Dans les rue de Selçuk, sur mon vélo, je suis le roi des maillots roses,
Et comme j'ai les mollets tout durs, et que j'ai rien à voir avec Gérard Holtz,
J'irais désormais à pieds, j'aurais au minimum moins mal à ma dignité.
Pas besoin de te rappeler que les réveils sont matinaux, tu dois en avoir assez de m'entendre geindre, et tu as raison.
Je vis au fil de l'eau sauf qu'ici tout est sec, toujours pas été ni sous la pluie ni sous la grisaille, et c'est tant mieux car je vais encore passé la journée à l'extérieur.
Après avoir tourné autour depuis 24h, je file à Ephèse, première de mes véritables découvertes de cités englouties.
C'est pratiquement sur le pas de ma porte, seuls 3km nous séparent. Et comme rien d'autre n'est à l'ordre du jour, on prend son temps et on respire le grand air.
Pas compliqué de se rendre sur place, il suffit de suivre la route, à pieds sur un chemin à l'abri du bruit des voitures et à l'ombre du soleil ravageur.
Dans mon paquetage, un oeuf dur chapardé au petit déjeuner, une grande bouteille d'eau, je suis autonome. L'appareil photo attend bien tranquillement l'heure des hostilités.
Sur mon chemin ombragé, des appareils de gym à la mode pékinoise sont laissés à la disposition des courageux. D'ailleurs, à mon passage, un papy qui fait son exercice stoppe son effort et me fait l'accolade reconnaissant là le marcheur courageux, très belle entrée en matière pour cette radieuse escapade.
Au bout de quelques dizaines de minutes, j'arrive sur le site. de nombreux bus sont garés là, attendant le retour des touristes qu'ils ont déjà déversés. Je ne suis pas tout seul, Ephèse est une destination phare du tourisme turc.
Autres témoins de cet exode touristique, de nombreux marchands de bibelots guettent également le passage des visiteurs dépensiers.
Le jus d'orange frais est à plus de 3 euros, le gogo est roi.
Je m'acquitte comme il se doit du droit d'entrée et pénêtre sur ces terres bibliques. La ville fut fondée près de 10 siècles avant JC et vit passer tout ce que la région a compté d'envahisseurs : Cimmériens, Lydiens, Perses, Romains, Byzantins, Arabes, Turcs Seldjoukides, les croisades et puis l'empire Ottoman.etc; c'est un vrai bordel, y'en a partout!
La "Sainte" Vierge y posa également ses valises en compagnie de Saint Jean qui y rédigea son évangile et dont la tombe a été visitée la veille. Dieu seul sait ce qu'ils y firent, ces deux là...
Le site est à la mesure de tout ce remue-ménage, il y a de vieilles pierres à perte de vue, c'est incalculable et très impressionnant, d'autant plus impressionnant que c'est aussi ma première vision semblable si l'on exclue les arènes de Lutèce qui en comparaison sont une cerise à côté d'une pastèque.
Ici, aucune entrave au regard, tout ce qui est présenté est d'origine et souvent remonté par des archéologues amateurs de puzzles bien loin d'Indiana jones.
Je ne pourrais pas te retranscrire tout ce qu'on y trouve et qui composait jadis une cité antique mais tout est là, et si quelque chose est tombé ou englouti, de nombreux panneaux informatifs sont là pour aiguiller le visiteur novice : l'agora, les bains, l'odéon, l'hotel de ville, des arcs de triomphe, des fontaines, une bibliothèque, des rues voire des avenues pavés, un amphithéatre...
L'amphithéatre est d'ailleurs remarcablement conservé, 25000 personnes venaient ici avec les enfants se repaitre de spectacle qui laisseraient sans doute J.M Jarre sans voix. On y pénètre par la scène et la simple ascension des gradins est un tour de force, j'exagère à peine, à peine.
Quand j'y arrive, d'autres groupes de visiteurs sont là, et un néo-zélandais se sent poussé des ailes et entame un haka dans ce lieu colossale. Sa performance est salué par tout le toutim et par moi aussi. Ca permet de bien se rendre compte de l'accoustique du lieu qui est remarquable, même à quelques dizaines de mètres de distances, les cris du kiwi me parviennent limpides.
Bien d'autres groupes arriveront encore me faisant me sentir à l'étroit malgré la taille de l'édifice. Je vais voir ailleurs il y a de quoi faire, le site a la taille de la ville de l'époque dont j'ignore le nombre d'habitants, mais si le théatre fait 25000 places, j'ai de quoi tourné aux alentours.
Les touristes sont en fait partout, il faut presque faire la queue pour prendre une photo car chacun veut un cliché de ce qu'à pris le voisin la seconde précédente.
Mais midi arrive, le soleil quasiment au zénith, les gorges s'assèchent, les estomacs se creusent, et le touriste de groupe aura tôt fait de répondre à l'appel de son berger de guide qui lui annoncera quand manger. Je n'ai pas ce genre d'emploi du temps, tant mieux.
Pour moi, l'heure du repas, c'est quand ça me chante et de toute façon j'ai pas besoin d'aller bien loin pour trouver mon oeuf.
Je pérégrine, de ci à gauche, de là à droite. Un bas-relief par ci, une statue par là; c'est un régal pour les yeux et pour l'imagination. Suffit juste de dépasser les groupes de chinois et d'allemands en chaussettes sous sandales (c'est pas que un cliché!) pour avoir une vue à peu près dégagée et un environnement sonore plus tranquille.
Et comme prévu, l'appel de la fourchette a de toute façon eu raison de leur compagnie.
Il est 14h30, je retourne à l'amphithéatre; l'endroit est désert, je suis seul sur la scène avec une foule fantôme qui me domine. Immersion totale garantie même si je m'abstiendrais de pousser la chansonnette pour ne pas rompre le charme. "Sexual Healing" de Marvin Gaye a beau me traverser l'esprit, c'est ni le lieu ni le moment; ma voix de sauterelle ne parviendrait de toute façon pas à contenter les spectateurs imaginaires des places du fond.
Je me trouve un coin d'ombre dans les tribunes, mange mon oeuf et profite de l'instant. Rarement un simple oeuf dur aura pris des dimensions si théatrale.
Moment de calme dans un endroit qui respire un bruit tû depuis des siècles. Ces quelques frissons dureront un bon quart d'heure, le temps pour un nouveau groupe bruyant de rompre de charme. Je reste malgré tout encore un peu, je suis à l'ombre, je sèche en buvant de l'eau encore pas trop chaude, je me dilate les pupilles de ce spectacle grandiose.
Une autre caravane polyglotte arrive, je laisse finalement la place.
Je continuerais à tourner comme ça pendant plus d'une heure au gré du courant d'une foule devenue clairsemée au fil de l'après-midi, jusqu'à un ultime moment de plaisir :
un batiment en ruine se trouve un peu plus à l'écart du reste du site et comme il est près de la sortie et qu'à ce point, les gens normaux en ont pleins les pattes, je m'y dirigi et tomba sur un champ de mures.
Un demi kilo de régalade fruitière environ aura fini de m'achever, l'heure approche les 17, trois kilomètres me séparent de l'hotel, il est temps de finir la ballade pour aujourd'hui; non sans rire, dans les boutiques pour touristes, un panonceau attire mon attention : "genuine fake watches" ou "vraies fausses montres".
Le vendeur ne doute vraiment de rien et moi, j'ai la banane, encore.
Je reprends le chemin inverse, me faisant doubler par des autobus remplis d'autogusses plus pressés que moi, la fin de journée est douce, le chemin tranquille comme mon rythme de marche. J'ai sorti finalement l'Ipod, et chante désormais au vent et à qui veut l'entendre.
Je retrouve à l'hotel l'irlandais qui me propose de boire une bière fraiche, ce que à ce point je ne puis refuser.
On y croisera 2 australiennes de Sydney où un lit m'attend désormais...
Avant de me coucher, j'ai pensé quand même à toi, et t'ai rédigé un des articles précédents qui m'a encore amené au bout de la nuit, il va falloir que je m'y fasse, je suis pas là pour dormir!!
Comme à Istanbul auparavant, j'ai écumé vaillamment les incontournables alentours. Il est temps de refaire mon sac et de me préparer à migrer.
L'étape suivante sera Pamukkale, et rien qu'à prononcer le nom, ça devrait valoir le déplacement.
Comme tu as été très sage, tu trouveras un album illustrant Selçuk et ses environs ephèsiens, rince-toi l'oeil, c'est moi qui régale!!!
PS : Je n'ai pas voulu troubler vos saints esprits, mais sachez que à Selçuk, on croise de temps en temps des tortues terrestres. Vous ne voyez pas le rapport? Je vous laisse découvrir les photos, mais sachez qu'à 2 pas de la tombe de Saint Jean, c'est luxure et compagnie...
Pour ceux qui connaissent cette séquence culte du zapping, sachez qu'elles poussent effectivement des petits Hiiiiiiiiii Hiiiiiiiiiii !!! A mourir de rire!!!!
PPS : juste pour que tu saches où j'en suis réellement, je quitte Pamukkale demain après 2 jours sur place, direction la mer et les vacances.
Je suis pas trop en retard dans mon récit, ça devrait calmer les sceptiques!!!!
Merci pour vos commentaires, ça fait chaud au coeur.
N'hésitez pas également à me raconter vos histoires, j'en salive d'avance.
et en passant, Mary Poppins, j'aime Pocoup c'que vous faîtes.
PPPS : quelqu'un a vu Reno le Choiz'? Et Bruno le Dieud'? Et Sybz'? et Pierre Paul Jacques? Et que deviennent les Compagnons de la Chanson? la compagnie Créole?
PPPPS : il faut vraiment que je dormes, je contrôle plus mes dix doigts!!!!!