En direct du nord-Vietnam où je gambade gaiement depuis une douzaine de jours et où je conduis une moto sans heurts depuis 4 jours, me voilà à te raconter mon arrivée au Laos sans mes notes laissées à Hanoï. Je rentre donc dans mon p'tit cerveau et pars, dans le département mémoire, à la recherche de 40 jours auparavant. Vous avez dit exercice de style?
Donc c'est finalement arrivé, je quitte le Cambodge par la porte dérobée qui amène au Laos au milieu des forêts et des champs. Le chauffeur du minibus qui me conduit ainsi que d'autres voyageurs depuis Kratie sort tout le monde du sommeil au poste frontière côté cambodgien. Le poste frontière, Quatre planches pour faire les murs, une autre pour s'imaginer une étagère-bureau où travaillent les douaniers, quelques taules pour se protéger de la pluie quand elle tombe, un drapeau; le compte est bon.
Un nouveau coup de tampon, le temps que le dernier passe et il s'est passé une heure, une heure pendant laquelle aucune voiture ou autre n'a daignée nous rejoindre dans un sens ou dans l'autre. On est vraiment au coeur de l'Asie du sud-est et finalement au milieu de nulle part. C'est à se demander ce que les douaniers vont faire du dollar qu'ils ont demandés à chacun.
On va ensuite, conduit sur cent mètres, rejoindre le côté vietnamien. Et de ce côté là de la frontière, c'est le reflet exact de l'autre cahute à la différence près qu'ici flotte le drapeau floqué de la faucille et du marteau en plus du drapeau lao. Ca fait d'autant plus bizarre que c'est Sylvain, un albigeois à la cool avec qui j'ai un bon feeling, qui me dit qu'il a vu le drapeau lao en remontant dans le minibus parce que moi j'avais vu que la faucille et le marteau. J'ai bien cru pendant un instant que la révolution prolétarienne s'était fait une place au soleil en remplaçant tout bonnement le drapeau lao. Bref...
En arrivant au Laos, plus question de refermer l'oeil, c'est pas que l'envie n'y est pas vu que dès que je prends un bus, je me laisse doucement bercer, mais on n'est plus séparé de l'embarcadère vers les 4000 îles que de quelques menus kilomètres.
Les 4000 îles sont des îles (ah bon?) nichés dans le large ventre du Mékong qui a cet endroit fait des centaines et des centaines de mètres de large. Et qui dit îles dit bateau pour y aller. Le notre se fait tranquillement attendre de longues minutes où la moindre place à l'ombre se négocie en or massif. Il n'y a pas un pêt de vent et la chaleur ferait d'un oeuf cru un oeuf dur, d'un Brice sec un Brice détrempé.
Et le bateau arrive enfin, nous sommes là une douzaine de voyageurs, tous bien impatients de déguster une boisson fraiche, les fesses posées dans un hamac ou autre chose, on est pas exigeant dans ces cas là.
La traversée jusqu'à Don Det, une des îles les plus touristiques, ne prend que de courtes minutes pendant lesquelles on navigue entre les rochers, les roseaux et la circulation fluviale faite de long bateau en bois comme le notre. C'est très reposant si l'on excepte le bruit de moteur de notre embarcation qui n'aurait pas à rougir dans une compétition face à un airbus au décollage mais plus dans une version aigüe comme une mobilette sans pot d'échappement. Je vous laisse imaginer le foutoir!
On arrive enfin à Don Det et le moins que l'on puisse en dire, c'est que malgré les GH qui se succèdent sur son pourtour, l'île a un doux parfum de ruralité qui fait tout son charme. C'est comme une ferme sans barrières. Les porcs, les coqs et autre zébus s'ébrouent tranquillement au rythme du soleil. Plusieurs milliers d'îliens doivent habiter là mais on doit pouvoir compter les véhicules à moteurs sur les doigts de trois mains. C'est calme, reposé, exactement l'image que je me faisait du Laos.
Avec Sylvain, on se trouve deux bungalows plus-rudimentaires-tu-dors-dehors donnant juste sur le fleuve et comme on pris la peine d'aller crêcher sur la côte ouest, ça sent bon les couchers de soleil en plus des bains! Car ce qui fait le charme du Mékong ici, c'est qu'on peut s'y baigner sans problème. Le courant est ridiculement faible, l'eau est d'une clarté à faire passer la Scène pour une mare aux cochons et d'une température à donner des suées à un esquimau moyen.
C'est pourquoi en ce premier jour, il ne faut pas une heure pour qu'on se décide à se jeter à l'eau, c'est le bonheur en mode flottaison!
Plus l'après-midi avance, plus on se sent comme à la maison, on doit déjà connaître une douzaine de personnes, ça file bon train!
Au cours de la soirée, on rencontre Seba et Toby, deux jeunes types dont j'ai oublié l'origine. Mais le moins que l'on puisse dire, c'est que je ne les ai pas oubliés. Seba et Toby viennent de passer plusieurs mois sur les 4000 îles, me confortant sur l'endroit en général, et connaissent tous les locaux et toutes les ficelles pour se procurer tout ce qui est procurable...
En premier lieu, le lao-lao. C'est l'alcool de riz traditionnel au gout de tord-boyaux et à l'effet boeuf.
En second lieu, le fameux tilleul à fumer pour se calmer du lao-lao.
Et en troisième lieu, la fameuse Beerlao chère au Pastorinho dont je porte le T-shirt labelisé pour se calmer des deux premiers.
La soirée qui suit est plus que bon enfant. On alternera le billard, le poker où j'ai gagné de quoi vivre une journée gratuite, et les franches rigolades qui caractérisent les soirées arrosées partagées avec des personnes de bonne compagnie à peine rencontrées.
Les heures défilent sans que personne ne s'en soucit, de toute façon, personne ne porte de montre ici, c'est la règle, le temps n'a que peu d'importance.
Les seules indications de temps qu'on aura ce soir là sont quand d'une part le bar ferme et d'autre part quand l'électricité se coupe sur l'ensemble de l'île. Je prendrais quand même le temps de vérifier l'heure au moment de dormir, il est 5h, Paris s'éveille (enfin dans 6h parce qu'avec le décallage horaire, il doit être 23h dans la ville lumière).
Résultat : comme personne n'a de montres, il est inconcevable de mettre le réveil en ce matin du 5 mars, et il est 16h30 quand j'éclos comme une fleur. Il est facile d'y parvenir, je vous vois venir criant au scandale, il fait 30° à l'ombre, 35° dans mon bungalow, et il n'y a pas le moindre bruit; c'est pour ça, ça vous plombe un globe-trotteur...
La journée est donc presqu'à mettre aux oubliettes si ce n'est que les plaisirs de la veille se poursuivent encore ce jour, faut pas gâââcher.
A la nuit tombée, on se fait aussi payer un coup dans un mariage local. Tout le monde y est encore plus ravagé que nous, il faut dire que le mariage se célèbre déjà depuis deux jours et deux nuits et que les laos ne prennent même pas le temps de dormir pour récupérer. C'est pourquoi on y fera pas non plus long feu, c'est pas très sain comme mariage!
On finira la soirée comme on avait déjà fini la précédente, sauf que deux fois de suite, c'est dur pour l'organisme. Surtout pour les autres car Sylvain est déjà rentré quand Seba et Toby me proposent de rester dormir chez eux. C'est avec d'autant plus de plaisir que j'accepte car ils dorment chez l'habitant sur des paillasses où toute la famille
se retrouve du grand-père fumant la pipe à eau au bébé de quelques mois. En plus, c'est pour les deux zigotos leur dernière soirée en ces murs s'il y en avait, l'ambiance n'en est que plus festive!
Je m'endormirais finalement juste à côté du grand-père qui ronfle comme un sonneur, pas un problème, j'ai le sommeil lourd de celui qui se couche le dernier.
Le jour suivant, j'avais depuis la veille donné rendez-vous à Sylvain à 11h pour un petit déjeuner matinal. Et bien, messieurs les censeurs et autres JP en puissance, j'ai réussi à me lever sans l'aide de personne! Toute la famille vaque déjà à ses occupations, ça m'aide aussi à l'inverse de Toby et Seba qui doivent avoir l'habitude et n'ouvrent chacun qu'un oeil au moment où je leur dis au revoir et merci pour tout. J'en profite également pour oublier la lampe électrique à dynamo que m'avait laissé Maman. Oups...
Je retrouve donc Sylvain, qu'on appelle aussi Momo c'est rigolo, qui lui est frais comme la rosée, pas comme moi.
Allez! Une bonne douche froide et ça repart! En effet, ça repart. Quelques tartines après, on est les fesses posées sur un vélo chacun pour une exploration un peu plus poussée (c'est pas difficile...) de Don Det et de Don Khon, l'île voisine reliée à la première par un vieux pont datant de l'époque coloniale.
La chevauchée est on ne peut plus plaisante, le terrain est plat même si très caillouteux. Je pense aux cyclistes du Paris-Roubais et me dis qu'il pourrait prendre l'autoroute, les cons... Car pour nous, pas d'autre alternative, c'est à travers bois et champs ou pas du tout.
C'est d'ailleurs tellement à travers bois que le vélo de Momo à la différence du mien déraille tous les 400 mètres!
Au moment de traverser le pont déjà évoqué, j'en profite pour enlever le T-shirt beerlao du pasteur. La chaleur est suffocante. On poursuit quelques centaines de mètres vers un temple situé sur Don Khon lorsque je me rends compte de mon oubli : le T-shirt est resté sur le pont!!! Machine arrière toute!!! Et bien j'aurais beau multiplier les coups de pédales, plus de T-shirt en vue, peut-être dans la rivière en contrebas, peut-être sur le dos de quelqu'un, c'est le mystère en plus d'être la tuile : comment veux-tu que je visite un temple torse nu, carton rouge!!!!!
Désolé Mathéo mais il semblerait que je perdes chaque jour un peu plus la boule en plus de mes affaires!!
On sera donc obligé de faire l'impasse sur le temple pour se concentrer sur ce que les îles ont à offrir de meilleur : des cascades. Et là, si t'as rien à te mettre sur les épaules, personne ne t'en tiendra rigueur, bien au contraire!
Des chutes d'eau, il faut bien que tu te rendes compte que j'en ai déjà vu beaucoup dans de nombreux pays comme les chutes d'Iguazu par exemple (voir photos dans la rubrique "pas novice des vacances - Argentine Chili Bolivie) mais là, c'est encore différent, comme nulle part ailleurs. C'est comme si le Mékong ne savait plus où se déverser et partait dans des dizaines de cascades dans tous les sens de toutes les tailles. Et à la différence d'Iguazu par exemple, ici il est possible de se baigner dans de petites chutes en amont des plus grosses. La seule chose étant de ne pas se faire emporter par le courant dans des rapides puis dans des chutes, hypothéquant ainsi toutes mes chances de vivre vieux.
Avec Sylvain, on saute donc de rocher en rocher, on multiplie les points de vue, on se la coule dure.
Il est ensuite temps de poursuivre notre chemin, poussés que nous sommes par la faim qui nous taraude.
Retour en selle sur quelques kilomètres pour nous rendre sur une plage de sable qui borde le fleuve, elle même bordée par une gargotte où la nourriture coule à flot. Il n'en fallait pas tant, on se fait craquer la ceinture!
Et tant qu'on est là, que pour repartir d'ici à vélo c'est un côte hors-catégorie sans asphalte assorti, on préfère traverser la plage à pieds sur le sable brulant (à ce niveau, c'est même plus brulant, c'est les portes de l'enfer sous tes pieds!!!!) pour une trempette bien méritée, même si à contrecourant de tous les conseils de grand-mère qui interdisent de se baigner après le repas surtout s'il fait chaud. Qu'importe, on crève de chaleur et je suis pas loin de la vérité!
A cet endroit du Mékong, en aval des chutes, de gros blocs de pierres émergent de la rivière qui a ici un courant un peu plus important.
C'est idéal, d'une part pour nager à contre-courant comme un coureur de salle de sport sur tapis roulant, et d'autre part pour se jeter de plusieurs mètres dans l'eau. On commence gentiment, 2-3 mètres. A chaque fois, il faut sonder la rivière pour vérifier le niveau d'eau car les rochers sont bien traitres et potentiellement dangereux quand ils affleurent à un mètre de la surface.
A 2-3 mètres donc, on saute, puis on s'enhardit et on plonge. Une fois ceci fait, l'excitation aidant, il faut toujours trouver un nouveau spot pour prendre de la hauteur et chuter plus longtemps. Le suivant donc 4-5 mètres, et à chaque fois à la première tentative, c'est un peu l'inconnu et la trouillasse qui nous prennent. En d'autres termes, c'est l'adrénaline qui coule par litres.
On s'ébroue donc ici pendant près d'une heure jusqu'à être rejoints par d'autres touristes qui ont encore moins froids aux yeux. Les types enchainent les vrillent et les saltos. Aux fous!!!!
Mais quel spectacle!!!!
Les types vont même jusqu'à ouvrir un nouvel itinéraire sur un rocher qui doit culminer autour de 10 mètres!! Si vous n'avez aucune notion de distance, imaginez un balcon au 3ème étage. Et le chemin pour y aller, c'est comme avant mais en plus haut, de l'escalade à tous les étages avec les pieds mouillés!! Autant dire que la 1ère fois que j'atteints le sommet, j'en emmène pas large, et puis comme finalement, c'est maintenant plus simple de sauter que de redescendre en mode varape, je me lance en faisant bien gaffe à ne pas atterrir les jambes écartées si vous voyez ce que je veux dire...
Et une fois revenu à la surface, quel pied!! Quelles sensations!!! Quel plaisir de vaincre sa peur, WHAOUUUU!!!
Ce manège se poursuivra jusqu'aux dernières lueurs du jour, on tire le temps au maximum de nos possibilités en étant sûr d'abord de repartir avec un peu de lumière et ensuite en se promettant de revenir le lendemain of course!!!
Il fait finalement nuit noire lorsqu'on retrouve notre "chez nous". Et avec l'addition des efforts de la journées et du rythme haut en couleur des soirées précédentes, les baillements sont venus bien plus tôts que d'habitude. Juste le temps de dîner et d'allumer quelques cierges avant de dormir d'un sommeil pas difficile à trouver. Bonne nuit.
Il est 10h quand le réveil ne sonne pas, et pourtant je suis quand même réveillé, comme un chef (ou presque, il est quand même 10h).
Et aujourd'hui, c'est déjà à priori notre dernier jour sur les îles. Il va donc s'agir de ne pas se bruler les ailes et ne pas se perdre dans des détours.
Premièrement : ne pas se bruler les ailes. C'est pas bien compliqué, il suffit de prendre son temps avant de décoller, on sait faire.
Deuxièmement : éviter les détours. Pas compliqué non plus, on va directement sur nos plongeoirs improvisés pour une nouvelle session de bonheur aquatique.
Et comme la veille, le bonheur est là. On sera cette fois rejoint pendant par deux gamins des environs. Ils doivent avoir entre 6 et 8 ans, et eux aussi grimpent et sautent depuis des hauteurs qui font plusieurs fois leur taille. Il vont même jusqu'à nous presser ou rire gentiment de nous quand on prend un peu trop de temps. Y'a plus de respect pour les ainés, j'vous jure... Tout fout le camp ma bonne dame!!
La journée filera donc au rythme lent du fleuve dans des effluves parfumées, rien ne manque, même pas une bonne soirée arrosée pour honorer les îles du plaisir apporté à nos petites personnes modestes devant le spectacle de ces 4 jours passés ici.
Théoriquement, le lendemain, on retrouvera Steve un peu plus au nord pour un bout de chemin supplèmentaire. Il me tarde car je suis sur et certain qu'on va former une super équipe!!! On verra bien. Qui vivra verra. Qui lira lira.
Comme d'hab', les photos correspondantes sont maintenant en ligne.
Un café, l'addition. C'est pour moi, ça m'fait plaisir.
Grosses bises à tous.
A ton tour de laisser un commentaire...
Ah ben non, finalement je me suis avancé pour rien, overblog déconne et je n'arrive pas à mettre les photos en ligne. Tant pis... Mais pour le café et l'addition, rassure toi, c'est rétro-actif. Trop classe...