à faire mais quand même, c'est long dix heures d'attentes quand on a le couteau entre les dents.
Pour patienter, je commence par, il était temps, acheter le LP consacré à la Nouvelle Zélande. Je débarque dans ce pays le soir même, il est enfin temps d'avoir quelques informations. Question organistation, c'est mieux... La lecture me tient éveillé quelques heures. Je n'en suis seulement sorti quand rugissent au milieu du ronronnement ambiant des sirènes qui réveilleraient un mort. La voix qui d'ordinaire annonce les vols en partance ou les enfants perdus qui cherchent désespéréments leurs parents, prend le micro pour une annonce pas banale :

- Avis à toutes les personnes. Ceci n'est pas un exercice. Veuillez quitter au plus vite le terminal en empruntant la sortie la plus proche. Je répète, ceci n'est pas un exercice!

Héberlué, ne sachant à quoi m'en tenir, je suis alors la foule des voyageurs pendant que un à un, les boutiques "duty free" abaissent le rideau de fer et ferment dans une cacophonie de tous les diables. Tout le monde prend ses jambes à son cou.
Passant un premier panneau annonçant une sortie toute proche, on s'enfonce dans un couloir. Au bout de celui-ci, un agent en uniforme apparemment inconscient de ce qui se trame nous intime l'ordre de rebrousser chemin. Impossible de sortir par là. Vite, une deuxième sortie. Là encore, un autre guignol nous refuse l'accès, c'est à n'y rien comprendre d'autant que les sirènes continuent de retentir. Puis, alors que la transumance d'urgence se poursuit, les sirènes s'interrompent. La foule des badots s'interrompt alors aussi. La voix reprend alors la parole :

- Avis à toutes les personnes. L'alerte est levée, vous pouvez reprendre une activité normale.

Ben voyons... Avec soulagement, je retourne alors m'assoir, l'idée même d'une alerte générale au sein d'un aéroport n'étant pas particulièrement bienvenue quand on doit y passer la journée entière... Mais au bout du compte, cela aura au moins eu le mérite de faire passer vingt minutes supplémentaires. Je retourne à ma lecture.
Les boutiques ré-ouvrent les unes après les autres. Peut-être devrais-je en profiter pour m'cquitter de ma deuxième mission indispensable : acheter un nouvel appareil photo, au rythme où ça va avant le prochain... Toujours fidèle à mon fournisseur même s'il ne me le rend pas depuis quelques mois, je m'équipe de nouveau en Panasonic dont je commence à avoir marre de faire la publicité sans contrepartie. A force d'égarer mes appareils photos, je fais pourtant tourner la boîte à moi tout seul!! Les ingrats, qu'il en soit ainsi...

Je viens enfin à bout de cette attente interminable. Il est 18h30, l'avion décolle.
Un décallage horaire plus tard, il est 1h passée quand il se pose enfin. Vivement un lit propre! Entre la route depuis Gili Trawangan, l'attente à Denpasar, l'avion vers Brisbane, une nouvelle attente de dix heures et ce dernier vol, ça fait pas moins de 36h que je suis parti! Ne reste plus qu'à me dédouaner des formalités douanières et le compte est bon.

Dans la queue qui avance péniblement vers la sortie, mes sacs posés sur un chariot roulant, je suis accosté par un officier en uniforme. là, il me pose quelques questions de routine.

- D'où est-ce que vous venez?
- De France, mais je n'y ai pas mis les pieds depuis un certain temps. Mon dernier vol vient de Brisbane.
- Combien de temps avez-vous séjourné à Brisbane.
- Quelques heures seulement, j'étais en escale.
- Avant cela, où étiez-vous?
- A Bali, mais encore une fois, je n'y suis resté que quelques heures.
- Suivez moi s'il vous plait.

Alors que je n'étais qu'à quelques pas de la sortie, je suis contraint de rebrousser chemin, suivant le douanier qui m'ouvre le chemin dans le sens inverse de la queue dans laquelle je patiente depuis de trop longues minutes. Un couloir plus tard, je suis dans une grande pièce où les agents s'affairent. Arrivé devant une grande table, mon képi me demande de m'assoir sur une chaise pendant qu'il s'occupe de mes affaires. Pour l'occasion, "s'occuper" signifiant tout débaler et étaler le tout sans soucis de rangement. Pendant le grand déballage, l'agent me questionne :

- Alors comme ça on voyage... Vous savez naturellement ce que je cherche...
- Je sais que nous sommes en Nouvelle Zélande et, le pays étant une île, vous recherchez tout ce qui peut être porteur de microbes, de bactérie ou je ne sais quoi du genre naturel et potentiellement dangeureux pour l'écosystème local.
- Ah? C'eut pu être une bonne réponse mais non. Présentement, je me demande si vous n'essayez pas d'introduire de la drogue sur le sol national.
- C'était donc ça, fouillez donc!!!

Je n'ai, dans le domaine, rien à me reprocher. Cela dit, je me souviens avoir discuter il y a quelques jours du cas de Manuel Blanc avec une française. En résumé, Manuel Blanc s'est vu confié à Bali par un de ses amis un équipement complet de plongée dans lequel la douane locale a retrouvé des dizaines de kilos de substances interdites au point de lui faire passer le restant de ses jours dans une prison indonésienne. Et si une personne mal intentionnée avait chargé mon sac? On ne sait jamais.
Mais non. Rien à se mettre sous la dent pour l'ami uniforme tout déçu qu'il est s'il n'était pas rassasié d'avoir étalé l'ensemble de ma maison ambulante sur 3m².

Notre rendez-vous inopportun s'achève là. Charge à moi de tout remettre à sa place. Il est trois heures du matin, heure locale, quand je m'extrais du local à suspects. Ne reste plus qu'à rejoindre le centre ville et à la trouver cette fameuse pièce de litterie dont je rêve les yeux ouverts. Je suis alors toujours dans l'aéroport quand je me rends compte d'emblée qu'en Nouvelle Zélande, on voyage plus facilement qu'en Chine par exemple. Le bureau d'informations aux voyageurs est toujours ouvert. L'employé nocturne se charge alors de me trouver une bonne petite adresse ainsi que de me vendre le ticket de bus pour m'y rendre.
Tout se passe alors comme sur des roulettes.
A 3h30, j'y suis, enfin. Fais de beaux rêves.


Le lendemain (12 novembre si je ne me gourre pas), il est temps de voir à quoi ressemble Auckland maintenant que le soleil brille et que les filles sont courtes vêtues, profitant d'un avant gout d'été austral. Ma GH est en plein centre-ville. Dans le voisinage immédiat, de hautes tours se dressent avec à leur base, une enfilade de fast food en tout genre. Apparemment ici, il y a trois catégories de restaurant, les sushis bars, les kébabs, et les Mc Do', KFC et autres Burger King, ce qui n'est pas négligeable.

Je commence ma ballade par un petit tour du côté de la marina. Là, les bateaux de croisières gigantesques cotoient les frêles esquifs. L'Océan Pacifique est d'un vert magnifique, les vues sur la baie également. Je poursuis ensuite en passant au pied de la Sky Tower, batiment le plus haut de l'hémisphère sud à la forme d'antenne dont le sommet reste en dessous de celui de cette brave dame de fer, la Tour Eiffel. Alors que je la longe, je remarque que les piétons tout autour, ont tous les yeux levés vers le ciel, signe qu'il se passe quelque chose de notable. En effet, un candidat à l'adrénaline vient de sauter à l'élastique du haut de la tour. Et oui, ils sont comme ça les kiwis, dès qu'il y a un tantinet de place en dessous, ils arrangent tout pour qu'on puisse s'envoyer en l'air. Message bien reçu, poursuivons.
Je prends alors le chemin de l'université. Ce n'est pas tant l'envie de m'assoir sur un banc d'écolier qui me pousse ici, c'est plutôt que le campus est bordé par un jardin public où il fait bon s'alonger sur l'herbe entouré d'arbres aux formes rocambolesques. Pas besoin de me faire prier. Profitant de la douceur du temps, j'enlève chaussures et T-shirt et lézarde jusqu'à la somnolance jusqu'à ce que la faim m'en sorte.
Qu'à cela ne tienne, la promenade était belle, gageons que ce ne soit que le début dans ce pays qui a tant à offrir. Je suis de retour à l'hotel vers 19h30 à l'heure du coucher du soleil. Dans la partie commune, sur l'écran plat, on diffuse le dernier volet du Seigneur des Anneaux. Je tombe dans l'embuscade et n'en sors que pour écrire quelques lignes avant que la nuit ne vienne me prendre dans ses bras douillets agrémentés d'une couette qui n'est pas de trop pour lutter contre la température qui est bien tombée depuis l'arrivée de l'obscurité.


Nouvelle journée, nouvelle épopée.
Aujourd'hui, on ouvre un volet culturel par la visite du musée de la ville. Pour s'y rendre, c'est facile. Par rapport aux pays précédents, l'anglais aidant et le cout de la vie m'y contraignant, je prends le bus, meilleur moyen pour arriver à bon port.
Dans le musée, des milliers d'objets de toutes tailles célèbrent la culture maori et polynésienne d'une part, et l'influence britannique d'autre part (sic). L'angleterre est d'ailleurs à l'honneur aujourd'hui puisqu'il pleut. Ensuite, à un autre étage, c'est à la faune et à la flore qu'on s'intéresse en plus de se voir donner une leçon sur les volcans dont l'activité "récente" est responsable de l'émergence de la Nouvelle zélande depuis les profondeurs de l'océan.
D'ailleurs à la sortie, malgré le crachin qui ne s'est pas calmé, je me dégote un nouveau bus pour rejoindre le Mont Eden, un parmi la quarantaine de cones qui entourent Auckland. Celui-ci a beau ne pas être particulièrement haut, les vues depuis son sommet dévoilent toute la ville qui s'étire paisiblement aux alentours.
C'est calme, c'est naturellement beau, c'est kiwi!
Le temps d'en prendre pleins les mirettes et de me peler de froid à cause des 40èmes rugissant qui amène dans leur sillage des températures quasi-polaires, je rentre enfin à la casa, apprécier une douche chaude qui ne manquait pas que de la Thailande à l'Inde, mais qui là, te remet d'aplomb en un clin d'oeil.
J'en profite également pour acheter un billet de bus pour ma prochaine étape, Rotorua, un petit peu plus au sud, dont tout le monde ici dit que c'est la capitale mondiale de l'activité géothermique. On verra bien.
Un peu d'écriture plus tard, je m'enfonce sous la couette en pensant aux sources chaudes qui m'attendent plus loin.

  

 
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