Saigon, nom légendaire, cité construite au coeur du delta du Mékong, méfie-toi, j'arrive!!
A la vitesse d'un escargot puisqu'il faut 24h de bus depuis Hoi An avec un changement à Nha Trang pour l'atteindre, mais quand même, j'arrive!!
On est pour l'instant toujours dans le bus. Je dors comme une momie emmitouflé dans ma couverture pour ne pas trop subir la température rendue glaciale par une climatisation à peine croyable tellement elle défouraille.
Mais ça ne dure qu'un temps. Vers 5h du matin, je suis tiré du sommeil par deux choses : premièrement, le bus est arrêté le long de la route depuis un petit moment déjà, il semblerait qu'on soit en panne de quelque chose et deuxièmement, étant donné que le moteur est arrêté, la climatisation ne fonctionne plus ce qui a conduit la température à passer de 18° à plus de 40° en quelques minutes. L'air est maintenant irrespirablement chaud et le sommeil précaire.
Comme je suis du côté de la fenêtre, je n'ai même pas besoin d'ouvrir un oeil pour la faire coulisser, permettant ainsi à l'air frais de la nuit vietnamienne de nous raffraichir un peu. C'était mon principal problème, je me rendors. (NDLR : La panne en soi, ça fait partie du voyage, c'est pas un souci tant qu'on ne nous demande pas de quitter le bus.)
Une demi-heure après, je me réveille de nouveau. Le bus est toujours à l'arrêt sur le même bout de bas-côté, c'est pas bon signe...
Je me mets alors en quête de mes lunettes. Ca devrait être facile, je les avais posées le long de la vitre sur la rigole qui permet à celle-ci de glisser. Je cogite deux secondes, elles ne sont pas là. Je me redresse, instantanément réveillé par le stress qui me gagne. Je fais voler la couverture, l'oreiller, mon voisin vietnamien, rien. Effort de concentration, où est-ce qu'elles peuvent bien être ces p... de lunettes????
Puis alors que les neurones se mettent finalement en ordre de marche dans mon cerveau embué, je tourne la tête vers la fenêtre grande ouverte. Et merde...
Je ne me suis rendu compte de rien sur le moment étant donné qu'on était au milieu de la nuit mais au moment de faire glisser la fenêtre pour l'ouvrir, mes lunettes qui étaient posées tout contre ont du faire le mur. Je refais alors voler mon voisin et sors du bus en détresse mécanique pour aller inspecter les environs immédiats avec sur le nez, mes lunettes de soleil correctrices, ce qui est du meilleur effet quand il est 5h30 du matin. Et là, rien non plus. Je fais signe aux employés du bus qui s'activent sous celui-ci pour le remettre en état de marche et les questionnent. Rien... Il faut se rendre à l'évidence, j'ai paumé le seul truc qui était franchement imperdable étant donné que je les porte toujours sur le nez : mes lunettes. Et là, les boules graves!!!!
Ca pourrait être pire car j'ai bien une paire de rechange qui m'attend dans mon gros sac resté dans la soute à bagages, mais c'est quand même le super pompon dans cette journée enfermé dans un bus où il fait en plus maintenant une chaleur à faire clencher des octogénaires!! Ca bout à l'intérieur de moi autant que ça bout dans le bus. Impossible de me rendormir, j'ai le stressomètre qui explose les compteurs!
Et juste après, comme pour confirmer mon deuil, le bus est réparé, il repart, c'en est vraiment fini de mes chères binocles. C'en est aussi fini de mon sommeil ce qui est une vraie tuile dans la mesure où on est très proche de Nha Trang mais encore à des années-lumière de Saigon.
Je tente donc de rassembler mes pensées. Si je continue la journée telle qu'elle devait se passer, c'est un coup à ressasser mon désarroi jusqu'à ce que crise de nerfs s'en suive. Je choisis donc de m'inspirer de Dani qui avait déjà choisi de rester 24h à Nha Trang. Je reste aussi sachant que ce n'est sans doute pas plus mal, nha Trang est la ville balnéaire la plus importante du Vietnam et de loin. Sans doute donc que la proximité de la plage saura me faire oublier mes déboires, sachant que dans le cas contraire, il y a toujours des bars à boire dans une cité balnéaire.
Dans le bus en arrivant, j'ai mon casque sur les oreilles. Tout le monde sauf moi est retourné à son sommeil. Moi, j'écoute du gros son bien énervé à grand renfort de décibels.
En entrant en ville, le soleil se lève, il est 6h. Le bus longe la plage principale et fait complètement hallucinant : elle est noire de monde!!! Tout ce que la ville compte de familles, de joggers, de baigneurs, s'est donné rendez-vous aux aurores. J'imagine que ça permet d'en profiter avant d'aller bosser ou avant que le soleil ne transforme ta peau en une boursouflure bien cuite.
Enfin, à 6h30, les fauves sont lachés, on peut rechercher un hotel. Rechercher en fait non, on ne va pas me refaire le coup de l'arrivée à Hoi An, le premier le mieux! Une grande tour bien typique de Nha Trang, bien moche à l'extérieur mais bien pratique puisqu'elle est à la descente du bus. Et le premier qui se plaint, je lui conseille d'avoir avec lui une armée entière d'arguments parce que je ne suis pas vraiment d'humeur à débattre!
On s'y rend donc avec Dani et toujours Simon le boulet québécois, accompagnés maintenant de James et Lucy qui sont un jeune couple d'anglais qui voyagent accompagnés de Connie, leur copine.
Une fois atteint la réception, la série noire continue, on ne s'en était pas rendu compte mais toute la ville est privée d'électricité. Ce n'est pas un problème en soi mais quand on a la chance de se voir attribuer une chambre au sommet de l'immeuble, au huitième étage, ça le devient (sic). On essaye donc d'attendre la fin de la panne d'ascenseur, puisque c'est principalement de ça qu'il s'agit, en restant un temps à discuter autour de la reception. Mais après une heure, j'en ai ma claque, je prends mon courage à deux mains, mes jambes à mon cou, mes sacs sur mes épaules.
Je suis récompensé de mon effort en découvrant la chambre. En plus d'être d'un confort plus que passable, on est doté d'une terrasse privative, elle même plus grande que la chambre! On vit sur le toit et ça n'a pas que des désagréments, ouf!!
Une douche glacée plus tard, les autres ne sont toujours pas montés, les feignasses, je m'endors en me disant que ça les fera venir.
Finalement oui, ils arrivent. Ils ont mis le temps mais ils sont là. Il est 11h quand je suis réveillé par leur essoufflement, l'électricité ne fonctionne toujours pas, il ne manquerait plus que ça qu'ils aient eu droit à l'ascenseur!!
Je les pressent de s'activer, j'ai une faim de loup, je pourrais manger une vache. Ils ont alors à peine le temps de se sècher après leur douche qu'il faut y aller. On a pas mangé un vrai repas depuis l'après-midi de la veille et ça s'entend vu les cris que poussent mon estomac tiraillé par la privation. Et aujourd'hui au rayon nourriture, pas question de se priver. On prend donc la direction de la plage, histoire de profiter d'une vue qui ne soit pas celle de la ville car c'est vraiment hyper bétonné et de ce fait pas vraiment ce qui se fait de mieux pour flatter nos yeux habitués aux paysages hauts en couleurs.
Alors qu'on est en chemin pour assouvir nos appétits délaissés, le destin continue de semer des embuches devant nos pas. Des contre-temps et des soucis comme s'il en pleuvait. D'ailleurs, c'est exactement de ça qu'il s'agit. Un nouvel orage comme les pays tropicaux savent en offrir en guise de cadeau de bienvenue sur le front de mer. Il pleut tellement qu'en quelques minutes, il faut qu'on fasse attention à chaque voiture qu'on croise, puisqu'elle soulèvent toutes des vagues de plusieurs mètres, la pluie stagnant sur la chaussée détrempée.
Cela dit, c'est un effort bien vain car vague ou pas, on est déjà de belles éponges quand on trouve une table pour remplir nos ventres.
Et là, tu te dis qu'on est à l'abri, qu'il n'y a plus de raison que la série noire continue, et bien tu peux encore te fourrer le doigt dans l'oeil jusqu'au cervelet. Tu te souviens de l'épisode du passeport qui boit la tasse dans mon sac. Et bien re-belotte, mais sans le passeport cette fois. Comme par terre c'est trempé, j'ai bien pris garde de ne pas y mettre mon sac. J'ai préféré le pendre à un crochet situé de long d'un poteau métallique servant de support au toit du restaurant. Pas de bol, plutôt une marmitte, l'eau y coule tout le long comme si un toboggan devait finir sa route dans mon sac!!! Merci Dani de me l'avoir fait remarquer, je te dois un appareil photo et un portefeuille restés secs. Re-ouf!!
Comme quoi malgré tout ce pétrin, mise à part les lunettes, à chaque fois, il s'en faut d'un cheveu pour que ce soit vraiment la cata'.
Je surnage et garde le moral.
En quittant le restaurant, la pluie tombe encore quand on tombe nezs à nezs avec James, Lucy et Connie. Comme ils sont de bonne compagnie, pas comme d'autres, on se fixe un rendez-vous à 16h30 dans un bar indiqué par le LP, c'est plus pratique.
J'y suis le premier car j'ai eveillé un peu de jalousie du fait de ma sieste matinale lorsque l'ascenseur était en carafe. Maintenant qu'il re-fonctionne, Dani et Simon préfère se reposer un peu. Moi, il faut que j'exorcise cette journée de tous les diables. Et pour cela, rien de tel que de lever de coude en compagnie de sujets de sa Majestée, la Reine d'Angleterre.
C'est donc le début des hostilités. En cinq heures de temps, j'enfile sept whiskys-cocas. C'est plaisir d'autant qu'il y a encore un billard et qu'en plus les serveuses, par l'opération du Saint-Esprit, ne m'en facturent que quatre. Je suis pompette, il est 22h30, tout roule, le moral n'est plus dans les chaussettes, il est dans le gosier. D'ailleurs, pour ceux qui prétendent que sans alcool, la fête est plus folle, il faut vraiment qu'ils travaillent au ministère de la santé, section privations et dénégations des plaisirs de la vie, pour croire en des conneries pareilles.
Peut-être peut-elle être aussi folle, faut voir, mais plus folle? Vous vous écoutez parler des fois????
Nous, pendant ce temps là, on va voir du côté d'un autre comptoir. La pluie a cessé et comble de bonheur, Simon est rentré se coucher. Il faut dire que quand on est un boy-scout, 22h30 c'est quand même super tard, il doit avoir un atelier macramé le lendemain matin ou quelque chose dans le genre... Repose en paix mon grand...
Le reste de la troupe est déchainé. C'est le dernier soir officiel de délire nocturne pour nos camarades d'outre-Manche car leur argent atteint des planchers inquiétants et de toute manière, ils n'en ont plus que pour quelques jours loins de leur base, ils s'efforcent donc de nous faire tenir leur rythme à Dani et à moi pendant qu'on s'échine à leur faire oublier que pour eux c'est le bout de la route. Pour ma part, j'ajoute à l'addition de mes boissons trois nouveaux verres de rhum importé et remarque que plus ça va plus Connie me fait du rentre dedans.
A minuit, on change encore notre fusil d'épaule, on est maintenant dans un bar dansant le long de la plage dans lequel si tu veux danser, il faut enlever tes chaussures.
James est maintenant vraiment à la limite de ne plus savoir où il vit. Il me remplit l'oreille pendant deux heures sur l'Ouganda où il est allé au début de son voyage. C'est long mais c'est intéressant donc je ne dis trop rien. A la fin du monologue, James me fait promettre d'y aller trainer mes guètres à la rencontre des derniers gorilles. Je m'en acquitte en sachant que de toutes façons, c'est pas pour demain!
Pendant que James me parle, je remarque une partie de chaises musicales très amusante. Dani est maintenant complètement à fond sur Connie. Mais toujours rien de plus concret ne se produit pour l'instant.
A 2h, notre bar ferme, on s'en trouve un dernier. Avec James, on joue en équipe au billard, il joue comme une épave et moi, comme un sobre.
Dans son coin enfin, la tête de Dani fait enfin le miroir avec celle de Connie, il était temps, il s'est donné vraiment du mal.
Et pour finir, à 5h, notre dernier bar ferme à son tour. C'est le temps du retour à la case départ.
Je marche avec James et Lucie. Parfois, je suis obligé de porter James. Dani et Connie sont introuvables.
On est à l'hotel peu de temps après, on ne s'est pas perdu ce qui constitue un petit miracle.
A 5h30, Dani fait éruption dans la chambre. Je suis à deux doigts de fermer les écoutilles et Simon ronfle à ne pouvoir être réveillé. Dani devrait être avec des traits radieux même si un peu tirés compte tenu de l'heure, or, il a l'air soucieux. Et il y a de quoi, je vous raconte.
Dani et Connie sont rentrés par la plage. C'était l'endroit idéal pour un bécottage en règle. Mais souvenez-vous de ce que je vous disait à propos de la plage de Nha Trang au petit matin, elle se remplit comme c'est pas permis. Donc, il a été impossible pour les tourtereaux de s'ébattre dans le calme. Il s'est trouvé que tous les viets qui se sont levés tôt et retrouvée sur la plage autour des fougueux amants, ont trouvé le spectacle à leur gout et n'ont eu de cesse de se rapprocher pour mieux évaluer la qualité des préliminaires. Voyant ce manège, Dani et Connie n'ont eu d'autre choix que de remettre l'épée dans son fourreau et de rentrer bien sagement. C'est alors que Connie a eu un excès de lucidité, son sac à main est là mais il est vide de son portable, de son appareil photo et de son portefeuille!!!!! Bonjour l'angoisse le retour sur terre après une nuit à empiler les consommations! Bonjour aussi la tête de Dani qui assiste au spectacle de la décomposition de sa copine de même pas une nuit en direct à l'heure où il devrait déjà dormir.
En entendant cette histoire, c'est peut-être un peu salaud mais c'est surement l'alcool qui guide mes pensées, je me peux m'empêcher d'être mort de rire et d'être bien content de ne pas être à la place de Dani comme ça aurait pu être le cas.
Au final, Dani fera deux ou trois fois la navette entre notre chambre et Connie qui pête toutes ses durites.
Pour son dernier retour, on prendra dix minutes pour admirer le lever de soleil depuis notre gigantesque terrasse privée en riant de toutes les mésaventures de la journée. Comme quoi, il y a des fois, on devrait directement passer au lendemain.
On se couche il est 6h30.
Je suis crevé. J'ai bien fait d'avoir un bus à 7h.
Oui, oui, dans 30 minutes!!!!
Le voyage, c'est du sport.
Demain j'arrête.
Gros Bisous